
La 28e conférence des Nations Unies sur le changement climatique est censée inciter les pays à passer la vitesse supérieure sur la transition énergétique. Alors qu’entend-on par « mesures efficaces » et comment les appliquer ? Explications.
C’est la base de la transition énergétique et climatique : utiliser plus efficacement l’énergie dont nous disposons. Et pourtant ce levier est encore trop négligé, estiment les experts, avant l’appel qui devrait être lancé samedi à la COP28 pour doubler le rythme des mesures d’« efficacité » d’ici 2030 de 2% à 4%.
« Efficacité énergétique » : de quoi s’agit-il ?
C’est consommer « moins d’énergie pour un même service rendu par un appareil ou une technologie », explique-t-on chez Enerdata, bureau d’études spécialisé dans l’énergie. A ne pas confondre avec la sobriété, liée à des changements de comportement (par exemple baisser son chauffage à 19°C).
« Plus nous consommerons notre énergie de manière efficace et moins il nous faudra investir en panneaux solaires, en nucléaire ou en réseaux »
Brian Motherway, expert à l’Agence internationale de l’énergie (AIE) (...)
Pour l’Agence internationale de l’énergie (AIE), gagner en efficacité énergétique permettrait de parcourir la moitié du chemin vers la neutralité carbone en 2050 : c’est la première brique de la transition, le « first fuel » (premier carburant).
« Souvent les gouvernements n’y accordent pas assez d’importance », dit à l’AFP Brian Motherway, l’expert du sujet à l’AIE. Or, elle sera essentielle pendant cette cruciale décennie en cours : « plus nous consommerons notre énergie de manière efficace et moins il nous faudra investir en panneaux solaires, en nucléaire ou en réseaux ». (...)
A la COP28, « il faut que les gouvernements s’accordent pour doubler les progrès dans l’efficacité d’ici 2030, pour passer de +2% par an à +4% », dit le directeur de l’AIE, Fatih Birol, évoquant « un signal » nécessaire pour les marchés, les investisseurs, les industriels... L’enjeu est économique, et climatique : doubler c’est éviter 7 milliards de tonnes de CO2, l’équivalent des émissions actuelles du transport. (...)
Où sont les marges de progrès ?
« Partout ! » répondent les spécialistes. Les bâtiments tertiaires représentent par exemple en France un tiers de la consommation électrique en hiver. Selon RTE, gestionnaire du réseau à haute tension, ils pourraient « faire 20% d’économies sans d’énormes efforts », avec « un peu de prise de conscience et de la gestion technique ».
Autre exemple, doter tous les éclairages d’ampoules LED aux Etats-Unis permettrait d’économiser l’énergie nécessaire à alimenter 3 millions de véhicules électriques par an, ou à chauffer 2,6 millions de foyers équipés de pompe à chaleur, selon l’AIE. (...)
La climatisation est un autre enjeu. « D’ici 2050, 10 climatiseurs seront achetés chaque seconde. Mais le climatiseur moyen acheté aujourd’hui est littéralement deux fois moins efficace que le meilleur » disponible, note Brian Motherway. (...)
Dans le bâtiment, « digitalisation » et « domotique » permettent d’économiser 30% d’énergie, dit-il, notamment parce que l’utilisateur suit de près sa consommation et est « responsabilisé ». Idem quand la production est plus décentralisée, ajoute-t-il : « en Europe, si on équipait tous les toits équipables en solaire, on pourrait diminuer l’impact sur les besoins électriques de 20% ».
L’enjeu de l’efficacité est particulièrement fort dans les pays émergents et en développement, qui accueilleront l’essentiel de la croissance démographique attendue. (...)