
Il a fallu dix ans. Dix ans pour que le Parlement vote un projet de loi qui traînait dans ses cartons. Le texte concerne un sujet sensible, autant pour la politique extérieure que pour l’industrie françaises : le commerce des armes. Le 28 janvier, l’Assemblée nationale a donc enfin adopté un projet de loi – déposé une première fois en 2006... – qui vise à punir les violations des embargos internationaux sur les ventes d’armes [1]. Pendant une décennie, les gouvernements successifs n’avaient pas jugé bon de le mettre à l’ordre du jour. À l’heure de la lutte générale contre le terrorisme et sous l’effet de l’insistance de quelques députés, cette position attentiste est devenue difficile à tenir. D’autant que la loi doit transposer une recommandation de l’ONU qui date, elle, de 1998 !
Même si le secteur des armes est stratégique en France – plus de huit milliards d’euros de commandes en 2014, voir notre article –, il est soumis à une série d’embargos internationaux. Il est ainsi interdit de vendre des armes à la Côte d’Ivoire, la Libye, l’Iran ou la République centrafricaine. Ces pays sont frappés par un embargo voté par le Conseil de sécurité des Nations unies. Le Soudan, le Soudan du Sud et la Syrie sont eux visés par un embargo de l’Union européenne. « La législation ne permet pas de traiter de manière satisfaisante toutes les situations de violation. Par exemple, le transport de matériels de guerre entre un pays tiers et un pays soumis à un embargo ne peut pas être sanctionné pénalement », a expliqué le secrétaire d’État en charge des Affaires européennes, Harlem Désir. La nouvelle loi devrait combler ces failles, et permettre enfin de poursuivre devant la justice les trafiquants d’armes et intermédiaires français, ou résidents habituellement en France, qui vendent des armes à des pays ou des groupes sous embargo.
Un amendement déposé par les écologistes, qui a été adopté, a même permis de remédier à une lacune majeure du projet de loi initial. Celui-ci ne permettait pas de poursuivre des vendeurs d’armes s’ils avaient agi hors de France. Ce qui est pourtant en général le cas (...)