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Conflit israélo-palestinien : calomnies médiatiques contre LFI ou « La Formation infréquentable »
#Israel #Hamas #Palestine #medias #LFI
Article mis en ligne le 30 octobre 2023
dernière modification le 29 octobre 2023

Depuis le 7 octobre, la couverture médiatique des événements en Israël et en Palestine est massive. Nous l’avons étudiée dans un premier article au prisme de « l’information internationale ». Mais en parallèle, le journalisme politique s’est largement focalisé sur des controverses politico-médiatiques. Les médias dominants, qui relaient complaisamment les campagnes menées par ceux qui dominent le champ politique, sont passés tel un rouleau-compresseur sur La France insoumise, contre laquelle tout semble désormais permis. Ses positions, « résumées », déformées, conspuées, lui ont valu une double condamnation, pour complicité de barbarie et antisémitisme nazi.

Dans les heures qui suivent les massacres du Hamas contre des civils israéliens, les premières réactions de Jean-Luc Mélenchon (ici) et des députés LFI (là) font l’objet d’attaques d’une partie du champ politique, que les éditorialistes reprennent à leur compte au point d’occuper la Une de « l’actualité ». (...)

Une condamnation pas assez marquée des crimes du Hamas, la volonté de les inscrire dans un contexte historique ou des réticences à qualifier l’organisation de « terroriste » : autant de fautes impardonnables – du moins si c’est l’occasion de dézinguer La France insoumise.

Pour clarifier les premières prises de position de leur parti, Mathilde Panot (présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale) et Manuel Bompard (coordinateur de LFI) s’expriment donc à plusieurs reprises face aux journalistes. Invité dès le lundi matin sur France 2 dans « Télématin » (9/10), ce dernier fait part de sa « condamnation totale » des attaques du Hamas, les qualifiant de « crimes de guerre », répétant son « indignation » face à ces actes. Mais les réponses que lui intime de donner Thomas Sotto ne viennent pas. Tandis que Bompard évoque la solution à deux États, « une solution qui permet aux Israéliens de vivre en sécurité et en liberté, aux Palestiniens de vivre en sécurité et en liberté », le présentateur clôt l’interview par un procès d’intention : « La position "oui, mais" ». La réaction de Manuel Bompard est immédiate : « Je ne vous permets pas, à la fin de l’interview comme ça, de résumer ma position en mettant les sous-titres que vous avez envie. Ma position, elle est très claire, je n’ai jamais dit "oui, mais". »

Qu’on les approuve ou non, les positions de La France insoumise sont discutables, au sens où elles peuvent être discutées. Outre-Manche par exemple, la BBC explique pourquoi elle se refuse à qualifier le Hamas de « terroriste ». (...)

Et quoi qu’il en soit, ces choix ne supposent aucune complaisance envers les massacres commis par le Hamas le 7 octobre.

Du strict point de vue du journalisme politique, les dissensions qui se sont exprimées au sein de la Nupes sur cette question pouvaient légitimement être traitées. Mais force est de constater que les dispositifs et le climat médiatique ambiant – où le pluralisme est méthodiquement étouffé et où chercher à comprendre est assimilé à une tentative de justifier – auront structurellement mutilé ce « débat » : loin de voir ses positions discutées, La France insoumise, clouée au pilori, a été sévèrement et unanimement condamnée, sans procès. Mais avec des chefs d’accusation, et des procureurs dont les sentences, relues à froid, sont pour le moins délirantes. (...)

C’est Le Monde qui le dit, Mélenchon est « le problème de toute la gauche ». Et dans son éditorial, le quotidien pose la question : « Que cherche Jean-Luc Mélenchon ? » Avant de suggérer les réponses : « À encourager l’antisémitisme ? À cautionner le terrorisme islamiste ? » (12/10), résumant ainsi le second réquisitoire médiatique. (...)

En quête de preuves établissant l’antisémitisme de Mélenchon, le philosophe de télévision Michel Onfray assène : « Tout le monde le dit sur les plateaux de télévision ! » (BFM-TV, 19/10)

Et pas seulement sur les plateaux : la plupart des hebdomadaires des 11 et 12 octobre se joignent au concert. (...)

Les imputations d’antisémitisme contre La France insoumise permettent ainsi à certains commentateurs de comparer « extrême gauche et extrême droite », généralement au bénéfice de la seconde (au moins de sa banalisation)... quand elle n’est pas tout simplement félicitée : « Marine Le Pen ne dit rien qui fâche depuis des mois » lance par exemple Caroline Fourest sur France 5 (11/10), nullement fâchée, à l’évidence, des prises de position du RN autour du projet de loi immigration ou lors des événements à Lampedusa. Avant d’ajouter cette ignominie : « Comme Marine Le Pen est impeccable, on n’a pas prise, nous, journalistes, pour parler de cette extrême droite antisémite. Alors que comme Mélenchon dérape et que Mathilde Panot bredouille, on a plus de facilité à parler de l’extrême gauche antisémite. Mais encore une fois, les deux se rejoignent sur les juifs. »

Et de l’antisémitisme au nazisme, il n’y a qu’un pas que le chroniqueur Yann Moix, jadis auteur de textes antisémites, n’hésite pas à franchir dans « Touche pas à mon poste » (C8, 10/10) (...)

Les tentatives de disqualification de la gauche en général, et de LFI en particulier, ne sont pas inédites, mais elles se réactivent de façon aigüe en temps de crise, libérant calomnies et mensonges. Cette fois, ce sont les analyses et les choix sémantiques de LFI sur le conflit israélo-palestinien qui ont été ciblés. Profiter de l’abomination des exactions commises par le Hamas en Israël – que l’on appelle « crimes de guerre » ou « actes terroristes » et que tout le monde s’accorde à condamner – pour intenter des procès en antisémitisme relève d’un procédé politique misérable et d’une malhonnêteté intellectuelle qui ne pourront que renforcer, si besoin en était, la défiance à l’égard des grands médias. (...)