Arrêt de Mouv’, bouleversements éditoriaux à Ici… faute de discussions concluantes avec la direction sur plusieurs projets, les syndicats de la Maison ronde appellent à une grève illimitée lundi, jour du lancement des nouvelles grilles.

Radio France, les canicules estivales n’ont pas réchauffé les relations entre la direction et les syndicats, qui ont déposé le 11 juillet un préavis de grève illimitée à partir du lundi 25 août, minuit. En cause, une « méthode bulldozer », dénonce l’intersyndicale, qui réclame notamment : un réexamen du projet Mouv’ (il prévoit sa suppression sur la bande FM ainsi qu’une nouvelle grille, plus musicale, laissant sur le carreau plusieurs collaborateurs précaires), le « retour des rendez-vous d’antenne dont la suppression a été annoncée », à l’instar du passage en mensuel de l’émission d’investigation Secrets d’info ; ou encore une « remise en discussion de la stratégie de diffusion FM », restituant les fréquences de Mouv’ et une partie de celles de France Musique pour demander la réattribution de certaines à France Info et Ici (ex-France Bleu). (...)

C’est justement la situation des locales qui inquiète le plus les équipes, depuis plusieurs mois. En avril dernier, la CFDT a publié un communiqué rappelant qu’« Ici n’est pas un réseau national à décrochages locaux », mais bien « 44 stations locales de 44 équipes bien distinctes ». Le mois suivant, quarante et une d’entre elles ont signé des lettres ouvertes pour dénoncer la « verticalité » des prises de décisions, sans consultation. Exemple frappant : la centralisation des choix musicaux depuis Paris, pour l’ensemble des locales. (...)

Au-delà de la playlist (qui devrait prendre de plus en plus de place sur la grille), la présence de chroniques faites par les équipes nationales fait également grincer des dents. « On nous fait comprendre qu’on coûte trop cher, on enlève le sens de notre travail… Les équipes sont démobilisées. » « On a l’impression que le projet de la direction, en amoindrissant la part des programmes produits localement, va à l’inverse de ce qu’il faudrait faire, renchérit Lionel Thompson (CGT). Ce n’est pas ça qui fera remonter les audiences. » Car, avec environ 2 millions d’auditeurs, celles-ci sont en baisse : Ici, dont le changement de nom, en janvier, n’a pas eu l’effet escompté, a même été dépassé par Europe 1. Jeudi 21 août, les élus du CSE de France Bleu ont d’ailleurs refusé d’examiner les grilles de rentrée, demandant « le démarrage immédiat des négociations ».

L’autre sujet de mobilisation concerne les réformes des modes de production (...)

l’objectif de Radio France est de réaliser des économies, dans un contexte budgétaire tendu. 5,3 millions d’euros de déficit prévus fin 2025, alors que les dotations publiques accordées ces dernières années ne cessent de diminuer. « Les choix de la direction sont plus économiques qu’éditoriaux, déplore Lionel Thompson (CGT). Un tour de vis encore plus important est évoqué pour le budget 2026, alors on est d’autant plus inquiets. » (...)

Une inquiétude renforcée par « une direction absente à la table des négociations », a souligné Rodolphe Faure (CGT) lors d’une Assemblée générale jeudi. Ce même jour, l’intersyndicale a publié un communiqué titré « Y a-t-il un pilote dans l’avion ? » : « Alors que les organisations syndicales se tiennent prêtes depuis le 11 juillet, on apprend que la direction consent à rencontrer les organisations syndicales pour enfin négocier, mais pas avant vendredi, quelques heures avant le démarrage d’une grève dont le préavis a été déposé il y a près de six semaines… » (...)

Vendredi 22 août, de longues négociations, tenues cette fois-ci dans le cadre du préavis, ont échoué. La grève est donc maintenue, avant une prochaine séance de discussions lundi à 14 heures. La direction assure avoir « fait des propositions sur les différents sujets en cours de discussion » et se dit prête à reprendre le dialogue. « Il y a, des deux côtés, une volonté de sortir de la situation au plus vite, dans l’intérêt des auditeurs », assure-t-elle. Dans un communiqué, l’intersyndicale regrette pourtant que « la direction refuse la moindre concession ». « Ils proposent des bilans, des réunions d’analyse, des points réguliers, des ateliers… Bref, des choses qui ne leur coûtent rien. (...)

Débrayer dès la rentrée ? Malgré un consensus sur le fond, le timing inquiète. Lors de l’Assemblée générale de jeudi, Mathieu Vidard, producteur de La Terre au carré sur Inter — dont la suppression de la partie la plus engagée a suscité les inquiétudes quant au devenir de la ligne éditoriale de la station — a pointé la difficulté « de faire grève dès la rentrée et avec ces deux enjeux qui sont les questions en interne et la holding en octobre ».

S’il a été mis en pause durant l’été, le dossier du regroupement de l’audiovisuel public reste d’actualité. En juin dernier, quatre jours avant la mobilisation contre le projet du gouvernement, les salariés de la Maison ronde s’étaient déjà mis en grève pour protester contre la politique de leur direction. Depuis, le texte a été adopté au Sénat, en attendant d’être réexaminé à l’Assemblée nationale cet automne. Pour les syndicats, les deux combats sont bel et bien liés. « On est contraints de se battre sur tous les fronts » (...)