
Le parquet fédéral belge a requis le renvoi devant le tribunal correctionnel de Bruxelles de l’ancien diplomate belge Etienne Davignon, dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de Patrice Lumumba. La chambre du conseil doit désormais donner son aval à un procès.
Soixante-cinq ans après l’assassinat de Patrice Lumumba, héros de l’indépendance congolaise, le parquet fédéral belge souhaite qu’un procès puisse enfin se tenir, peut-être en 2026, dans l’enquête pour "crimes de guerre" ouverte en Belgique, l’ancienne puissance coloniale.
Dans ce dossier historique, aux responsabilités jamais clairement élucidées, le parquet a annoncé mardi 17 juin avoir requis le renvoi devant le tribunal correctionnel de Bruxelles de l’ancien diplomate belge Etienne Davignon, 92 ans.
Le renvoi en procès est demandé notamment pour "détention et transfert illicite" de Lumumba au moment où il avait été fait prisonnier, et pour "traitements humiliants et dégradants", a précisé à l’AFP une porte-parole du parquet, Ann Lukowiak.
L’intention de tuer n’a pas été retenue, le non-lieu est demandé sur cet aspect, a-t-elle souligné.
Etienne Davignon, seule personnalité ciblée dans la plainte encore en vie
Premier ministre de l’ancien Congo belge devenu indépendant le 30 juin 1960, Patrice Lumumba a été renversé dès la mi-septembre 1960 par un coup d’État.
Il a été exécuté le 17 janvier 1961 avec deux frères d’armes par des séparatistes de la région du Katanga (sud), avec l’appui de mercenaires belges. Il avait 35 ans. Son corps, dissous dans l’acide, n’a jamais été retrouvé.
En 2011, au nom des enfants, le fils aîné François Lumumba avait déposé plainte avec constitution de partie civile à Bruxelles, accusant diverses administrations belges d’avoir pris part à "un vaste complot en vue de l’élimination politique et physique" du dirigeant congolais. (...)
Après le réquisitoire, il reviendra à une juridiction d’instruction, la chambre du conseil, de décider la tenue d’un procès. Une audience de plaidoiries, permettant notamment à la défense de faire valoir ses arguments, a été fixée au 20 janvier 2026. (...)
Etienne Davignon, entré en 1959 aux Affaires étrangères, avait assisté comme observateur à la table ronde réunissant dirigeants belges et congolais à Bruxelles début 1960, un événement qu’il avait décrit plus tard comme "un tournant décisif" dans sa carrière. (...)
Pour Christophe Marchand, avocat des enfants Lumumba, joint par l’AFP, "il a eu connaissance du projet d’élimination (de l’ex-Premier ministre), et il y a participé de manière active malgré ce qu’il dit".
Après la diplomatie, Etienne Davignon fut notamment vice-président de la Commission européenne de 1981 à 1985, chargé de l’industrie, à une époque marquée par le déclin de la sidérurgie européenne. Il a aussi eu une carrière d’homme d’affaires, ex-patron de la holding Société générale de Belgique..