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France24
La consigne pour recyclage, une "fausse solution" pour lutter contre le plastique ?
#plastique #recyclage #pollution
Article mis en ligne le 20 mars 2024
dernière modification le 19 mars 2024

L’Union européenne a annoncé début mars vouloir généraliser d’ici 2029 la consigne pour les bouteilles en plastique et les canettes. Si les autorités européennes vantent les chiffres du recyclage des pays qui l’ont déjà adoptée, des associations de défense de l’environnement dénoncent de leur côté une "fausse solution", qui ne "s’attaque pas au vrai problème". Décryptage.

L’Union européenne veut devenir une bonne élève de la lutte contre la pollution plastique. Lundi 4 mars, les Vingt-Sept ont annoncé une série de mesures pour verdir leurs déchets d’emballage avec des objectifs ambitieux : parvenir à tous les recycler d’ici 2035 et diminuer leur volume de 15 % d’ici 2040. Un défi de taille alors qu’un Européen générait en moyenne 188,7 kg de déchets d’emballage en 2021 – soit un bond de 32 kg en une décennie –, selon Eurostat, et que seulement 64 % d’entre eux sont aujourd’hui recyclés.

Or, parmi les gobelets, colis, barquettes et autres déchets, deux types d’emballage viennent particulièrement remplir les poubelles européennes : les bouteilles en plastique et les canettes. Rien qu’en France, on estime que 340 000 tonnes de bouteilles en plastique ont été mises sur le marché en 2022 pour seulement 50 % recyclées, chiffre l’Ademe.

Pour pallier ce problème spécifique, le texte de l’UE propose de généraliser un système de consigne d’ici 2029. Les bouteilles en plastique et les canettes seraient vendues quelques centimes plus cher, environ 5 à 10 % du prix, mais ce surplus serait restitué au moment où le consommateur rapporterait le contenant usagé dans un point de collecte. Un procédé déjà bien connu et mis en place dans une quinzaine d’États comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou encore les pays scandinaves.

Des taux de recyclage record (...)

"Cela ne changera rien au parcours d’une bouteille en plastique"

Cette mesure n’est pourtant pas une "solution miracle", dénonce Manon Richert, chargée de communication pour l’ONG Zero Waste France. "Ce système peut, certes, permettre d’améliorer les chiffres du recyclage mais il ne vise pas le vrai objectif que nous devons avoir : celui de baisser drastiquement notre production de plastique." (...)

Selon l’activiste, la mise en place de la consigne pourrait surtout entraîner un "effet rebond", et à l’inverse de l’objectif affiché par l’UE, inciter les consommateurs à continuer à acheter des bouteilles en plastique. "On nous abreuve depuis des années d’un discours qui présente le tri des déchets et le recyclage comme un geste écolo facile et on véhicule l’idée que ce n’est pas si grave d’acheter du plastique si on le recycle. Et là, on va venir ajouter un intérêt financier", explique-t-elle. "Cela pourrait donc avoir un effet pervers et favoriser la consommation de bouteilles en plastique."

Son inquiétude se vérifie déjà en Allemagne (...)

Une bataille d’intérêts financiers

"Derrière la consigne pour recyclage, c’est plus une bataille d’intérêts financiers qu’une question environnementale qui se joue", tance Manon Richert. Depuis plusieurs années, les politiques se font de plus en plus offensives pour obliger les industriels à utiliser une part grandissante de plastique recyclé dans leur production. La demande se fait donc de plus en plus forte et le matériau devient de plus en plus cher.

Or, collecter plus de bouteilles et donc en recycler davantage permettrait mécaniquement d’augmenter la quantité de plastique recyclé disponible et donc de faire baisser son prix. "Pas vraiment, donc, de quoi les encourager à réduire leur production", déplore Manon Richert. "Au final, cette mesure risquerait d’entretenir le cycle de production du plastique alors qu’il faut le briser", résume-t-elle. (...)

Valoriser le réemploi

Zero Waste France, à l’instar d’autres organisations de défense de l’environnement, milite de son côté activement pour privilégier un autre système : une consigne pour réemploi, principalement du verre. "Cela existait en France jusqu’aux années 1980. L’idée est de récupérer les contenants pour les laver et les réutiliser tel quel selon le principe de l’économie circulaire", précise Manon Richert. (...)

"Si cela était organisé à l’échelle locale avec, par exemple, une optimisation et une mutualisation des transports, l’impact environnemental et social serait très bénéfique", assure-t-elle. Mais si des initiatives locales et associatives se multiplient ces dernières années, le système peine à s’imposer dans le discours politique. (...)