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Le Parisien
Finances publiques : le rapport choc qui préconise de supprimer des agences de l’État
#Senat #financespubliques #servicespublics
Article mis en ligne le 12 juillet 2025
dernière modification le 11 juillet 2025

Anah, Ademe, ANCT, INERIS, Business France et autre Établissement public du Marais poitevin… Depuis plusieurs mois, leurs noms et surtout leurs nombres reviennent en boucle dans le débat public, symboles, dans la bouche de nombreux politiques, de gabegie d’argent public.

Un millier d’agences, organes ou opérateurs divers

En ces temps de disette budgétaire, les agences et opérateurs de l’État sont montrés du doigt. (...)

À l’initiative du président du groupe LR du Sénat, Mathieu Darnaud, une commission d’enquête parlementaire, consacrée aux missions de ces 434 opérateurs, 317 organismes consultatifs, 1 153 organismes publics nationaux, a été lancée il y a cinq mois. Sa rapporteuse, Christine Lavarde (LR) et son président (communiste) Pierre Barros présentent leurs conclusions, explosives et très attendues, ce jeudi matin.
Empilage et démultiplication

Inspiré du « new public management » des années 1990 (qui consistait à transposer les outils et modes de gestion du secteur privé vers celui du public), le recours aux agences visait souplesse et expertise. Mais au fil du temps, les structures aux statuts divers, aux périmètres flous, mal connues de l’administration elle-même, se sont empilées.

Résultat, selon les auteurs du rapport : l’État central n’a pas de vision consolidée de leurs finances ou de leurs effectifs. (...)

Afpa, Greta, ARS, Ademe, Anru…

Dès lors, la commission préconise plusieurs leviers de réforme : fusions d’agences aux compétences similaires, comme l’Afpa (l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes) et les groupements d’établissements publics locaux d’enseignement (Greta) pour la formation professionnelle ; des transferts de missions ; des suppressions d’organismes devenus « obsolètes » comme l’Agence bio…

Parmi les recommandations de la commission les plus marquantes : le transfert des missions des Agences régionales de santé (ARS) aux services déconcentrés de l’État aux niveaux régional et départemental. Mais aussi la dévitalisation de fait de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) en déléguant directement de l’État aux régions les crédits qui transitent actuellement par cette structure.
Les missions de l’Anru transférées aux préfectures

D’autres propositions ne manqueront sans doute pas de faire réagir : celle de ne pas renouveler l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (l’Anru, créée en 2003 par le ministre de la Ville de l’époque, Jean-Louis Borloo) une fois la mise en place du nouveau programme de renouvellement urbain fixé par l’État. Les rapporteurs suggèrent à la place de transférer progressivement la gestion de l’achèvement de ses programmes aux services des préfectures.

Il est aussi suggéré de supprimer l’Agence nationale du sport (ANS) en maintenant ses actions dans le ministère et l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep). Les crédits gérés par l’ANS seraient alors transférés vers les dotations attribuées aux collectivités territoriales. Autre suppression : celle de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) dont les effectifs actuels viendraient renforcer les services préfectoraux. (...)

Si tailler dans les charges de personnel et les dépenses de fonctionnement « peut laisser entrevoir des gisements conséquents d’économies » — (une « réduction de 8 % de ces coûts se traduisant par une économie de 2,2 milliards d’euros ») —, cela ne pourra pas se faire à missions constantes « dans la mesure où les missions peuvent rarement être réalisées sans personnel et sans moyens de fonctionnement », met en garde le rapport. En clair : sabrer dans le dur reviendrait à réduire considérablement l’utilité de nombreuses agences.
Coupes dans les RH ou dans la com’

Les membres de la commission d’enquête préfèrent mettre l’accent sur les fonctions support (ressources humaines, informatique, communication…). Une réduction de 20 % de leur coût, que la commission qualifie d’objectif déjà « très volontariste », apporterait une économie de l’ordre de 540 millions d’euros. « Loin évidemment d’être négligeable, une telle économie doit toutefois être mise en regard de l’objectif, fixé par le Gouvernement, de réaliser 40 milliards d’euros d’économies en 2026, dont la moitié au titre du budget de l’État », met en perspective le rapport.

D’ailleurs, rappelle-t-il, la ministre des comptes publics Amélie de Montchalin, qui a chiffré entre 2 et 3 milliards d’euros les économies pouvant résulter de la restructuration des agences, « n’a pas été en mesure de préciser à la commission d’enquête la façon dont ce calcul avait été réalisé », au moment de son audition. Comme un rappel au gouvernement qu’il ne pourra pas compter sur ce seul levier et qu’il devra se creuser la tête pour trouver d’autres pistes d’économies…

Lire aussi :

 (IFRAP)
Rapport de la commission d’enquête sur les opérateurs : on peut aller encore plus loin !

