Le ministre allemand de l’Intérieur Alexander Dobrindt compte sévir davantage contre ce qu’il qualifie d’"abus" du droit d’asile en Allemagne.
Le ministre allemand de l’Intérieur, Alexander Dobrindt, membre du parti conservateur CSU, estime dans une interview accordée à la Deutsche Welle ne pas avoir déçu sur sa promesse de conduire une politique migratoire plus stricte.
"Ma ligne est très dure, et c’est exactement ainsi qu’elle est perçue", observe-t-il, ajoutant que "dès le premier jour, nous avons pris les décisions nécessaires pour garantir le renforcement des contrôles aux frontières, le refoulement des personnes et la suspension des regroupements familiaux".
Alexander Dobrindt considère que la baisse de 60 % du nombre de premières demandes d’asile en Allemagne est "une preuve évidente que l’immigration clandestine est en net recul". (...)
L’immigration, thème privilégié de l’AfD
Jusqu’à présent, le parti d’extrême droite AfD n’a cessé de gagner du terrain dans les sondages, malgré ce qu’Alexander Dobrindt qualifie de revirement du gouvernement en matière de politique migratoire.
"Il y a un temps de décalage entre le moment où l’on comprend que la politique change de cap sur la migration et le moment où l’on en fait l’expérience émotionnelle dans son propre entourage", explique-t-il. (...)
Les experts en migration attribuent la baisse du nombre de demandeurs d’asile à des contrôles frontaliers allemands plus stricts. La fin de la guerre civile en Syrie et le renforcement des contrôles sur la route des Balkans entre la Grèce et l’Autriche ont également contribué à cette baisse, comme l’a expliqué Birgit Glorius, chercheuse en migration, au média public Tagesschau. (...)
Externalisation des procédures d’asile
"Nous avons un droit individuel à l’asile", a assuré le ministre dans l’interview. "Je ne remets pas cela en question, mais je remets en question son utilisation abusive." Et d’ajouter : "Nous devons lutter contre cela de toutes nos forces".
Alexander Dobrindt espère également davantage d’initiatives au niveau européen pour ralentir les flux migratoires et répartir les personnes migrantes parmi les pays de l’Union européenne (UE).
L’un des objectifs du pacte européen sur les migrations, qui doit être mis en oeuvre par les Etats membres au courant de l’année prochaine, est de rendre la répartition des réfugiés au sein de l’UE plus équitable, alors que la plupart des demandeurs d’asile arrivent en Europe par les pays du sud du continent.
L’Allemagne exhorte toutefois ces pays d’entrée à faire preuve de plus de cohérence dans le traitement des demandes d’asile et à ne pas autoriser les demandeurs à poursuivre leur voyage.
"Cependant, il est souvent difficile de renvoyer les personnes dans ces pays de première entrée, et cela doit être rendu possible", explique Alexander Dobrindt. (...)
En collaboration avec d’autres États membres de l’UE, le ministre de l’Intérieur ambitionne de trouver un pays partenaire en Afrique afin de mettre en place des "centres de retour". Il s’agit d’espaces vers lesquels les demandeurs d’asile déboutés peuvent être expulsés, même s’ils ne sont pas originaires de ce pays.
"Plusieurs pays discutent actuellement de la possibilité de s’engager ensemble dans cette voie et du choix du pays partenaire avec lequel ils le feraient", avance le ministre. "Mais nous aurons certainement besoin d’un pays partenaire sur le continent africain".
Les précédentes tentatives d’externalisation des procédures d’asile de l’Italie vers l’Albanie, pays non membre de l’UE, ont échoué, en partie à cause d’obstacles juridiques et de coûts élevés. Le gouvernement britannique a également suspendu ses tentatives d’expulsion des demandeurs d’asile vers le Rwanda.
Le sort des ressortissants afghans
Parmi les mesures phares de l’actuel gouvernement pour réduire l’immigration figure la fin du programme d’admission spécial pour les Afghans qui ont travaillé avec des organisations allemandes ou l’armée allemande présentes pendant deux décennies en Afghanistan dans le cadre d’une force internationale.
Le ministre promet que d’ici la fin de l’année, tous les ressortissants afghans bénéficiant d’un "engagement d’admission juridiquement contraignant" seront transférés en Allemagne. La plupart des près de 2 000 personnes actuellement éligibles sont bloquées au Pakistan. (...)
L’ancien gouvernement allemand avait promis de protéger les personnes qui ont travaillé pour l’Allemagne en Afghanistan ou qui risquaient d’être persécutées par les talibans. Alexander Dobrindt assure que les autorités allemandes examinent ces cas "conformément à la loi et à l’ordre public".
Ne pas interdire l’AfD, mais "la faire disparaître par la voie politique"
Enfin, dans cette interview à la Deutsche Welle, le ministre de l’Intérieur a rejeté la possibilité d’engager une procédure visant à interdire l’AfD, alors que le parti a été classé "mouvement extrémiste de droite" par les renseignements allemands pour son attitude hostile envers les migrants et les musulmans.
"J’ai toujours clairement indiqué qu’il incombait aux responsables politiques de faire disparaître l’AfD par la voie politique, et non de l’interdire", estime-t-il. (...)