
La chambre de l’instruction a tranché : la perquisition était illégale, toute l’enquête est annulée. Le parquet général près la cour d’appel de Bordeaux ne formera pas de pouvoir en cassation. Syndicats police, qui avaient tweeté/accusé plus vite que leur ombre : désavoués. https://t.co/YAMKB9H0oc
— David Dufresne (@davduf) March 19, 2021
« Ultra-jaunes » à Bordeaux : la justice annule l’enquête
En décembre 2019, seize personnes soupçonnées de préparer des actions violentes lors d’une manifestation des « gilets jaunes » sont mises en examen à Bordeaux. La chambre de l’instruction vient de trancher : la perquisition qu’elles ont subie était illégale, toute l’enquête est annulée. (...)
« C’est sur la foi d’un simple renseignement », dont l’origine n’est pas mentionnée en procédure, que l’affaire a commencé, constate la chambre de l’instruction. Si l’on peut soupçonner qu’elle provient d’un service de renseignement, aucun élément concret n’a été versé au dossier, certains procès-verbaux évoquant des « informations classifiées » pour ne pas rentrer dans le détail. Sur le plan judiciaire, écrit la présidente, le lien entre les tags et les occupants de l’appartement reste donc « une simple conjecture, corroborée par aucun élément objectif ».
Compte tenu de ces vices de départ, l’arrêt disqualifie toute l’enquête. (...)
Sollicité par Mediapart, le parquet général près la cour d’appel de Bordeaux indique qu’il ne formera pas de pourvoi en cassation pour contester l’arrêt de la chambre de l’instruction.
« Cette décision représente un revers majeur pour les donneurs d’ordre de la perquisition », estime Me Xavier Sauvignet, l’un des avocats qui a contesté la régularité de la procédure avec Me Alice Becker, Me Gabriel Lassort et Me Raphaël Kempf.
À l’époque des faits, le directeur départemental de la sécurité publique de Gironde Patrick Mairesse s’était félicité de la réussite de son opération. (...)
Les syndicats policiers lui avaient immédiatement emboîté le pas. (...)
Sur Twitter, le syndicat des commissaires de police SICP adressait ses « félicitations aux enquêteurs de la police nationale de la Gironde pour cette très belle affaire ». Le syndicat y voyait « une preuve supplémentaire du climat délétère et dangereux qui pèse sur les policiers » et trouvait « étrange que certains chantres des violences illégitimes, ne parlent pas, avec la même intensité, de cette affaire ».
« Ce qu’il s’est passé est très grave. Cela devrait nous amener à réfléchir sur cet emballement policer et judiciaire contre les gilets jaunes, au mépris de l’État de droit », réagit aujourd’hui Me Sauvignet, en rappelant que « nous sommes dans le cadre d’un procédure importante, qui a mobilisé des moyens importants et qui a eu un impact sur la vie des gens. L’un des prévenus a fait de la détention provisoire dans cette affaire ». (...)
« Le prévenu que je défends m’a expliqué que les policiers sont entrés dans l’appartement en étant sur-équipés, avec des fusils d’assauts, des casques, etc. », ajoute l’avocat. « Il descendait l’escalier pour aller déjeuner et a vu un laser rouge pointé sur lui. Les seize personnes ont ensuite été allongées face contre le sol, avec un genou sur la nuque, un fusil braqué sur les têtes. » Comme le signifie l’arrêt de la cour d’appel, les policiers n’avaient en réalité même pas le droit de pénétrer dans cet appartement.