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Emplois vacants, chômeurs passifs : les faux arguments de Gabriel Attal pour réduire les droits
#Chomage #Macron #Attal #inegalites #emploi
Article mis en ligne le 7 avril 2024
dernière modification le 6 avril 2024

Les gouvernements Macron ne chôment pas pour affaiblir les protections sociales. Une nouvelle réforme de l’assurance-chômage, la 4e en cinq ans, se prépare. Avec toujours les mêmes faux arguments, que vous décryptent Basta ! et Rapports de force.

(...) Le Premier ministre a trouvé un nouveau prétexte pour justifier une baisse des droits des demandeurs d’emploi : le redressement des comptes publics, après l’annonce mardi dernier par l’Insee d’un dérapage du déficit budgétaire de près de 16 milliards d’euros. (...)

Cette fois, ce n’est plus le bobard mainte fois répété d’un chômage qui payerait plus que le travail. Dorénavant, le storytelling consiste à affirmer que pour atteindre le plein emploi, c’est-à-dire un taux de chômage inférieur à 5 %, il faudrait encore durcir les règles de l’assurance chômage pour « inciter à la reprise d’emploi ». Plus de personnes en emploi, ce sont plus d’impôts et de cotisations qui gonfleront les recettes de l’État et réduiront le déficit.

Cette démonstration est fallacieuse, mais s’appuie cependant sur un bout de vérité. En effet, plus de personnes en emploi est bien synonyme de recettes fiscales et sociales supplémentaires. Mais faut-il encore que des emplois soient disponibles en nombre suffisant. Et c’est là que le raisonnement de Gabriel Attal commence à prendre l’eau. (...)

Le discours sur l’incitation à la reprise d’emploi par la réduction des indemnités chômage se fracasse sur une réalité : l’absence d’emplois disponibles en nombre suffisant pour permettre aux chômeurs de trouver du travail (...)

Pire, cette détérioration de la situation économique devrait gonfler le nombre de demandeurs d’emploi. Selon les prévisions macroéconomiques de la Banque de France datées de septembre 2023, « le taux de chômage, qui s’est élevé à 7,2 % au deuxième trimestre 2023, augmenterait progressivement pour atteindre 7,8 % fin 2025 ». Ce contexte économique morose est sans liens avec les comportements supposés de demandeurs d’emploi qui bouderaient le travail (...)

« On n’a pas de preuve que cela marche ou ne marche pas. On peut admettre que cela va mettre des personnes en emploi qui ne l’auraient pas été, mais ce qui est sûr c’est que ça ne marchera pas pour tout le monde. Les personnes qui n’ont pas de solutions vont se retrouver appauvries », expliquait Michael Zemmour à Rapports de force le mois dernier. (...)

’un allongement de la durée d’indemnisation fait reculer la reprise d’emploi, mais dans des proportions très modestes. La reprise d’emploi pour cause d’indemnisation plus courte se fait, elle, très largement dans des emplois dégradés et précaires, qui renverront ensuite les personnes au chômage. Même dans la majorité présidentielle, la pilule ne passe pas pour tout le monde. Ainsi, Sacha Houlié, le président de la commission des lois à l’Assemblée nationale et député Renaissance de la Vienne estimait ce week-end sur le plateau du Grand jury RTL, qu’une réduction des droits relevait « plutôt d’une mesure d’économie que d’une mesure de retour à l’emploi ». (...)

huit fois plus de chômeurs en catégorie A que d’emplois dits vacants. Et si on ne retient que les emplois réellement disponibles, on compte un poste pour seize chômeurs et chômeuses.
Les vrais freins à l’emploi : accès au logement et bas salaires

Il est donc mathématiquement évident que le comblement des emplois vacants ne résoudra pas la question du chômage. (...)

« Les difficultés de recrutement viennent d’abord d’un déficit de compétences liées aux besoins des entreprises, mais aussi des conditions de travail proposées. Ce sont les sujets des bas salaires, des horaires décalés, des contrats courts, de l’accès difficile au transport et au logement qui sont à l’origine des difficultés de recrutement », analysait la CFDT au moment de l’annonce, en novembre 2022, de la réforme visant la durée d’indemnisation, qui déjà utilisait l’argument d’emplois vacants trop nombreux. Cette analyse des causes des difficultés de recrutement est corroborée par une étude du service statistique du ministère du Travail(Dares). (...)

La tension sur le marché du travail a alors pour cause tout autre chose qu’une trop grande passivité des demandeurs d’emploi. Première cause dans plusieurs secteurs d’activité : l’intensité des embauches et un déficit de main-d’œuvre disponible. Le tout assorti d’enjeux de formation, notamment chez les ouvriers qualifiés et techniciens de l’industrie, les métiers du soin ou encore ceux des télécommunications et de l’informatique. À cela s’ajoutent des freins géographiques d’adéquation entre les aires d’emploi et la répartition territoriale de la main-d’œuvre. Avec comme conséquence des enjeux de logement ou de transport qui limitent la reprise d’emploi. (...)

En plus de tous ces freins, celui de la qualité des emplois proposés n’est pas négligeable. (...)

« Être payé au Smic dans les stations balnéaires, alors que cela coûte un Smic de se loger, évidemment des gens n’y vont pas ! » rappelle comme une évidence Denis Gravouil, le négociateur CGT pour le dossier de l’assurance chômage.

Avec l’hypothèse exprimée par Gabriel Attal de réduire à douze mois la durée d’indemnisation, l’exécutif poussera les chômeurs à accepter n’importe quel travail, aussi dégradé soit-il. Mais c’est peut-être l’objectif, en plus de celui de faire des économies budgétaires. Et celles et ceux qui, nombreux, ne décrocheront pas d’emplois dits vacants risquent de sombrer dans la pauvreté.