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Snipers franco-israéliens : « Ce qui est effarant, c’est qu’ils revendiquent leurs crimes de guerre à Gaza »
#israel #palestine #Hamas #Cisjordanie #Gaza
Article mis en ligne le 2 juillet 2025
dernière modification le 1er juillet 2025

Deux soldats franco-israéliens sont visés par une plainte de plusieurs ONG, déposée ce 1er juillet à Paris, pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide commis à Gaza. Ils sont accusés d’avoir participé à des exécutions sommaires au sein d’une unité baptisée Ghost Unit.

La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), qui regroupe 188 organisations dans 116 pays, a déposé une plainte avec constitution de partie civile auprès du pôle « crimes contre l’humanité » du tribunal judiciaire de Paris. Elle est accompagnée dans cette démarche par la Ligue des droits de l’Homme (LDH), l’Association France Palestine Solidarité (AFPS), ainsi que par les ONG palestiniennes Al-Haq, Al Mezan et le Palestinian Centre for Human Rights (PCHR). (...)

Deux noms apparaissent dans le dossier : Sasha A. et Gabriel B., snipers de nationalité franco-israélienne, membres d’une unité spéciale de l’armée israélienne. Selon les associations, les deux hommes sont impliqués dans des « atteintes volontaires à la vie constitutives de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide ». Le dossier repose notamment sur un reportage du journaliste palestinien Younis Tirawi et une série de témoignages recueillis par les ONG sur le terrain à Gaza.

La Ghost Unit, unité d’élite qui s’affiche et revendique ses actes (...)

Dans un documentaire de 38 minutes diffusé fin 2024, Younis Tirawi dévoile l’identité, les visages et les nationalités des membres de cette unité. Une photo de groupe, tirée des réseaux sociaux, révèle que près de la moitié des soldats possèdent une double nationalité, notamment française, belge, allemande, italienne et américaine. (...)

Mais ce qui est particulièrement frappant, c’est l’aveu filmé d’un sergent de l’unité, affirmant face caméra des tirs, parfois à plus d’un kilomètre de distance, sur des personnes non armées, le tout avec l’aval de ses supérieurs. « Ce qui est effarant, c’est qu’il revendique ouvertement les crimes de guerre. Il précise même tirer à proximité des hôpitaux. Tous les éléments constitutifs du crime sont là : c’est revendiqué, filmé, documenté », s’indigne Alexis Deswaef, avocat et vice-président de la FIDH.

Des témoignages accablants de victimes de snipers

Les éléments du reportage sont corroborés par des témoignages recueillis par des ONG à Gaza. (...)

Les témoignages, enregistrés par Al Mezan et d’autres ONG, pointent tous un même mode opératoire, dans les mêmes zones et périodes que celles ciblées par l’enquête. « Le recoupement de ces récits avec les faits documentés dans le reportage laisse penser que les soldats de la Ghost Unit pourraient être impliqués dans l’ensemble de ces crimes », explique Issam Younis, directeur d’Al Mezan.

Un objectif clair : briser l’impunité

Alors que la plainte cible deux individus précis, le dossier soulève une question bien plus vaste : celle du nombre et du rôle des Franco-Israéliens dans l’armée israélienne. Depuis le début des massacres, plusieurs centaines de citoyens binationaux, jusqu’à 4 000 ressortissants français, serviraient actuellement dans l’armée israélienne.

En décembre 2024, une plainte similaire avait déjà été déposée en France contre Yoel O., un sniper franco-israélien accusé de torture et d’exactions à l’encontre de prisonniers palestiniens. « À ce jour, aucune enquête n’a encore été ouverte », rappelle le communiqué de la FIDH. Ces procédures sont engagées pour rompre avec ce que les ONG dénoncent comme un cycle d’impunité judiciaire (...)

La plainte s’appuie sur le principe de compétence universelle prévu par le droit français. Comme le rappelle l’avocat, « en France, comme en Belgique, des ressortissants peuvent être poursuivis pour crimes de guerre ou contre l’humanité commis à l’étranger. Et ce, même en leur absence ».

Selon la FIDH, cette affaire présente une spécificité majeure : l’essentiel des éléments probants sont déjà disponibles au moment du dépôt de plainte. Entre les aveux filmés, les témoignages et les éléments de géolocalisation, les ONG estiment que la justice peut avancer rapidement. (...)

Pour une coordination judiciaire internationale

La plainte déposée ce mardi en France n’est que la première étape. Des procédures équivalentes seront engagées en Allemagne et en Italie, tandis qu’une enquête est déjà en cours en Belgique contre un membre de la Ghost Unit. En Colombie, la Hind Rajab Foundation a déjà déposé une plainte pénale contre un des deux hommes, Gabriel B., repéré sur son territoire. (...)

Les ONG appellent à une coordination européenne des enquêtes. (...)

Si les suspects restent en Israël, ils ne seront pas réellement inquiétés. Mais pour la FIDH, une condamnation ne serait pas seulement symbolique. « Ils ne pourraient plus sortir d’Israël sans risquer une arrestation immédiate dans un autre pays. Et un jour, même en Israël, un changement de pouvoir pourrait les rattraper. »

La plainte pourrait aussi ouvrir la voie à des enquêtes sur la chaîne de commandement, puisque les snipers affirment avoir agi sur ordre hiérarchique. Un organigramme militaire de la Ghost Unit serait en cours de reconstitution par les ONG, en vue de remonter vers les donneurs d’ordres. (...)