(...) Pour la Fondation iFRAP (auditionnée dans le cadre de cette enquête), le sujet mériterait au bas mot d’y consacrer une revue annuelle, si l’on voulait réussir à baisser les charges de personnel et les coûts de fonctionnement de 8%, soit une économie de 2,2 Md€. La commission met par ailleurs en évidence qu’une réduction de 20% des coûts des seules fonctions support « du reste, très volontariste pour des opérateurs ne faisant pas l’objet d’une fusion » pourrait dégager à elle seule une économie de près de 540 millions d’euros. Reste à voir quelle résonance le Gouvernement voudra bien donner aux pistes esquissées pour mettre en musique son propre programme de rationalisation des agences de l’État dont on rappelle les principaux attendus : 2 à 3 milliards d’économies à horizon 2027 et la suppression d’1/3 des opérateurs de l’État – les organismes de recherche et d’enseignement supérieur étant sanctuarisés. (...)

Des défauts de tutelle repérés, mais aucun chiffrage :

La commission d’enquête « a constaté, non sans surprise, l’absence de vision consolidée de la situation financière des agences, opérateurs et organismes consultatifs ». Un suivi comptable est assuré entité par entité par la Direction du budget et le CGEFI, mais « cette vision ne dit rien de l’activité réelle des établissements, ce qui réduit fortement la capacité de pilotage du pouvoir exécutif ou de contrôle du Parlement. » D’ailleurs « trop d’établissements sont dépourvus de contrat d’objectif et de performance (COP) ou de contrats d’objectifs et de moyens (COM) et l’envoi d’une lettre de mission au dirigeant n’est pas systématique. » Il n’y a donc pas de conception unifiée de l’exercice des tutelles au niveau de l’État. (...)

cette approche débouche sur un autre défaut : celui de missions qui n’ont pas de fin. La mise en place d’un établissement pour un besoin ponctuel, l’amène à concevoir la pérennisation de sa mission dans le temps et son évolution quand bien même le besoin initial aurait disparu (on peut voir les prémices de cette approche au travers de la Société du Grand Paris, devenue en décembre 2023, la Société des grands projets).

Cette absence de stratégie globale ou même sectorielle, quant au pilotage des agences, se retrouve malheureusement également au niveau du suivi du parcours des agents eux-mêmes par les ministères de tutelle. « L’administration a reconnu ne pas connaître la proportion de fonctionnaires effectuant une mobilité au sein d’une agence. » (...)

 (Challenges)
Un super secrétariat pour piloter toute la transition écologique : la proposition choc du Sénat qui impacterait l’Ademe et l’OFB

Alors que le gouvernement s’apprête à dévoiler sa feuille de route budgétaire pour 2026, la commission d’enquête du Sénat sur les agences et opérateurs de l’Etat a dévoilé ses recommandations ce jeudi. En ligne de mire notamment, la transition écologique que le Sénat propose de placer sous tutelle unique d’un super secrétariat général. Un scénario rejeté en bloc par Agnès Pannier-Runacher.

Ademe, OFB, ONF, Agence bio… A l’heure du déficit public et de la recherche d’économies à tout prix, les agences de l’Etat, et en particulier celles de la transition écologique, sont au cœur de la tempête. (...)

Un super secrétariat pour l’écologie

Principal problème identifié par les sénateurs : le manque de lisibilité des agences éclatées et dépendant de ministères différents qui vont de Météo France à l’Ademe en passant par l’office national de la biodiversité (OFB), l’office national des forêts (ONF), les agences de l’eau, le conservatoire du littoral, les parcs nationaux…

La transition écologique étant par nature transversale, ils plaident donc pour la création d’un super secrétariat pour tout chapeauter : le secrétariat général à la transition écologique (SGTE). Il rassemblerait le commissariat général au développement durable (CGDD, 603 équivalents temps plein), créé en 2008 pour regrouper les fonctions du ministère de l’Ecologie (l’observation, la statistique, la recherche, les études économiques, l’évaluation et l’intégration du développement durable), et le secrétariat général à la planification (SGPE), créé en 2022 pour coordonner les stratégies nationales en matière de climat, d’énergie, de biodiversité et d’économie circulaire. Une structure placée directement sous l’autorité du Premier ministre, mais en perte de vitesse depuis la dissolution, et le départ de son secrétaire général « historique » Antoine Peillon en début d’année. Les sénateurs soulignent en outre son manque de moyens, avec une trentaine d’agents et des « marges de manœuvre limitées ». « Le SGPE pour moi ne sert à rien, juste à planifier et remplir des tableaux. Il faut maintenant aller plus loin avec une administration qui agit », tranche Christine Lavarde.

