
Robert Badinter est mort à l’âge de 95 ans, a annoncé sa collaboratrice, vendredi 9 février, à l’AFP. L’homme qui fut avocat, ministre, écrivain, président du Conseil constitutionnel et sénateur incarne surtout son engagement contre la peine de mort. Le 17 septembre 1981, il montait à la tribune de l’Assemblée pour défendre brillamment l’abolition de la peine capitale. L’aboutissement de deux siècles d’un combat toujours actuel.
« J’ai l’honneur, au nom du gouvernement de la République, de demander à l’Assemblée nationale l’abolition de la peine de mort en France. » Il y a quarante ans, le 17 septembre 1981, à 15 h 30, Robert Badinter entame devant les députés la défense enflammée d’un texte historique : la loi n° 81-908 mettant fin à la peine capitale.
L’avocat de 53 ans, nommé garde des Sceaux par François Mitterrand trois mois plus tôt, a fait sienne la cause de l’abolition depuis le début des années 1970 et l’affaire Buffet-Bontems. (...)
Le déclic de l’affaire Patrick Henry
« Il n’y a pas de révision possible, pas de grâce possible, pas de libération possible, pour le décapité. Je ne pouvais plus rien pour Bontems. C’était la vérité nue, la seule de cette nuit », écrit l’avocat dans l’Exécution (1973). L’affaire est un déclic et le fait passer « de la conviction intellectuelle à la passion militante » contre la peine de mort. (...)
« Partout où la peine de mort est prodiguée, la barbarie domine » (...)
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– (Ouest-France)
Robert Badinter, combattant acharné contre la peine de mort, est décédé à l’âge de 95 ans
Robert Badinter est mort à l’âge de 95 ans, dans la nuit de jeudi à vendredi. L’ancien ministre de la Justice a marqué à jamais l’histoire de la Ve République. Au terme d’un combat judiciaire et politique rude, il est celui qui a mis fin à la peine de mort en France. Cette mort qu’il avait côtoyée de près durant son enfance. (...)
Alors que Robert Badinter était ministre de la Justice au début des années 1980, François Mitterrand lui fit cette confidence : " On vient régulièrement me demander votre tête. Il est vrai que vous n’y mettez pas du vôtre… " Demander la tête, même au sens figuré, de celui qui fit abolir la peine capitale, l’ironie de la situation n’avait pas échappé au président de la République…
Solide face à une armée d’opposants (...)
" L’avocat des assassins ", tranchent des éditorialistes de droite au moment de sa nomination au ministère de la Justice, le 23 juin 1981. Christian Bonnet, ex-ministre de l’Intérieur sous Giscard d’Estaing, dépasse, lui, les bornes de la simple critique lorsqu’il indique que " maître Badinter est le reflet de ce que Guy de Maupassant appelait déjà la moisissure d’une certaine société parisienne évoluée ", rappelle Dominique Missika et Maurice Szafran dans leur biographie " L’homme juste " (Tallandier, 2021)…
Mais Robert Badinter a déjà le cuir épais. Tanné à l’épreuve des cours d’assises devant lesquelles il tentait d’éviter que des hommes soient " coupés en deux ". Endurci par ces foules, amassées devant les palais de justice, qui criaient " À mort ! " à l’encontre des criminels et dont les vociférations n’épargnaient pas l’avocat.
« Et puis un jour, il y aura l’abolition »
Qu’il fut rude ce combat pour abolir la peine capitale. (...)
Ce qu’on imagine, en revanche, c’est sa grande satisfaction lorsque le 18 septembre 1981, l’Assemblée nationale vote l’abolition de la peine de mort par 369 voix « pour » et 113 « contre ».
Seize députés UDR de l’opposition s’étaient même prononcés en faveur de l’abolition dont Jacques Chirac et Philippe Seguin. Même le sénat, pourtant très majoritairement à droite, adopta la loi. (...)
– Voir la video (12’) de France 24 ( 17/11/2022, YouTube)
Robert Badinter : "Dans la devise républicaine, il devrait aussi y avoir la dignité"
Alors que se tient à Berlin le 8e Congrès mondial contre la peine de mort – peine toujours en vigueur dans une cinquantaine de pays –, Robert Badinter répond aux questions de Pauline Paccard. Celui qui a mené le combat de l’abolition de la peine capitale en France en 1981 ne doute pas que cette abolition s’imposera un jour partout dans le monde. "J’ai vu les progrès considérables faits par la cause et, à cet égard, je suis convaincu de l’universalité prochaine de l’abolition de la peine de mort", assure l’ancien garde des Sceaux de François Mitterrand.