
Il devait prendre fin le 15 avril. Le seuil de revente à perte majoré a finalement été prolongé de trois ans. Or, il augmente les prix pour les consommateurs, et pas les revenus des agriculteurs.
Sur la boîte de douze œufs vendue 2,39 euros chez E.Leclerc, combien a touché l’éleveur ? Et sur la barquette de six côtelettes de porc affichée à 10,20 euros chez Carrefour ? Ces questions risquent de rester encore longtemps sans réponse. Le nouveau texte de loi visant à « renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire » — entré en vigueur le 15 avril — ne prévoit en tout cas rien pour rendre plus transparentes les marges de la grande distribution et la répartition des prix entre les différents acteurs. (...)
Absence de contrôles et de sanctions de l’État
Dans les faits, ce système n’a pas du tout fonctionné, constate Stéphane Galais, secrétaire général référent élevage de la Confédération paysanne : « Nous n’avons absolument pas vu l’efficacité de cette mesure sur le revenu des agriculteurs. Le SRP+10 sert surtout d’alibi pour ne pas prendre les bonnes mesures pour assurer la transparence des prix. Il camoufle l’absence de contrôles et de sanctions de l’État, qui ne joue pas son rôle d’arbitre. »
Dans son étude, l’UFC-Que choisir remarque ainsi que le revenu agricole a baissé en 2019, année de la mise en œuvre du SRP+10, pour trois filières étudiées (céréales, viande de porc et de bœuf) et stagné pour la filière laitière. Et quand les prix agricoles se sont envolés (+45 %) entre juillet 2020 et janvier 2023, les exploitations les plus fragiles n’ont pas réussi à compenser la hausse de leurs coûts de production. (...)
Pour l’UFC-Que choisir, cet échec est lié au rapport de force toujours déséquilibré entre un très grand nombre d’agriculteurs ou d’éleveurs, et un nombre très réduit d’industriels et d’enseignes de la grande distribution (...)
Autre facteur en cause : des sanctions insuffisantes en nombre et en valeur, qui « n’incitent pas les professionnels de l’aval à appliquer la loi ». Sur ce point, le nouveau texte apporte tout de même une petite avancée. Il prévoit une amende pouvant atteindre 0,4 % du chiffre d’affaires pour les distributeurs qui ne transmettraient pas les données demandées sur leurs gains. Jusque-là, ceux-ci n’encouraient que 375 000 euros d’amende. En termes de pourcentage du chiffre d’affaires des plus grandes enseignes, « on était à 0,0001 % du chiffre d’affaires » (...)