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Libération
Royaume-Uni : la renationalisation du rail votée au Parlement après les « performances inacceptables » du secteur privé
#servicespublics #RoyaumeUni #train
Article mis en ligne le 28 novembre 2024
dernière modification le 27 novembre 2024

Un clin d’œil du calendrier à la grève à la SNCF ce jeudi 21 novembre contre « la privatisation à basse intensité ». La loi pour renationaliser progressivement le rail au Royaume-Uni, où la plupart des compagnies ferroviaires ont été privatisées depuis trois décennies, a été approuvée par le Parlement britannique. Cette loi, promesse de longue date du parti travailliste, a reçu mercredi 20 novembre dans la soirée le feu vert de la chambre des Lords, la chambre haute du Parlement britannique, après un vote rejetant à une courte majorité un amendement de l’opposition conservatrice. Elle doit encore être promulguée par le roi.

La réforme fera passer les opérateurs privés dans le giron public à l’expiration de leurs contrats – ou plus tôt en cas de mauvaise gestion – et les regroupera dans un organisme nommé « Great British Railways ». Cela permettra, selon le gouvernement, d’éviter de payer des compensations aux exploitants actuels, dont les différents contrats expireront d’ici 2027.

Retards et billets trop chers (...)

Les opérateurs principaux en Ecosse et au Pays de Galles sont eux aussi redevenus publics récemment. Le syndicat ferroviaire TSSA a salué « un moment historique qui ouvre la voie au retour de nos chemins de fer dans le giron public, là où ils appartiennent, en tant que service vital ». Le rail britannique a connu une vague de grèves ces dernières années sous la pression de la crise du pouvoir d’achat provoquée par l’inflation.

Lire aussi :

 (Reporterre - septembre 2024)
Petite révolution au Royaume-Uni : le train va redevenir public

(...) Bilan mitigé de la privatisation

En 1993, le gouvernement conservateur de John Major dénationalisait British Rail, non sans peine quelques années après la frénésie de privatisations thatchériennes. L’objectif : améliorer la performance et réduire le déficit. British Rail a été fragmenté en une centaine d’entreprises privées : le réseau, le matériel roulant, le fret ont été confiés à des sociétés distinctes privées tandis qu’un système de franchises a été créé, distribuant l’exploitation des lignes de chemin de fer régionales à 25 opérateurs.

Au fil des années cependant, une renationalisation s’est amorcée. Dès 2002, après un désastre ferroviaire lié à un mauvais entretien des voies par les trop nombreuses entreprises privées — l’accident de Potters Bar a provoqué plusieurs morts et créé un scandale national —, le réseau ferré (Network Rail) est repassé sous le giron public. L’État a récemment repris « temporairement » le contrôle de cinq opérateurs privés de chemins de fer en raison de leurs performances médiocres ou de leur faillite (...)

Trente ans après la privatisation, le bilan est mitigé. D’un côté, les défenseurs du modèle assurent que le nombre de kilomètres-passagers a presque doublé, les infrastructures ont été modernisées — toutefois grâce à un soutien massif de l’argent public —, la sécurité sur les voies est devenue exemplaire, les sociétés sont devenues rentables. Les détracteurs pointent en revanche un manque de vision globale, un système trop complexe pour les usagers qui doivent utiliser plusieurs applications selon la ligne qu’ils prennent, des prix fluctuants et exorbitants — parmi les plus élevés d’Europe, qui ont augmenté de 20 % en termes réels en trente ans —, des retards voire des annulations fréquents. Ainsi, de mars 2023 à mars 2024, 681 trains ont en moyenne été chaque jour annulés.

Les exploitants, dont font d’ailleurs partie des entreprises ferroviaires publiques étrangères comme SNCF via Keolis et Deutsche Bahn via Arriva, sont accusés par les syndicats de faire du profit sur le dos des contribuables britanniques. S’agissant des sociétés louant le matériel roulant, l’organisation de régulation ferroviaire indique qu’elles ont versé plus de 400 millions de livres de dividendes (480 millions d’euros) à leurs actionnaires en 2022-2023, et ce en pleine crise du coût de la vie.

Une réforme populaire

La renationalisation du rail est très populaire chez les Britanniques : aujourd’hui, 76 % la soutiennent. (...)

D’autres sont toutefois sceptiques quant à un véritable changement. « Il ne faut pas s’attendre à une transformation radicale, mais à une amélioration constante, prévient Christian Wolmar, spécialiste du rail. Moins d’acteurs s’assoiront autour d’une table pour prendre des décisions sur la stratégie, les investissements, les tarifs, etc. Mais partageront-ils la même vision, parviendront-ils à faire baisser les prix ? Les chemins de fer seront un peu moins chers à exploiter, mais pas gratuits. »
« Pass climat »

Pour les écologistes, la nationalisation des trains ne va pas assez loin. Ils réclament un « pass climat » qui permette un déplacement illimité au prix de 49 livres (59 euros) par mois. Un rapport intitulé « Fare Britannia », que Greenpeace a commandé à Greengauge 21, souligne qu’un tel système générerait plus de 100 millions de voyages supplémentaires en train par an, économiserait 40 millions de trajets en voiture et réduirait les émissions d’environ 380 000 tonnes de carbone. Avec toutefois un manque à gagner pour l’État.

Or, le gouvernement ne promet pas des prix plus bas dans l’immédiat, mais « une garantie du meilleur tarif ». « Nous examinerons plus tard l’ensemble du fonctionnement de la billetterie, souligne Rachael Maskell, députée Labour du York Central. Ce que nous voulons garantir, c’est la qualité du service. (...)

British Rail ne ressuscitera pas sous son ancienne forme. Par exemple, Great British Railway continuera de louer le matériel roulant et les sociétés de fret resteront privées. (...)

en ligne de mire d’autres grands chantiers de nationalisation : l’eau et l’énergie.

 (FranceTVInfo/AFP Septembre 2024)
Le Royaume-Uni nationalise l’opérateur de son réseau électrique

La nouvelle entité est baptisée Opérateur national du système énergétique (Neso). Cela concrétise un projet de longue date pour reprendre la main sur ces opérations.

Lancement prévu le 1er octobre. Le gouvernement britannique a annoncé vendredi 13 septembre qu’il débourserait 630 millions de livres (746 millions d’euros) pour racheter l’opérateur du réseau électrique britannique ESO à l’entreprise privée National Grid.

La nouvelle entité, baptisée Opérateur national du système énergétique (Neso), "contribuera à connecter les nouveaux projets de production au réseau électrique", a fait valoir le gouvernement travailliste dans un communiqué publié conjointement avec l’entreprise. La création du Neso ainsi que le transfert dans le giron de l’Etat de l’opérateur du réseau (chargé de superviser l’équilibre entre l’offre et la demande) avaient été amorcés par le précédent gouvernement conservateur.
"Organisme unique" pour "superviser la planification stratégique"

National Grid conserve la propriété de ses réseaux physiques (c’est-à-dire notamment les câbles et les pylônes en Angleterre et au Pays-de-Galles), a précisé à l’AFP un porte-parole de l’entreprise. (...)