
Un rapport du ministère de l’intérieur publié en catimini, lundi 28 octobre, confirme les révélations de Disclose sur l’utilisation illégale par la police et la gendarmerie du logiciel Briefcam, entre 2015 et 2023. Cet outil qui permet la reconnaissance faciale a été désactivé juste après notre enquête. Une décision qui met fin, au moins temporairement, à l’une des plus graves atteintes à la vie privée en France ces dernières années.
(...) Un document long de 90 pages, qui confirme l’intégralité des révélations publiées par Disclose, en novembre 2023, sur le recours illégal à Briefcam par des dizaines de services de police et de gendarmerie. (...)
Aucun magistrat n’est alors informé de cette procédure, comme cela devrait être le cas. Deux personnes ressortent de l’analyse automatique de visages effectuée par le logiciel, avant que l’enquête des gendarmes ne les mette hors de cause. Leur méthode d’investigation, intrusive et illégale, ne sera jamais mentionnée sur procès-verbal. (...)
Ce seul exemple d’utilisation « hors cadre légal » prouve que les forces de l’ordre pouvaient, en un clic, exploiter l’outil de reconnaissance faciale de Briefcam à l’aide d’images filmées dans l’espace public. Un fait que l’ancien ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, n’a jamais reconnu. À la suite de notre publication, celui qui fut ministre de l’intérieur pendant quatre ans affirmait : « À ma connaissance, nous n’utilisons pas de reconnaissance faciale. » (...)
À la lecture du document, une élément saute aux yeux : le ministère de l’intérieur tente de blanchir l’utilisation illégale de Briefcam par ses services. (...)
Le 14 décembre 2023, soit un mois après nos révélations, la Direction générale de la police nationale s’est enfin décidée à se conformer à ses obligations juridiques en déposant « un engagement de conformité » auprès de la CNIL. Avant de finalement ordonner à ses services « de suspendre toute utilisation » de Briefcam, confirme le rapport du ministère de l’intérieur. La Direction de la gendarmerie nationale a, quant à elle, interrompu l’utilisation du logiciel trois jours après la publication de notre enquête, le 17 novembre 2023. Motif invoqué, d’après le rapport : « Des raisons d’insécurité juridique ».
L’étude élaborée par le ministère de l’intérieur va plus loin que la seule opération de blanchiment : elle milite pour élargir les possibilités d’utilisation de la reconnaissance faciale (...)
Alors que la suspension de Briefcam met temporairement fin à une surveillance illégale de la population par les forces de l’ordre, le gouvernement Barnier semble déjà préparer le coup d’après. Début octobre, Matignon a annoncé son intention de généraliser la vidéosurveillance algorithmique, expérimentée pendant les Jeux olympiques de Paris.