
Un ingénieur américain a conçu un plan de sabotage informatique redoutable, en paralysant son ancienne entreprise. Entre vengeance personnelle et héritage du mouvement néo-luddiste, retour sur une histoire digne d’un thriller cybernétique.
(...) Le 7 mars, Davis Lu, un développeur texan, a été reconnu coupable par un jury fédéral d’avoir intentionnellement saboté les serveurs de son ancienne entreprise après son licenciement en 2019. Il y travaillait depuis 2007.
Exaspéré par la direction que prenait la société et par sa politique managériale –notamment une « réorganisation » des équipes annonçant des licenciements en série–, Davis Lu s’est mis à réfléchir à un moyen de supprimer massivement les fichiers internes tout en masquant le code responsable de cette manipulation. (...)
Le 4 août 2019, Davis Lu s’est mis à coder des « boucles infinies » conçues pour intercepter les connexions et effacer les dossiers des employés, dans le cas de figure où lui aussi, finissait par être licencié. Il a nommé ces scripts « Hakai » –un terme japonais signifiant « destruction »– et « HunShui », en référence à une expression chinoise qualifiant les employés qui profitent de l’absence de leurs supérieurs pour ne pas travailler. (...)
L’absence de Davis Lu a instantanément déclenché la petite « bombe » de code et occasionné un blocage massif des utilisateurs, paralysant l’ensemble des opérations de l’entreprise. (...)
Vengeance personnelle ou activisme anti-tech ?
L’ancien employé risque désormais jusqu’à dix ans de prison fédérale, après que le FBI a réussi à remonter sa trace, une tâche apparemment ardue. (...)
Sans le savoir, cet ancien employé s’inscrit dans une longue tradition, cette pratique n’étant pas une première. En France (cocorico), un collectif de développeurs et de travailleurs du secteur technologique, baptisé « Comité liquidant ou détournant les ordinateurs » (Clodo, un jeu de mots avec l’argot de « clochard »), a mené plusieurs actions dans les années 1980. Opposés à l’essor technologique qu’ils considéraient comme un outil d’asservissement, ils dénonçaient son rôle dans l’aliénation des travailleurs, s’inscrivant ainsi dans la lignée de la pensée anarchiste française et de la mouvance néo-luddiste. (...)