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« Il venait de finir sa première année d’école et savait lire le mot terrible : guerre »
#Israel #Iran #USA
Article mis en ligne le 9 juillet 2025
dernière modification le 6 juillet 2025

En Iran, où la parole peut coûter cher, Tara nous écrit dans l’ombre. Sous le couvert de l’anonymat, elle raconte les premières heures des bombardements israéliens.

Depuis Téhéran, une voix sous silence. En Iran, où la parole peut coûter cher, Tara nous écrit dans l’ombre. Sous le couvert de l’anonymat, elle raconte les premières heures des bombardements israéliens, l’écho lointain mais terriblement présent de la guerre qui gronde. Elle dit l’effroi, l’attente, et cette peur presque indicible : devoir expliquer l’inexplicable à son enfant. Témoignage. (...)

Vers 3 h 30 du matin, vendredi, allongée à demi consciente, j’ai commencé à entendre des bruits sourds, comme des coups de tonnerre… ou des explosions lointaines. Puis ils se sont répétés. Je me suis redressée à moitié, inquiète. Deux détonations beaucoup plus fortes m’ont fait sursauter. L’immeuble a tremblé et a plongé dans le noir, courant coupé. Mon cœur battait à tout rompre. (...)

Mon mari a préparé du thé. Il m’a dit, avec une lassitude douloureuse : « J’ai ouvert les yeux vers le monde en pleine guerre. Je me rappelle qu’on se déplaçait, fuyait les bombardements… J’ai grandi dans les abris/bunkers, tout petit, j’étais témoin des scènes d’enterrement des victimes de guerre, ensuite je me suis retrouvé dans les files d’attente dans les prisons pour rencontrer les prisonniers politiques de ma famille… Et maintenant, encore la guerre. C’est pas juste… » (...)

« Aujourd’hui, l’Iran brûle »

Mais plus que la peur, c’était la colère qui me rongeait. Colère contre ceux qui nous attaquent, bien sûr. Mais surtout contre nos propres dirigeants. Ceux qui, par leur soif de pouvoir et leurs aventures idéologiques, ont conduit ce pays fatigué à la guerre. Ils n’ont jamais pensé à l’Iran. À son peuple. Ils ont eu toutes ces années pour dialoguer, pour chercher la paix. Certes, le monde n’a pas toujours été juste avec nous, mais ils auraient pu faire des compromis, penser au bien-être du peuple, à la préservation de la patrie.

Des années à vivre sous le règne de ce régime nous ont appris une chose : les gens ne comptent pas pour eux. Qu’il y ait dix millions de morts sur les quatre-vingt-dix millions d’habitants, peu importe : il en reste toujours quatre-vingts millions, et les morts seront qualifiés de martyrs et iront au paradis ! (...)

Ils ont parlé avec arrogance au monde entier, ont battu le tambour de la guerre, ont ignoré, humilié et réprimé un peuple à bout. Ils ont mis mon Iran sous les flammes, et ils se sont eux-mêmes brûlés dans ce feu. Ils ont brandi la guerre comme un drapeau de fierté. Et aujourd’hui, l’Iran brûle. Et eux aussi. Quelle que soit la profondeur du fossé qui nous sépare de notre gouvernement, cela ne signifie en rien qu’Israël – l’un des États les plus infâmes, criminels et usurpateurs au monde – soit en droit de nous donner des leçons de liberté. (...)