
Le porte-parole de la Garde nationale tunisienne, Houcem Eddine Jebabli, a déclaré vendredi que "l’État avait commencé à fournir des billets [d’avion] aux migrants africains irréguliers" pour qu’ils rentrent dans leur pays d’origine. La situation des migrants autour de Sfax s’est considérablement dégradée. La Garde nationale mène depuis plusieurs semaines des opérations visant à démanteler les milliers de logements de fortune érigés dans les champs d’oliviers.
La rédaction d’InfoMigrants a tenté de joindre la Garde civile pour avoir des détails sur cette décision. En vain.
Depuis plusieurs années, le gouvernement de Kaïs Saïed a fait de la lutte contre l’immigration irrégulière sa priorité. Depuis février 2023, date d’un discours présidentiel virulent anti-migrants, le chef de l’État multiplie les restrictions pour pousser ces sans-papiers hors du pays. On estime que le nombre de migrants irréguliers en Tunisie se situe entre 20 000 et 25 000, selon les chiffres des ONG.
Rafles et destructions de campements
Sans possibilité de travailler ou de se loger, ces migrants d’Afrique subsaharienne ont été, ces derniers mois, acculés dans une extrême pauvreté. La majorité d’entre eux vivent dans des champs d’oliviers à al-Amra dans la région de Sfax - bien qu’il leur soit désormais formellement interdit d’installer ces campements informels dans la zone. Leurs tentes sont régulièrement brûlées par la Garde civile. (...)
Intensifier les "retours volontaires" de l’OIM
Et loin de relâcher l’étau autour des migrants, Kaïs Saïed a même serré la vis en appelant l’Organisation internationale des migrations (OIM) à intensifier sa politique de "retours volontaires" pour "rapatrier" plus d’exilés. C’est en effet via cette agence de l’ONU que les gouvernements internationaux (Libye, Maroc, Niger...) organisent les rapatriements des migrants en situation irrégulière. (...)
Le président s’était même dit déçu par le faible nombre d’éloignements en avril : "seulement 1 544 migrants" ont été rapatriés durant les trois premiers mois de l’année 2025. Trop peu, pour le chef de l’État. (...)
Depuis, le dispositif de l’OIM tourne à plein régime. En cinq mois - de janvier à mai 2025 -, Houcem Eddine Jebabli et l’OIM ont déclaré qu’environ 3 500 migrants avaient quitté volontairement la Tunisie. (...)
Les vols mis en place par le gouvernement tunisien ne s’accompagnent pas d’une aide financière comme celle proposée par l’OIM. (...)
Pour les ONG, la politique de ces "retours volontaires" est surtout un constat d’échec. Ces Africains n’ont pas eu d’autres choix que de fuir la Tunisie après être devenus les boucs émissaires d’une politique présidentielle devenue virulente à leur égard, estiment-ils. Dans une interview à France 24, Romdhane Ben Amor, le porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), une association qui vient en aide aux migrants dans le pays, affirme que "le terme de ‘retour volontaire’ est largement critiqué parmi les migrants, car il s’est transformé en un retour forcé".