
En 2008, le CRA – Centre de Rétention Administrative – de Nantes, situé près du commissariat central, prenait feu, et n’a jamais ré-ouvert. 14 ans plus tard, un nouveau lieu d’enfermement destiné aux étrangers, beaucoup plus grand, est programmé dans la ville.
En octobre 2022, la maire socialiste Johanna Rolland se rendait dans le bureau de Gérald Darmanin pour le supplier de lui donner plus de moyens pour « lutter contre l’insécurité », dans un contexte de discours médiatique anxiogène sur Nantes. La ville était présentée comme un coupe gorge – un récit largement démenti par les chiffres officiels, mais qui a été tellement répété par Cnews et BFM qu’il est rentré dans les esprits. Darmanin, malin, profitait de cette situation pour annoncer l’implantation à Nantes d’une compagnie de CRS 8, unité de super-flics ultra-violents qu’il venait de créer, et surtout un nouveau Centre de Rétention. Le Parti Socialiste aura donc réussi à transformer Nantes en champ de tir policier et en prison géante.
En avril 2024, c’est désormais acté, le nouveau CRA à Nantes sera bien situé à côté de la maison d’arrêt de Nantes-Carquefou sur l’ancienne friche militaire du Champ-de-Manœuvre, sur un terrain appartenant au Ministère de la Justice. Ce projet xénophobe rejoindra la longue liste de lieux d’enfermement déjà présents à Nantes avec le centre de détention, la maison d’arrêt de Carquefou et la prison pour mineurs à Orvault. (...)
Un centre de rétention administrative n’est ni plus ni moins qu’une prison déguisée, où l’on enferme des humains qui n’ont commis aucune autre faute que de ne pas avoir les bons papiers. Tout y rappelle le milieu carcéral, les grillages, les barbelés, la surveillance constante par caméra, la possibilité de placer des personnes à l’isolement et l’abus de pouvoir des policiers.
Les locaux sont généralement délabrés, insalubres, le manque d’intimité et le racisme quotidien ont de quoi traumatiser les personnes contraintes dans ces lieux. Une violence d’État abjecte qui pèse sur toutes les personnes étrangères en situation irrégulière (...)
En 2022, ce sont 50,5% des personnes enfermées en ces lieux qui ont fini par être libérées, dont 40% par le juge des libertés et de la détention. Et l’enfermement en CRA n’aboutît pas nécessairement au renvoi à l’extérieur des frontières, car cela nécessite l’accord du pays étranger et le respect de certaines procédures. De nombreuses personnes sont donc enfermées de manière tout à fait arbitraire jusqu’à 3 mois avant d’être libérées… jusqu’au prochain contrôle, qui mènera de nouveau à trois mois d’emprisonnement. Il est question de faire régner la terreur, punir et enfermer les étrangers, rien de plus. Et l’État colonialiste est capable de verser des sommes colossales pour réprimer celles et ceux qu’il considère comme « indésirables » . (...)
Tout cela concourt a cette stratégie d’humiliation et de déshumanisation : non seulement enfermer, mais humilier et briser les espoirs et les corps.
À Rennes, le CRA déjà existant prend la même tournure que celui de Lyon. Actuellement en travaux pour être agrandi, sa modification prend encore plus la forme d’une prison. (...)
À cette atteinte à la liberté, s’ajoutent les violences policières que subissent les personnes enfermées en CRA. Des témoignages toujours plus nombreux racontent l’horreur qu’elles ont vécu.
En février, une grève de la faim a eu lieu au centre de Vincennes pour dénoncer les violations des droits de l’Homme, la violence policière permanente, l’aveuglement de la justice et le racisme subi. Mais aussi le harcèlement quotidien par les policiers même en pleine nuit par des fouilles incessantes.
Le gouvernement d’extrême droite prévoit 11 nouveaux CRA, et il vient de voter sa nouvelle loi sur l’immigration, qui ne vont faire qu’empirer la situation des étranger.ères. Encore plus d’enfermements arbitraires et injustifiés dans des conditions indignes où le racisme et la violence de l’État règnent.
