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Frustration magazine
La réalité de la précarité étudiante : un mécanisme de sélection sociale et de flexibilisation du travail
#etudiants #PrecariteEtudiante #capitalisme #stages #apprentissage #lepoingleve
Article mis en ligne le 8 avril 2024

les réalités étudiantes ont fortement changé : de plus en plus de jeunes accèdent aux études supérieures, alors même que l’université répond moins bien aux besoins patronaux. Le résultat est qu’il y a désormais en France des centaines de milliers d’étudiantes et d’étudiants, issus des classes moyennes et populaires, qui doivent conjuguer pauvreté, travail dans de mauvaises conditions tout en tentant de réussir leurs études, sans savoir quelles seront leurs perspectives à la sortie.

Une enquête du collectif étudiant Le Poing Levé sur la précarité étudiante, réalisée dans toute la France pendant 4 mois, avec un échantillon de plus de 6 000 étudiants, vient jeter, dans son rapport d’une soixantaine de pages, une lumière crue sur cette réalité. On y apprend que 85% des étudiantes et étudiants de cet échantillon vivent dans la pauvreté alors même que plus de la moitié travaillent en plus de leurs études. Ce que l’on y découvre aussi c’est que la précarité étudiante n’est pas vraiment un dysfonctionnement mais bien un mécanisme qui permet de justifier la sélection tout en ayant une main d’œuvre plus flexible et adaptable, qui tire vers le bas les salaires en général.

(...) L’inflation, de 5,2% cette année, a donc eu un impact majeur sur cette population. Les “produits alimentaires ont augmenté de 23,7%, d’après l’Insee”, allant jusqu’à “36% pour les pâtes”. (...)
Les transports, que nombreux étudiants et étudiantes doivent prendre pour retrouver leurs familles, ont également fortement augmenté. En plus de l’essence, “les billets de train SNCF ont augmenté de 20% en moyenne par rapport à 2015” souligne Le Poing Levé.

Le niveau de pauvreté chez les étudiantes et étudiants est tel qu’il a même fini par percer la carapace des médias mainstreams, où celui-ci s’est matérialisé par les fameuses images de queues devant l’aide alimentaire. Loin d’être marginal, il s’agit d’un vrai phénomène : près de 18% des étudiantes et étudiants y ont déjà eu recours comme le montre le rapport. (...)

Le logement est de plus en plus difficile d’accès (...)

11% des étudiantes et étudiants ont été ou sont actuellement sans logement, donc..SDF. (...)

Les prix des loyers obligent également les étudiantes et étudiants à chercher à se loger loin de leurs lieux d’études. En région parisienne, par exemple, “plus d’un tiers des étudiant·es (…) font plus d’une heure de trajet rien qu’à l’aller.”

Si avoir un logement est déjà une chance, cela ne nous dit rien du-dit logement qui dans le cas des étudiantes et des étudiants se résume le plus souvent à une chambre exiguë : “20% d’entre elles et eux font état de moisissures dans leur logement tandis que 12,43% des étudiant·es disent devoir faire face à des invasions de nuisibles” (souris, cafards, punaises de lit…). Près de la moitié disent avoir un logement mal isolé : les étudiantes et étudiants ont donc froid en hiver, d’autant plus que près de 70% d’entre elles et eux ont dû réduire leur consommation d’électricité face à l’envolée des prix. (...)

Des impacts extrêmement néfastes sur la santé mentale (...) “82% des étudiant·es sondé·es déclarent se sentir anxieux·ses ou angoissé·es”. (...)

Les étudiantes et les étudiants travaillent (...) en moyenne 15 heures par semaine mais la majorité considère que cela n’est pas suffisant pour subvenir à leurs besoins et les 3 quarts d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. (...)

Le réel objectif des alternances, stages et apprentissages : la “flexibilisation” du travail et la baisse des salaires (...)

Pour le Poing Levé, le moyen de limiter cette mise en concurrence des travailleuses et travailleurs en poste avec des jeunes précarisés et insécurisés est la même que celle proposée en alternative à l’interdiction des stages dans notre texte : obliger l’apprentissage et les stages à être au smic horaire.

Un système d’exclusion des classes populaires (...)

les boursiers sont deux fois plus nombreux que les non-boursiers à avoir pensé à arrêter leurs études pour raisons financières. Et parmi ces boursiers, ceux qui travaillent sont encore plus nombreux à avoir pensé à arrêter pour cette raison là, car conjuguer travail et études est extrêmement difficile et a souvent des conséquences néfastes sur les résultats. (...)

Le rapport note également la façon dont “les réformes du Bac général, du Bac professionnel et du brevet annoncées par Attal (…) ont vocation à rediriger le plus tôt possible des franges de la jeunesse issues des classes populaires vers les entreprises”. (...)

C’est pourquoi les conditions d’examens sont en train d’être attaquées dans toutes les universités : on enlève les rattrapages, on supprime des partiels et certaines modalités d’examen, pour rendre plus difficile l’accès au diplôme. La précarité fait partie des méthodes pour durcir les conditions d’accès aux études puis d’études (…) Tout ça fait système pour virer des masses d’étudiants des facs dont le gouvernement et le patronat n’ont plus besoin”.

La précarité étudiante, loin d’être un phénomène isolé, touche des centaines de milliers de jeunes, issus des classes moyennes et populaires, qui jonglent entre travail et études dans des conditions souvent difficiles. Elle n’est pas un dysfonctionnement, mais plutôt un mécanisme qui maintient la sélection sociale tout en contribuant à baisser les salaires de tout le monde. (...)