Ce grand secrétariat général à la transition écologique récupérerait ainsi la tutelle et la gestion des fonctions support (paie, gestion, RH…) de tous les opérateurs et agences. Ce SGTE pourrait aussi se voir transférer une partie des équipes du ministère de la Transition écologique pour assurer la coordination entre Roquelaure et Matignon. Mais les sénateurs ne disent rien des moyens qui devraient lui être alloués face à l’ampleur des missions qui lui seraient confiées. Mais pour la rapporteuse, « les moyens seront à trouver dans les agences et les ministères ».

L’Ademe réduite à peau de chagrin ?

En conséquence, plusieurs agences perdraient en autonomie et se retrouveraient « substantiellement » modifiées. (...)

Les agences de l’eau par exemple ne lanceraient plus aucun programme de recherche de leur propre initiative, mais participeraient aux travaux définis par le SGTE.

Idem pour l’agence de la transition écologique (l’Ademe), cible de toutes les attaques de la droite en début d’année, « maintenue mais dans un format très restreint ». L’agence, qui compte aujourd’hui 150 chercheurs et 600 ingénieurs ne serait plus limitée qu’à la mise en œuvre des politiques du ministère de la Transition écologique, et à l’accompagnement de la décarbonation des entreprises, sous tutelle unique du SGTE. Exit la biodiversité, l’eau, les sols, l’urbanisme… Étonnamment pour Christine Lavarde, tous ces sujets ne concernent pas les entreprises. L’agence ne verserait en outre plus aucune aide, ne communiquerait plus en son nom propre, et ne lancerait plus d’étude de sa propre initiative. (...)

Au moins quatre agences environnementales supprimées

Le conservatoire du littoral (180 personnes), chargé d’acheter des espaces naturels côtiers dégradés ou menacés pour les protéger et/ou les restaurer serait, lui, purement supprimé, ses missions transférées à l’office français de la biodiversité (OFB), qui devrait alors créer une direction des acquisitions foncières. L’OFB lui-même se retrouverait sous tutelle du SGTE. Ses missions de polices administratives seraient transférées aux directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal). Pour la police judiciaire, ces agents assermentés deviendraient des « gardes de l’environnement », « sur le modèle des garde-côtes », explique Christine Lavarde, un rôle qui pourrait être rempli également par des gendarmes ou des douaniers. L’OFB ne pourrait plus non plus lancer d’appel à projet ou d’études, mais intégrerait les parcs naturels qui perdraient alors leur personnalité juridique. Sans que « leurs missions ne soient remises en cause », précisent les sénateurs. Ni l’Ademe, ni l’OFB n’ont pour l’instant souhaité commenter.

Moins connus, l’Etablissement public du Marais Poitevin et Geoderis seraient eux aussi supprimés dans le scénario de la commission d’enquête. Comme l’Agence bio, dont les missions seraient réintégrées au ministère de l’Agriculture.
Le ministère de la Transition écologique indigné

« Ce rapport est un ramassis de contre-vérités, écrit par des personnes qui ne connaissent pas la réalité de notre travail », a réagi Pierre Cazaux, délégué syndical SNE de l’Ademe, qui craint de voir certaines de ces recommandations reprises dans des propositions législatives, notamment à l’occasion du budget 2026. Le patron de l’Ademe, Sylvain Waserman a, lui, réagit sur Linkedin, évoquant des « erreurs factuelles » dans le rapport.

Ils peuvent toutefois compter sur leur ministre de tutelle, Agnès Pannier-Runacher, qui dénonce ici une manœuvre politique visant à affaiblir l’écologie (...)

« L’Ademe soutient des projets concrets de décarbonation dans nos usines et nos collectivités locales, créant de l’emploi dans les territoires et contribuant à baisser la facture d’énergie des Français », insiste l’entourage de la ministre, qui rejette tout autant la proposition de réorganisation de l’OFB qui « aurait pour effet d’empêcher l’articulation entre les polices administrative et judiciaire. Non content de nier les compétences pointues nécessaires pour exercer cette police, elle irait à rebours de ce que demandent les agriculteurs qui plaident pour plus de proportionnalité, et elle affaiblirait la protection de l’environnement ».

Finalement, « ces propositions sont en total décalage avec les attentes des Français qui veulent boire une eau non polluée, respirer un air sain, profiter d’un environnement de qualité et être protégés contre les risques liés au dérèglement climatique », tranche Roquelaure. (...)

. Au maximum, avec l’ensemble de ses propositions pour toutes les agences et opérateurs de l’Etat, la commission sénatoriale estime pouvoir dégager 550 millions d’euros d’économie. Loin, très loin, des 40 milliards recherchés par le gouvernement.