À Nantes, des collectifs s’organisent pour empêcher la construction de cette nouvelle prison. Le collectif ANTI-CRA 44 organise des rassemblements chaque premier samedi du mois à Miroir d’eau à 14h.
Une coordination pour s’opposer à la construction du CRA en Loire-Atlantique appelée COLÈRE NANTES (Coordination opposée à l’enfermement et à la répression des étranger.e.s) s’est également créée afin de lutter contre ce projet. Une mobilisation est prévue le 13 avril, place Royale. Il faut faire vite : le permis de construire sera déposé en 2025, et la « livraison » du centre est prévue pour 2026. (...)
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En octobre 2022, le ministère de l’Intérieur annonçait sa volonté de construire un centre de rétention administrative dans le département de Loire-Atlantique. Des organisations associatives, syndicales et politiques se sont réunies pour s’y opposer. Ainsi est né le collectif "Colère", de plus en plus actif sur Nantes, il entend sensibiliser la population et empêcher l’ouverture d’un tel établissement sur la métropole. (...)
le sujet n’est que très peu évoqué. Mais une date semble être fixée, ce sera pour fin 2026, début 2027. Sans doute à proximité de la maison d’arrêt de Carquefou. "Sur un terrain foncier de L’État, l’infrastructure disposera de 140 places", a confirmé ce vendredi 5 avril Fabrice Rigoulet-Roze, préfet de Loire-Atlantique, invité du conseil municipal de Nantes. Interrogée par son opposition, la maire de Nantes, elle, n’a pas pipé mot.
"Des structures inhumaines et indignes"
Le 12 octobre 2023, les groupes de la majorité municipale avaient publié un communiqué commun. pour demander l’abandon du projet d’installation d’un CRA. (...)
Une lettre ouverte à la maire de Nantes
En mars dernier, organisations associatives, syndicales et politiques se regroupent en collectif, "Colère" (Coordination Opposée à l’Enfermement et à la Répression des Étranger.e.s), le nom en dit long.
Ses membres ont adressé un courrier à Johanna Rolland, pour mettre les choses au clair et solliciter un rendez-vous. (...)
La France condamnée à onze reprises
À onze reprises déjà, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour l’enfermement d’enfants dans les CRA, dont des nourrissons.
De plus, les conditions d’enfermement sont largement décriées, "nourriture insuffisante, locaux insalubres et mal entretenus, impossibilité de mettre en place des mesures de distanciation lors de la pandémie de Covid", la liste des dysfonctionnements est longue.
D’ici à 2027, le ministère de l’Intérieur souhaite doubler la capacité des centres de rétention administrative en France pour atteindre 3 000 places. Pour cela, la construction de CRA a été annoncée à Dijon, Oissel, Béziers, Aix-en-Provence, Goussainville, Nice, Olivet, Mérignac, Mayotte et Dunkerque.
« Ce projet s’inscrit dans une stratégie politique qui surfe sur un climat sécuritaire et xénophobe croissant, déjà affirmé par la promulgation de la loi immigration. »
Collectif "Colère" (...)
Le collectif "Colère", annonce une "action de sensibilisation" le samedi 13 avril prochain, place Royale ainsi qu’une " journée festive" le samedi 27 avril aux ateliers de Bitche. "Il faut présenter les phénomènes migratoires tels qu’ils sont" et expliquer que les migrants ne sont pas des délinquants. (...)
«
Il faut se battre sur chaque centimètre de perte de liberté »
Maxime bénévole à la Cimade Bretagne/Pays de la Loire
"La montagne est haute", consent le bénévole. "On prend la mesure chaque jour de la montée des idées d’extrême droite, mais on se dit qu’une majorité de la population est mal informée. Il suffit peut-être de parler plus fort, parler plus, parler mieux". C’est toute la raison d’être du collectif "Colère".