
première atteinte confirmée contre un chef de gouvernement
L’appareil de Pedro Sanchez et celui de la ministre de la défense ont été piratés au printemps 2021. Le timing de cette révélation suscite l’irritation en Espagne, où les services secrets sont accusés d’avoir eux-mêmes utilisé Pegasus contre des indépendantistes catalans.
Le téléphone du chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, ainsi que celui de la ministre de la défense, Margarita Robles, ont été piratés par le logiciel espion Pegasus, ont annoncé les autorités espagnoles, à Madrid, lundi 2 mai. L’analyse de ces appareils a confirmé que des données en avaient été extraites.
Pegasus est un logiciel très puissant, développé par la société israélienne NSO Group, capable d’aspirer toutes les données d’un téléphone, y compris les messages échangés par des applications sécurisées comme WhatsApp ou Signal. C’est la première fois que l’infection d’un appareil d’un chef de gouvernement en exercice est confirmée. (...)
« Attaque externe »
Une vérification de tous les téléphones du gouvernement a été ordonnée et le gouvernement affirme avoir transmis « tous les éléments techniques » issus de l’analyse des deux appareils infectés à la justice. « Cette enquête établira toute la vérité », a affirmé un porte-parole du gouvernement lors d’une conférence de presse, lundi, tout en affirmant qu’il s’agissait d’une « attaque illicite et externe », excluant qu’elle ait pu être menée par les services de renseignement espagnols.
Madrid n’a pas précisé quel service de renseignement ou pays était suspecté d’être à l’origine de ces attaques. (...)
Les enquêtes du « Projet Pegasus » ont montré, à l’été 2021, que de très nombreux journalistes, avocats ou militants des droits humains ainsi que des membres du gouvernement français avaient été visés par Pegasus pour le compte des services de renseignement du royaume chérifien. Le Maroc nie avoir utilisé le logiciel espion.
L’Espagne a, pour sa part, reconnu être cliente de NSO Group et se trouve au cœur d’un scandale majeur : une longue enquête du Citizen Lab de l’université de Toronto (Canada), spécialisé dans les logiciels espions, a démontré, le 18 avril, que plus d’une soixantaine de téléphones d’indépendantistes catalans avaient été infectés par Pegasus entre 2017 et 2020, vraisemblablement pour le compte des services espagnols de renseignement. (...)
Ces révélations ont provoqué un scandale politique en Espagne, où la coalition gouvernementale de gauche, fragile, dépend des voix de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC, indépendantiste).
Le 28 avril, les députés indépendantistes, qui réclament une commission d’enquête parlementaire et ont annoncé des plaintes devant la justice pour l’espionnage dont ils ont été victimes, ont d’ailleurs manifesté leur colère en votant contre le plan d’aide économique du gouvernement visant à faire face à l’inflation provoquée par la guerre en Ukraine. Le texte n’est passé de justesse que grâce aux voix des indépendantistes basques d’extrême gauche.
La ministre de la défense sur la sellette (...)
loin de calmer l’irritation des indépendantistes catalans, l’annonce de l’espionnage dont ont été victimes Pedro Sanchez et sa ministre a été accueillie avec circonspection par le président du gouvernement régional catalan, Pere Aragones (ERC). « Quand l’espionnage est massif contre les institutions catalanes et l’indépendantisme, silence et faux-fuyants. Aujourd’hui, tout n’est qu’empressement », a-t-il commenté sur Twitter. Lui-même figure parmi les cibles des attaques de Pegasus. (...)
Pour rappel, on n'a pas voulu accorder à Edward Snowden d'asile politique. Faire savoir avec force qu'en France et en Europe on n'accepte pas que nos dirigeants soient placés sur écoute par des alliés, ça aurait commencé par ça. https://t.co/ORprCeTGYq
— Guillaume Champeau (@gchampeau) May 2, 2022