Dans la bande de Gaza, le cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre n’a pas mis fin à la crise humanitaire. Frappée par la malnutrition et ne recevant qu’une aide au compte-gouttes, la population endure son troisième hiver dans un territoire dévasté.
"Mes enfants tremblent de froid et de peur." Rencontré par l’AFP, Jamil al-Charafi, 47 ans, s’est réfugié avec ses six enfants dans la région de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. Déplacé comme des centaines de milliers d’autres Palestiniens, il affronte le froid et des pluies diluviennes dans un territoire ravagé par deux ans de bombardements.
C’est le troisième hiver qu’affronte la population depuis la guerre menée par l’État hébreu dans la petite enclave palestinienne. Près de 80 % du bâti a été endommagé ou détruit sous le feu israélien, selon l’ONU. Sur une population de deux millions d’habitants, 1,7 million de Gazaouis vivent aujourd’hui dans des abris improvisés.
Ou sans abri : sur les plus de 300 000 tentes réclamées pour abriter des déplacés, seulement 60 000 ont été reçues, dénonce Amjad al-Chawa, directeur général du Réseau des ONG palestiniennes à Gaza.
Beaucoup tentent ainsi de s’abriter dans des bâtiments partiellement détruits. Ces ruines se transforment parfois en pièges mortels. "Tous les jours, des bâtisses s’écroulent à cause des vents et des fortes pluies", raconte sur l’antenne de France 24 Claire Nicolet, coordinatrice des urgences de Médecins sans frontières (MSF) à Gaza. (...)
Mi-décembre, la tempête Byron avait déjà fait au moins 18 morts et affecté 235 000 personnes selon l’ONU, qui rapportait par ailleurs l’effondrement de 17 bâtiments et l’endommagement de 42 000 tentes ou abris.
"On a l’habitude des intempéries à cette période de l’année", soupire sur France 24 Rami Abou Jamous, journaliste indépendant à Gaza. "Mais la situation est aggravée par l’interdiction israélienne de faire entrer ce qui est nécessaire aux camps de fortune : tentes, matelas, couvertures, habits hivernaux." (...)
Mi-décembre, la tempête Byron avait déjà fait au moins 18 morts et affecté 235 000 personnes selon l’ONU, qui rapportait par ailleurs l’effondrement de 17 bâtiments et l’endommagement de 42 000 tentes ou abris.
"On a l’habitude des intempéries à cette période de l’année", soupire sur France 24 Rami Abou Jamous, journaliste indépendant à Gaza. "Mais la situation est aggravée par l’interdiction israélienne de faire entrer ce qui est nécessaire aux camps de fortune : tentes, matelas, couvertures, habits hivernaux." (...)
Famine "repoussée", malnutrition durable
À la faveur du cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre et d’une levée partielle des entraves, l’état de famine – déclaré en août – n’est officiellement plus de mise à Gaza. Ce fléau a été "repoussé", s’est félicité Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies.
"La population prend en moyenne deux repas par jour, ce qui est très différent de juillet, où elle n’avait qu’un repas par jour", précise Antoine Renard, directeur du Programme alimentaire mondial en Palestine.
Mais même "s’il y a un peu plus de nourriture sur les marchés, elle reste très chère et insuffisante, de même que l’accès à l’eau potable ou aux produits d’hygiène", alerte Claire Nicolet de MSF. "Tout le monde a perdu énormément de poids pendant la période de famine. Les nouveau-nés arrivent dans des situations critiques, puisque les mères n’ont pas suffisamment mangé. Les enfants ont des carences."
En cause aussi, la nature des denrées qui parviennent dans l’enclave. "Le nombre de cas de malnutrition aiguë pourrait augmenter tant que les protéines ne seront pas suffisamment disponibles à Gaza", prévient Ahmad al-Farra, chef du service de pédiatrie de l’hôpital Nasser.
La crise "ne va pas se régler en quelques mois", résume Claire Nicolet.
D’autant que l’aide continue à arriver au compte-gouttes, poursuit la coordinatrice des urgences de MSF à Gaza. "On n’est pas du tout en train de répondre de façon correcte aux besoins humanitaires. Ce que nous faisons est une goutte d’eau dans l’immensité des besoins."
Quant au cessez-le-feu, il reste très fragile. "Il n’y a pas un jour où on n’entend pas des bombardements." (...)
"Population noyée dans la souffrance"
La diplomatie fera-t-elle taire les armes en 2026 ? Washington affirme vouloir accélérer la mise en place de la deuxième phase du cessez-le-feu, qui prévoit notamment un retrait progressif des troupes israéliennes et le désarmement du Hamas. Mais la branche armée du groupe islamiste a réaffirmé qu’elle "ne renoncerait pas" aux armes.
Sur le front humanitaire, les États-Unis ont aussi prévu d’octroyer deux milliards de dollars pour l’ensemble des missions internationales de l’ONU en 2026, contre 11 milliards en 2024. Les Nations unies, elles, réclament 4,1 milliards rien que pour Gaza et la Cisjordanie.
Sur le terrain, pourtant, "l’espoir est toujours là. Mais la population est noyée dans la souffrance", confie le journaliste Rami Abou Jamous. Ou comme le résume ce Gazaoui rencontré par l’AFP : "On est fatigués de cette vie."