
Dans une lettre ouverte, l’ensemble des maisons d’éditions indépendantes vouées et dévouées aux écritures pour la scène, s’alarme d’une situation en voie d’être dramatique. Théâtres fermés, spectacles en rade, les éditeurs -comme leurs auteurs- broient du noir mais ,quoi qu’il leur en coûte, résistent.
Les théâtres étant fermés au public jusqu’à une date indéterminée mais « ouverts » aux répétitions, les nouveaux spectacles se multiplient mais ne sont vus que par un « public restreint » réunissant quelques pros et quelques journalistes. Les conséquences seraient ubuesques si elles n’étaient dramatiques.. On voit ainsi paraître des critiques de spectacles que le public ne pourra pas voir avant longtemps. Pire, on voit des spectacles qui, de dates annulées en reports multiples, finiront par n’être vus pas personne, des spectacles morts nés en quelque sorte. Nous avons ainsi entamé dans ce blog la triste « chronique des créations en voie de disparition », et mis au « frigo » les articles des spectacles pour le jour où le public pourra les voir, tout en envoyant ces articles aux équipes de création pour qu’elles aient un « retour ». Bref la vie théâtrale est devenue une peau de chagrin.
Les conséquences sont plus que préoccupantes pour les auteurs. Faute de spectacles joués, n’ayant pas le statut d’intermittent du spectacle pour la plupart (quelques uns sont aussi metteurs en scène , acteurs), ne bénéficiant que trop rarement de commandes effectuées par des théâtres, étant sujets aux aléas des bourses et résidences, ils sont privés de ce qui est ou devrait être leur principale ressource : les droits d’auteurs. Et les maisons d’édition qui les éditent reçoivent ici et là des aides à l’édition, mais sont privées de recettes.
Si les auteurs ne se sont pas réunis pour l’heure en « collectif », fait sans précédent, à l’exception de maisons d’éditions rattachées à un grand groupe éditorial (comme Actes Sud Papiers), toutes les maisons d’édition indépendantes vouées au théâtre de langue française -soit l’ »L’Arche éditeur, Les Cygnes, Deuxième époque, éditions L’Espace d’un instant, éditions Espaces 34, éditions Koinè, éditions Théâtrales, La Fontaine, Lansman éditeur, L’Œil du Prince, Quartett éditions, Les Solitaires Intempestifs – se sont réunies pour publier un cri d’alarme en forme de lettre ouverte
Extrait :
« Nous subissons depuis mars dernier la fermeture des théâtres et autres lieux de culture, avec une courte période de réouverture d’un mois et demi – de mi-septembre à fin octobre. Les ventes de livres au sein des théâtres sont rares, mais celles générées par l’actualité scénique en librairie sont désormais nulles. Les conservatoires, les écoles de théâtre et les ateliers de pratique amateur ont également été suspendus : là encore, une partie de notre clientèle a provisoirement (espérons-le)
disparu. Les productions sont à l’arrêt, et celles et ceux qui voient leurs projets sans cesse reportés n’ont sûrement ni besoin ni désir d’aller découvrir de nouveaux textes ou de se plonger dans les répertoires – ceux qu’ils montent sont leur préoccupation centrale. ».
Si le chiffres d’affaires de la librairie ( romans, essais, beaux livres, etc.) n’a connu qu’une baisse de 4 ;5 % en 2020, il en va tout autrement pour les maisons d’éditions théâtrales qui subissent une baisse de 20 à 25 %.
« Et pourtant, poursuivent les éditeurs, nous maintenons le cap pour pénaliser le moins possible les auteurs et autrices que nous défendons, en soutenant également les équipes artistiques, techniques et administratives des théâtres et en appelant à la mobilisation des libraires pour faire vivre ce rayon « théâtre et arts du spectacle ». Malgré le fait que l’édition de théâtre continue d’être soutenue, par certaines librairies, certains théâtres et le Centre national du livre via sa commission théâtre : le livre et la revue de théâtre souffrent actuellement. Que leurs soutiens, leurs lecteurs et lectrices ne les oublient pas ».
Alors lectrices et lecteurs curieux, spectatrices et spectateurs en manque : soyez solidaires, lisez du théâtre. Des pièces, des essais, des revues. Relisez vos classiques dans de nouvelles traductions et découvrez des pièces nouvelles.
Tenez, pour commencer ouvrez Jouer c’est le titre du dernier numéro de la revue théâtre /public préparé avant sa disparition par Christian Biet. (...)