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Violences policières : le rapport qui accuse
Article mis en ligne le 8 mai 2021
dernière modification le 7 mai 2021

L’Observatoire des pratiques policières de Toulouse a publié jeudi un rapport intitulé « 4 ans après » où il passe en revue le comportement des forces de l’ordre sur 150 manifestations ou rassemblements dans la capitale occitane. Pour le collectif, l’enjeu est démocratique. Il répond à l’urgence d’un contrôle citoyen des politiques publiques à commencer par la sécurité. Un texte de 27 pages, à charge.

Au départ de l’initiative, Sivens et la mort de Rémi Fraisse, les violences durant la Loi Travail. Mais c’est le déploiement colossal face aux opposants du méga-centre commercial Val Tolosa qui sert de déclencheur fin 2016 : un collectif pluri-associatif est formé en mars 2017 à l’initiative de la Fondation Copernic, de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et du Syndicat des avocats de France (SAF). La décision est prise de constituer un réseau d’observateurs chargés de suivre les dispositifs et les pratiques des forces de l’ordre. L’approche retenue est pragmatique suivant une méthodologie de neutralité comportementale validée par un laboratoire de recherche de l’Université Jean Jaurès. (...)

De 2017 à janvier 2021, 27 observateurs vont sillonner 150 manifestations ou rassemblements réalisant 10.000 photos, 80 heures de vidéos soit l’équivalent de 430 journées. Ils rédigent une première note de synthèse à chaud au cœur de la mobilisation des gilets jaunes. L’intérêt du rapport publié ce 29 avril est d’avoir une base de 4 ans au lieu de 2. La mise a l’arrêt pour cause de COVID-19 d’une partie conséquence de la vie sociale a permis en outre de faire la part entre les tendances conjoncturelles et des évolutions plus structurelles.
Manifester, c’est aujourd’hui accepter d’être considéré comme un délinquant

A la lecture du document, l’attention est d’abord retenue par l’inflation du dispositif sécuritaire au fil des ans. (...)

La mode des manifs en famille avec enfants et poucettes a vécu. (...)

. Sur Toulouse, les observateurs eux-mêmes ont été rudoyés dès leurs premières sorties et contraints de s’équiper de casques, masques à gaz, lunettes de protection. Après discussions avec les autorités, la décision a été prise en 2018 de déclarer en préfecture toute participation de l’OPP à des mobilisations. Malgré cela, entre le 4 février 2019 et le 25 novembre 2020, les observateurs ont dû déposé 5 fois plainte pour violences policières. Sur 4 ans, ils se sont retrouvés 31 fois la cible des forces de l’ordre donnant lieu à 4 hospitalisations, un dizaine d’hématomes, une soixante d’intoxications au gaz lacrymogène.

Pascal Gassiot, responsable de l’antenne Copernic sur Toulouse, a lui même été « scalpé et avec deux cotes cassées » en 2019. Entendu il y a deux mois, il est en attente des suites données. Depuis 2017, une seule mesure disciplinaire a été prise à l’encontre d’un policier des CSI. « La LDH, vous nous pétez les couilles » avait-il lancé à l’encontre d’observateurs qui venaient de se faire matraquer. Les violences policières, rappelle le document, s’exercent d’abord contre les manifestants mais également toutes celles et ceux qui côtoient les cortèges : la presse, les secouristes comme les passants victimes collatérales, notamment de l’utilisation immodérée des gaz lacrymogènes. (...)

Si la loi du silence commence à se briser en matière de violences policières, le problème est structurel, ce que le pouvoir refuse de reconnaître. « On a droit à un discours poli sur les libertés mais sur le terrain on rationalise l’intervention policière, criminalise l’action revendicative et la judiciarise » (...)

La loi pour une sécurité globale est évoquée dans le rapport par le prisme de l’atteinte aux libertés de photographier, filmer et diffuser : « Il n’y aurait pas eu d’affaire Cédric Chouviat si les exactions des policiers n’avaient pu être filmées » commentent ses rédacteurs. Ils soulignent sa cohérence avec le nouveau Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) et l’évolution systémique engendrée. (...)

Vers une violence systémique ?

L’OPP reprend l’analyse selon laquelle, faute d’une majorité d’adhésion à son projet néolibéral, Emmanuel Macron use d’un excès d’autorité. Libéralisme et autoritarisme vont de pair. La tendance ne date pas d’hier (...)

La privatisation de la police a permis d’élargir les missions de la police municipale et les prérogatives des agents privés qui ont vu légaliser le port d’arme dans le cadre de certaines activités. Les observateurs s’inquiètent de cette autonomisation des forces de l’ordre vis à vis de l’Etat, de leur perte de la notion d’intérêt général et de déontologie. Les pratiques de management appliquées à la police sont lourdes de conséquences. (...)

Le risque existe-t-il de glisser vers des formes totalitaires de maintien de l’ordre ? Après quatre années d’observation sur le terrain, de documentation et d’analyse l’OPP répond par l’affirmative. Sauf à changer de logiciel.