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Dépenses militaires : les actionnaires se gavent, les salariés font grève
#depensesmilitaires #Thales #Merignac
Article mis en ligne le 25 avril 2025
dernière modification le 23 avril 2025

Dans un silence médiatique assourdissant, les salariés de Thales sur le site de Mérignac (Gironde) sont en grève depuis plus d’un mois. La production des radars RBE 2 qui équiperont les futurs Rafale est paralysée. La raison ? Malgré des résultats historiques et des dividendes record d’un milliard d’euros, les augmentations salariales proposées par la direction rattrapent à peine l’inflation. Un mouvement social qui touche aussi bien les techniciens et les ouvriers que les ingénieurs : tous s’indignent d’un partage des richesses inique.

C’était le 5 mars dernier. Emmanuel Macron, l’air grave et le ton solennel, alertait les Français sur les menaces que fait peser la Russie sur la sécurité européenne et la nécessité de réarmer la France et l’Europe, préparant à mots couverts les esprits à une nouvelle austérité budgétaire. (...)

Traduction : pour financer ces dépenses d’armement supplémentaires, il faudra rogner sur d’autres budgets.

Le lendemain, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, enfonçait le clou, chiffres à l’appui (...)

Au même moment, sur le site de Thales à Mérignac, près de Bordeaux, où sont produits les radars RBE 2 qui équiperont les futurs Rafale produits par Dassault ?, cela fait déjà huit semaines que les salariés – 2 200 sur le site - sont mobilisés pour la revalorisation de leurs salaires. La direction leur propose en moyenne 2 % d’augmentation, à peine le rattrapage de l’inflation, un peu moins pour les cadres.

Plus d’un mois de grève

Inacceptable pour les syndicats au regard de l’excellente santé financière de l’entreprise : un carnet de commandes archi-plein, des bénéfices record de 2,4 milliards d’euros et 1 milliard d’euros reversés en dividendes (près de 10 % de plus que l’an dernier), et un cours de l’action qui a doublé depuis le début de l’année. Rémy Crouzat, délégué CFDT, dénonce un partage inéquitable de la richesse : « Ce qu’on propose aux salariés, c’est 25 millions d’euros en tout, par rapport au milliard distribués aux actionnaires », s’indigne-t-il. Un rapport de 1 à 40. (...)

Les salariés réclament leur part du gâteau et se mobilisent début janvier. Mais la direction fait la sourde oreille et le 19 mars, les salariés se mettent en grève. « Nous avons cherché la concertation et fait appel au sens du dialogue de l’entreprise, mas celle-ci n’a rien voulu entendre, et nous avons été obligés de durcir le mouvement », regrette Rémi Crouzat. (...)

Ouvriers, techniciens et même des cadres ont rejoint le mouvement de grève. (...)

Ce qui a également mis le personnel en rogne, ce sont les avantages accordés à une poignée de cadres dirigeants, via une distribution d’actions gratuites en 2020, revendables cette année, ce qui, au vu de l’évolution du cours du titre Thales, a permis aux plus chanceux d’engranger jusqu’à un million d’euros. (...)

Un manque d’investissement et de formation

Au-delà de leurs rémunérations, les salariés s’inquiètent aussi du manque de moyens accordés aux investissements, au regard des dividendes généreusement distribués. (...)

 : « Depuis plusieurs mois, nous sommes à flux tendus pour produire de quoi équiper quatre Rafale par mois. Et là, à cause de ce blocage, on a perdu un mois de production. Ce retard, il faudra au minimum plusieurs années pour le rattraper. Et on a l’impression que notre direction s’en fout complètement, elle reste inflexible, ne vient même pas nous parler. Il faut que l’armée française le sache : la conséquence de l’intransigeance de la direction, c’est qu’elle aura moins de Rafale que prévu. Mais ça n’empêche pas nos patrons de dormir. »

L’homme est amer. Diplômé d’une grande école d’ingénieur, à l’image de la plupart des cadres, David n’est pas, loin s’en faut un gréviste professionnel (...)

« On veut juste avoir une gratification à la hauteur de nos efforts et de notre savoir-faire. Mais dès qu’on réclame un tout petit quelque chose, la réponse c’est : si tu n’es pas content, va chercher du boulot ailleurs. » Du chantage à ’emploi, estime Rémy Crouzat. (...)

À long terme, Emmanuel Macron prévoit de doubler le budget de la défense, tout en réduisant le déficit budgétaire et la dette. Une quadrature du cercle qui implique nécessairement une drastique austérité douloureuse pour les ménages français. Pas sûr que ces derniers fassent contre mauvaise fortune bon cœur, s’ils s’aperçoivent que leurs efforts servent essentiellement à enrichir les actionnaires. (...)

*Les salariés de Thales ont mis en place une caisse de grève, ici : https://www.cotizup.com/greve-thales-merignac?sm=1