
Démentir la transformation d’une chaîne d’info en un média d’opinion, au service de la croisade idéologique de Vincent Bolloré : c’est le défi qu’ont tenté de relever les dirigeants de CNews à l’Assemblée, le 29 février. Une opération qui a nécessité de gros arrangements avec la vérité.
Des plateaux télé au décor solennel de l’Assemblée nationale, les figures de CNews ont démontré une certaine constance dans leur rapport à la vérité. Jeudi 29 février, pendant plus de six heures d’audition, les dirigeants et principales têtes d’affiche de la chaîne du groupe Bolloré se sont appliqués à tordre les faits devant les députés de la commission d’enquête sur l’attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de la télévision numérique terrestre (TNT). Sur un ton nettement moins désinvolte et provocateur que sur leur antenne, les pontes de la TV Bolloré ont tenté de prouver que leur chaîne est un modèle de pluralisme, soucieuse de faire dialoguer toutes les tendances politiques, et pas du tout alignée sur la croisade idéologique de leur milliardaire de propriétaire. Objectif de l’opération : convaincre la représentation nationale que CNews n’est pas une chaîne d’opinion et qu’elle fait tout son possible pour respecter la convention qui la lie avec l’Arcom, l’autorité de régulation de l’audiovisuel. (...)
. Finalement, la chaîne a dépêché quinze émissaires, avant que Vincent Bolloré lui-même ne soit auditionné le 13 mars, suivi par Cyril Hanouna le lendemain. (...)
Si le groupe n’a pas lésiné sur les moyens, c’est que l’enjeu est de taille. L’appel à candidatures vient de débuter pour réattribuer les quinze fréquences TNT arrivant à échéance en 2025, dont celles de CNews et C8. Et les médias Bolloré ont senti pour la première fois le vent tourner depuis que le Conseil d’État a demandé à l’Arcom de renforcer son contrôle sur le respect par CNews de ses obligations (...)
Une pression encore accentuée par la création de cette commission parlementaire, demandée par La France insoumise, et par le lancement d’une pétition par la députée écologiste Sophie Taillé-Polian et la directrice du mouvement Latifa Oulkhouir contre le renouvellement de l’agrément de C8 et CNews. (...)
Mediapart a passé au crible les déclarations des quinze représentant·es du groupe Canal+. Plusieurs de leurs affirmations ne résistent pas à l’examen des faits. (...)
Si CNews gagne du terrain sur ses concurrentes, elle reste pourtant la chaîne dont le public est le plus homogène, bien plus à droite que la moyenne des téléspectateurs et téléspectatrices. C’est le principal enseignement d’une note de recherche élaborée par Julien Labarre, un chercheur français basé à l’université de Californie, à Santa Barbara. (...)
Le matraquage antimigrants et ultraconservateur de CNews rencontre-t-il lui aussi un public d’extrême droite ? Le doute n’est pas permis, selon les données recueillies et analysées par Julien Labarre. (...)
Le public de CNews est en outre particulièrement homogène sur le plan idéologique. (...)
Des résultats qui tordent par ailleurs le cou à l’idée que le service public serait le pendant gauchiste de CNews.
Pour autant, il n’est pas possible d’établir un lien causal indiquant que l’exposition prolongée à CNews conduit à plébisciter des candidat·es d’extrême droite (...)
Immigration et islam : les grandes obsessions de CNews (...)
Les mots « islam » et « immigration » sont ainsi présents 335 jours sur 365 sur les bandeaux-titres de la chaîne.
Et même lorsqu’ils ne sont pas directement évoqués dans les titres, ces deux thèmes, fréquemment associés, s’immiscent dans d’autres sujets a priori sans rapport (...)
D’autres termes trustent les bandeaux-titres du canal 16 de la TNT et appuient la tendance monomaniaque de la chaîne. Il en va ainsi de « abaya », « wokisme », « insécurité », « peur », « délinquance » et « trafic de drogue », apparaissant au moins une fois tous les trois jours dans les bandeaux-titres.
Traiter de faits d’actualité et en livrer une lecture politique puisant dans le répertoire de la droite identitaire : voilà la méthode CNews. (...)
À CNews, la gauche n’existe pas ou presque (...)
La formule CNews, c’est beaucoup d’extrême droite et de droite, souvent jusqu’à l’overdose, et une pointe d’autre chose : le plus souvent un représentant du parti présidentiel, plus rarement un·e intellectuel·le ou un·e élu·e de gauche. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la composition des plateaux des émissions phares de la chaîne. (...)
CNews, la chaîne la plus sanctionnée et rappelée à l’ordre du PAF, et de très loin (...)
Manquement aux obligations d’honnêteté et de rigueur, défaut d’indépendance de l’information, insuffisante maîtrise de l’antenne, fausses informations diffusées et absence de rectification. Les motifs sont divers, mais permettent de dresser un constat sans appel : les médias Bolloré sont « les plus délinquants du paysage audiovisuel français », comme le mentionnait le média l’Informé.
Et quand CNews et C8 respectent les règles, c’est souvent avec une volonté manifeste de les contourner. (...) (...)