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« Collabo ! », « Folle ! », « Va manger des graines ! » : un an d’invectives du député RN Laurent Jacobelli à l’Assemblée
#AssembleeNationale #RN #invectives #laurentJacobelli
Article mis en ligne le 14 novembre 2025
dernière modification le 10 novembre 2025

Mediapart a analysé les interventions dans l’hémicycle du porte-parole du Rassemblement national au cours des douze derniers mois. L’immense majorité sont des interruptions d’autres parlementaires et des invectives, souvent sexistes, loin de l’image de respectabilité que le parti d’extrême droite revendique.

Jeudi 30 octobre, vers 22 h 15, la députée écologiste Sandrine Rousseau prend la parole dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. La journée est consacrée à la niche parlementaire du Rassemblement national (RN), qui a la main sur l’ordre du jour. Au cours de sa seule prise de parole, qui dure cinq minutes, l’élue est interrompue au moins à seize reprises par des cris venant des bancs de l’extrême droite.

Parmi les député·es RN particulièrement remuant·es, un homme sort du lot. Installé au quatrième rang, en bas de l’hémicycle, Laurent Jacobelli s’agite, claque des mains, rit aux éclats en prenant l’oratrice à partie. Il l’interrompt à onze reprises à lui tout seul. « Venez, on va se faire un barbecue à la place », lance-t-il dès l’arrivée de Sandrine Rousseau à la tribune, avant de véhiculer, plusieurs fois et de plusieurs manières, le préjugé sexiste de la folie.

« Un docteur ! Y a-t-il un docteur dans la salle ? », « Manger des graines, ça rend dingue ! », « Laissez-la, elle a le syndrome de Gilles de La Tourette ! », « Sandrine, prends un cachet ! Sandrine, tu vas craquer ! », « Un cachet et au lit ! », « Pin-pon ! Pin-pon ! Pin-pon ! », « Elle est complètement dingue ! », crie successivement celui qui est à la fois vice-président du groupe RN à l’Assemblée et porte-parole du parti. (...)

Ses déclarations en témoignent : Laurent Jacobelli a ses marottes. Le député n’aime vraiment pas les écologistes, et consacre donc une partie de ses interventions à apostropher les député·es du parti lorsqu’ils ou le plus souvent elles s’expriment. Le 18 juin, il invective ainsi à de nombreuses reprises Cyrielle Chatelain, la présidente du groupe écologiste. « Arrête de manger des graines ! », lui lance-t-il, avant de répéter « Allez, mange tes graines ! », entre deux invitations à « faire un barbecue » et à « arrêter les steaks de soja ». « Monsieur le président, il faut l’arrêter ! Elle est complètement folle ! », lance-t-il aussi à l’adresse de Roland Lescure, qui dirige la séance.

Deux jours plus tôt, il interrompait déjà Cyrielle Chatelain en criant « C’est du quinoa-fascisme ! » ou encore « Elle va finir par dire que la Terre est plate ! ». Tout comme le 30 avril. Ce jour-là, le député de Moselle apostrophe la patronne des député·es écologistes à maintes reprises lorsqu’elle défend des amendements, l’accusant d’avoir « des bouffées délirantes », avant de l’inviter, comble de l’ironie, à « surveiller son langage » car « on est à l’Assemblée nationale ici, pas dans une ZAD ».

« Laurent Jacobelli est toujours comme ça », déplore Cyrielle Chatelain auprès de Mediapart. (...)

« À chaque fois, ils utilisent l’argument que je suis folle pour ne pas entrer dans le débat, ils utilisent la misogynie, les invectives sexistes pour tenter de faire taire », regrette également Sandrine Rousseau.

Le groupe écologiste a demandé que le bureau de l’Assemblée prenne des sanctions contre Laurent Jacobelli pour ses propos contre Sandrine Rousseau lors de la niche parlementaire. « Il y a eu des sanctions pour racisme dans l’hémicycle, et c’est très bien, mais il n’y a eu aucune sanction pour sexisme, alors qu’il est omniprésent », dénonce la députée. (...)

Non content d’avoir successivement traité Manuel Bompard (LFI) de « fragile », Benjamin Lucas-Lundy (Génération·s) de « médiocre », Jean-Paul Lecoq (Parti communiste – PCF) de « collabo » et Nicolas Sansu (PCF) de « fasciste », il s’en est plusieurs fois pris aux élu·es communistes présent·es dans l’hémicycle. Une habitude pour celui qui convoque alternativement « le goulag », les supposés « 100 millions de morts du communisme » et appelle ses opposant·es à « retourner en URSS ».

Comme ses autres collègues d’extrême droite, Laurent Jacobelli accuse aussi régulièrement les parlementaires de gauche d’être « alliés du Hamas » ou « porte-parole du Hamas ». (...)

Le député de Moselle ne limite pas ses insultes à l’enceinte de l’Assemblée nationale : le 2 septembre, il a été condamné pour diffamation et outrage, après avoir traité de « racaille » son collègue macroniste Belkhir Belhaddad – qui siège désormais chez les socialistes – en octobre 2023. A-t-il également fait l’objet d’un recadrage au sein de son groupe ou de son parti ? Questionné par Mediapart, le secrétaire général du groupe n’a pas répondu. (...)