
En France, pays de l’atome roi, tout débat public à propos de l’industrie nucléaire civile et militaire est oblitéré par le « fait du prince ». Pour y résister il faut dénoncer ses mensonges. Parmi ceux-ci, il y a « la compétitivité du nucléaire ».
Françatomique et dégâts publics
En 1974, après le premier « choc-pétrolier », le premier ministre Pierre Messmer confirmait le lancement d’un programme de construction de 200 réacteurs nucléaires à horizon 2000. Ils devaient nous affranchir de la dépendance au pétrole et assurer l’indépendance énergétique de la France, dont la consommation électrique était supposée doubler tous les dix ans. EDF était alors en situation de quasi-monopole pour la production, le transport, la distribution et la commercialisation d’électricité en France, qu’il s’agissait de nucléariser en moins de 25 ans. Ce fut fait à l’aide de technologies états-uniennes (après quelques tergiversations c’est la technologie et la licence Westinghouse qui avaient été retenues). Mais 59 réacteurs, au lieu des 200 prévus, furent construits durant cette période (parmi ceux-ci, le seul de technologie française, Superphénix, fut arrêté 13 ans après sa mise en service suite à de nombreux incidents techniques). (...)
Résistance à la Françatomique et débat public
Du 28 janvier au 15 mai 2025, un débat public est prévu sur le projet d’EDF de construire une paire d’EPR au Bugey. Il sera organisé à la demande d’EDF par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP).
Plusieurs organisations de la région opposées au projet, mais aussi à la poursuite de l’exploitation des réacteurs nucléaires du Bugey qui ont dépassé l’âge canonique, ont participé depuis plus de 10 ans aux enquêtes publiques, débats publics, concertations en tous genres, sans être entendues jusqu’à présent. Elles ont publié des études, des lettres ouvertes, des « cahiers d’acteurs » et organisé de nombreuses réunions publiques pour faire connaître leurs analyses. Des groupes d’élus ont également manifesté leur opposition au projet d’EPR sur le site du Bugey.
Ils ont besoin d’être soutenus pour éviter que notre pays s’enfonce dans la dette et qu’à la catastrophe économique s’ajoute une nouvelle catastrophe nucléaire. (...)
La production d’électricité nucléaire, dont le coût prétendument bas devait garantir un prix bas pour les consommateurs français, a conduit à une réduction de l’indépendance énergétique et à une augmentation de la dette publique. Tandis que la grande majorité des français en subit les déficits, c’est une petite minorité qui profite de la « manne nucléaire ».
Ce sont les mêmes qui veulent la construction de nouveaux réacteurs, quel qu’en soit le coût pour les finances publiques et pour les consommateurs d’électricité. Ce sont aussi les mêmes qui voudraient les financer par un prêt à taux zéro de l’Etat à EDF, c’est-à-dire par une aggravation de la dette publique. Ils voudraient aussi utiliser l’argent des livrets A.
Personne n’en connaît d’ailleurs les coûts. Comme l’a relevé la Cour des comptes, dans son rapport de suites qui vient d’être publié, « la rentabilité prévisionnelle du programme EPR2 reste, à ce stade, inconnue, d’autant que les conditions de financement de ce programme ne sont toujours pas arrêtées ».
Dans ces conditions le débat public sur le projet d’EDF est prématuré voire même inutile car, selon la Cour des comptes, « L’accumulation de risques et de contraintes pourrait conduire à un échec du programme EPR2 ». (...)