
Une manifestation contre la présence des groupes jihadistes a été dispersée mardi par les forces de l’ordre à coups de gaz lacrymogènes, à Barani, dans le nord-ouest du Burkina Faso. Plusieurs personnes auraient été blessées. Selon notre Observateur, l’omerta règne sur place : les habitants refusent de témoigner par crainte des représailles.
Les habitants de Barani, localité burkinabè proche de la frontière malienne, ont manifesté mardi 2 septembre. Face à la hausse des attaques de groupes terroristes dans la région, un cortège essentiellement constitué de femmes et d’enfants s’est constitué, avant d’être dispersé par les forces de l’ordre. Trois vidéos documentant les événements ont été relayées par divers comptes sur les réseaux sociaux. (...)
Les habitants de Barani, localité burkinabè proche de la frontière malienne, ont manifesté mardi 2 septembre. Face à la hausse des attaques de groupes terroristes dans la région, un cortège essentiellement constitué de femmes et d’enfants s’est constitué, avant d’être dispersé par les forces de l’ordre. Trois vidéos documentant les événements ont été relayées par divers comptes sur les réseaux sociaux. (...)
Sur l’une des vidéos, on voit une foule compacte de femmes et d’enfants tenant des bâtons ainsi que des cuillères et des spatules. Selon notre Observateur Souleymane (pseudonyme) , originaire de la région mais désormais en exil, ces ustensiles sont symboliques : "Cela signifie que la nourriture est menacée donc la survie de la famille est en danger". (...)
Dans une autre vidéo, des enfants et des femmes courent, des nuages de gaz lacrymogène s’élèvent et la foule se disperse dans la panique. L’homme qui filme explique : “Ils tirent des gaz lacrymogènes là, vous voyez les fumées là. C’est à Barani, aujourd’hui. [...] L’armée tire des gaz lacrymogènes sur les civils. Les gens sont venus pour manifester.”
À la 37e seconde de la vidéo, on entend une rafale de ce qui semble être un fusil d’assaut. Rien n’indique s’il s’agissait d’un tir de sommation ou si des personnes ont réellement été touchées par ces tirs.
D’après RFI, c’est la première fois qu’un rassemblement de ce type est dispersé par la force. Selon des témoignages locaux concordants, de nombreuses personnes auraient été blessées lors de la dispersion de la manifestation par les forces de l’ordre. L’information publiée sur les réseaux sociaux selon laquelle deux personnes auraient été tuées n’a pas pu être vérifiée par notre rédaction. La junte burkinabè n’a pas communiqué sur ces évènements.
“Beaucoup ne nous parlent plus”
Notre rédaction n’a pas pu joindre de personnes sur place, où la peur des représailles semble avoir dissuadé toute velléité de s’adresser à la presse étrangère.
Critique de la junte burkinabè, Souleymane est réfugié à l’étranger. ll dit avoir reçu des informations de Barani par des intermédiaires, parmi lesquels certains se trouvent également en exil.
“Il y a eu des tirs de soldats, le témoin que j’ai eu dit que les femmes se sont rassemblées pour manifester leur mécontentement et que les soldats ont tiré… Est-ce que c’était des tirs de sommation ? Je ne sais pas…
Même parmi les exilés, il y en a beaucoup qui ne parlent plus parce que leurs familles restées au pays essaient de les en dissuader. En général, les gens ne veulent pas parler, surtout à nous autres les activistes qui critiquons le régime. Du coup, ils ne nous parlent pas directement et nous recevons les informations uniquement par plusieurs intermédiaires.
En 2024, j’avais une source dans une autre région, elle a disparu des radars depuis le jour où j’ai fait une publication la citant - il avait insisté pour que je le cite. Et quelques jours après, il s’est fait enlever. Et jusque-là je n’ai pas eu de ses nouvelles. C’est clair qu’il a été enlevé. Mais est-ce qu’il vit encore ?”
“Quand tu refuses de te taire, tu deviens un ennemi.”
Aujourd’hui, Souleymane continue de critiquer la junte et de soutenir ses compatriotes depuis l’étranger. Un membre de sa famille a été enlevé, il dit ne plus avoir de nouvelles depuis plus d’un an. (...)
Au Burkina Faso, dirigé par une junte militaire menée par le capitaine Ibrahim Traoré depuis fin 2022, la situation sécuritaire reste dramatique. Les attaques terroristes se poursuivent et continuent de faire des morts parmi les civils. Les forces de sécurité et de défense et leurs auxiliaires sont également accusés de représailles et d’exactions contre la population.
Face à cette situation, en mai 2024, l’ONU se disait “gravement préoccupée” par l’augmentation des meurtres de civils et appelle à des enquêtes indépendantes et transparentes sur toutes les violations des droits humains, qu’elles soient commises par les groupes armés ou par les forces militaires.