
Dans le Pacifique, la contamination radioactive due aux essais nucléaires réalisés pendant la Guerre froide persiste encore aujourd’hui. Notre solidarité envers les populations locales aussi. Cette année, soit quarante ans après la dernière mission et l’attentat du Rainbow Warrior, Greenpeace est de retour dans la région pour une mission bien particulière. Une mission pour la vérité.
Une expédition pas comme les autres
Entre mars et avril dernier, le Rainbow Warrior troisième du nom et son équipage se sont rendus dans les îles Marshall, à l’invitation des autorités et de la population, afin d’étudier les niveaux résiduels de radioactivité qui persistent dans ce pays que les États-Unis ont utilisé comme terrain d’essais pour leurs bombes nucléaires entre 1946 et 1958. Les conséquences humaines et environnementales désastreuses de ces 67 essais nucléaires, d’une puissance totale équivalente à 7200 bombes comme celle larguée sur Hiroshima, se font encore ressentir aujourd’hui. (...)
Les scientifiques et les spécialistes de la radioprotection à bord de notre bateau ont ainsi pu recueillir des témoignages, des données et des échantillons qui permettront de mettre en évidence la persistance de la contamination radioactive et d’appuyer les procédures engagées par le gouvernement marshallais auprès des États-Unis et de l’ONU pour obtenir vérité, justice et réparations. (...)
En mai 1985, il y a 40 ans, Greenpeace avait déjà réalisé une mission très particulière dans les îles Marshall : évacuer, à leur demande, les quelque 350 habitants et habitantes de l’atoll de Rongelap, empoisonné par la radioactivité due aux essais nucléaires américains réalisés 30 ans plus tôt. L’ensemble de la population et leurs effets personnels avait ainsi été transportés à bord du Rainbow Warrior vers un autre atoll plus sûr, Mejatto, à 180 km. (...)
Cette mission, baptisée Exodus, a créé des liens indéfectibles entre Greenpeace et les Marshalliens et les Marshalliennes. Lors du retour de Greenpeace cette année dans ces îles, le Rainbow Warrior troisième du nom a été chaleureusement accueilli par la population. Bunny McDiarmid, membre de la mission Exodus en 1985 puis directrice de Greenpeace International de 2016 à 2019, était également présente aux Marshall pour les cérémonies de commémoration des 40 ans de l’évacuation. Elle se souvient de la résilience et du courage de ces habitants et habitantes qui avaient accueilli l’arrivée du premier Rainbow Warrior avec des pancartes qui disaient “Nous aimons l’avenir de nos enfants”…
Un combat toujours d’actualité
La menace a changé de forme mais persiste (...)
L’État français, au plus haut niveau, a employé la pire manière possible pour tenter de nous faire taire en faisant exploser deux bombes sur la coque du navire, coulant ainsi le Rainbow Warrior et tuant Fernando Pereira, photographe et compagnon de Greenpeace. Ses photos de la mission Exodus, qui révélaient la réalité et les atrocités des essais nucléaires, venaient de faire le tour du monde… Greenpeace dérangeait. Ce n’est pas notre bateau que l’État voulait couler, mais bien notre mouvement tout entier.
Aujourd’hui, Greenpeace dérange toujours. Et les tentatives d’intimidation perdurent elles aussi : ce n’est plus avec des bombes, mais avec des balles ou des procès que les puissants essaient désormais de museler la contestation pacifiste et écologique. Loin de nous dissuader, ces basses manœuvres ne font que renforcer nos convictions et notre détermination à agir – contre le nucléaire, militaire comme civil, contre le changement climatique et ses promoteurs, pour notre planète et l’ensemble du vivant.
L’actualité nous donne malheureusement raison (...)
Il y a quelques jours, la commission d’enquête parlementaire relative aux essais nucléaires français en Polynésie a enfin publié son rapport. Elle y dénonce les mensonges de l’État, demande la simplification et l’amélioration des procédures d’indemnisation, entre autres mesures, et préconise à la France de demander pardon au peuple polynésien. Greenpeace continue de demander vérité, justice et réparations pour la Polynésie mais aussi pour l’Algérie, autre victime du colonialisme nucléaire français. (...) (...)
Alors que le monde se réarme, que les guerres se multiplient, que la menace du nucléaire revient sur le devant de la scène, que ce soit à travers le recours à l’arme atomique (“militaire”) mais aussi via les risques qui pèsent sur le nucléaire “civil” en Ukraine ou en Iran du fait de la vulnérabilité des centrales aux attaques, notre mouvement pacifiste et écologique doit rester actif, fort et soudé. Parce que, nous aussi, “Nous aimons l’avenir de nos enfants”…
Le Rainbow Warrior troisième du nom sera de retour à Auckland, en Nouvelle-Zélande, pour commémorer les 40 ans de l’attentat. Plus d’informations à suivre.