Un an après la chute du régime de Bachar al-Assad, l’Union européenne a mis à jour ses orientations en matière d’asile. Les changements annoncés pourraient avoir des conséquences sur les demandes de protection d’environ 110 000 Syriens qui attendent toujours une décision.
L’Agence de l’Union européenne pour l’asile (EUAA) a publié une mise à jour complète de ses orientations sur la Syrie.
Le nouveau guide "présente une évaluation des besoins en matière de protection internationale découlant de l’évolution de la situation en Syrie", indique un communiqué de presse du 3 décembre.
Ces orientations ont pour but d’aider les autorités nationales à évaluer les demandes d’asile des Syriens et de "favoriser la convergence des décisions en matière d’asile au niveau de l’UE".
Les nouvelles orientations estiment notamment que "les personnes à risques liés au service militaire, comme pour les déserteurs, ainsi que les autres opposants à l’ancien régime d’al-Assad, ne sont plus exposées à un risque de persécution".
Catégories de personnes susceptibles d’être encore exposées à des risques
Certaines catégories de personnes restent toutefois exposées à des risques et pourraient prétendre au statut de réfugié, en fonction de l’évaluation de leur situation individuelle.
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Les catégories de personnes qui ne seront probablement pas éligibles à la protection
Il existe également des catégories de personnes qui ne pourront éventuellement plus prétendre à un statut de protection :
- Les personnes qui demandent la protection pour éviter d’être enrôlées dans une force armée qu’elles jugent contraire à leurs valeurs.
- Les Arabes sunnites, "pour le simple fait d’être des arabes sunnites".
La situation sécuritaire s’est "améliorée mais reste instable"
Selon les nouvelles directives, la situation sécuritaire en Syrie s’est désormais "améliorée mais reste instable".
Les violences aveugles persistent, mais elles sont considérées comme "peu importantes" dans la plupart des régions qui composent la Syrie. L’agence estime qu’il n’y a "aucun risque réel de préjudice grave dans le gouvernorat de Damas". (...)
L’UE évalué le gouvernement de transition
Les nouvelles orientations se penchent aussi sur le gouvernement de transition syrien. Bien que ce dernier "ait progressé dans la consolidation des structures officielles et l’intégration de certains groupes armés, il ne peut être considéré comme un acteur unifié. Son autorité est fragmentée, son contrôle sur les factions armées est incomplet et l’autonomie régionale/locale persiste dans de nombreuses zones. La légitimité et l’efficacité du gouvernement sont aussi remises en cause par la violence persistante, les tensions sectaires et la présence d’acteurs non étatiques et extérieurs puissants", écrit l’EUAA. (...)
Le guide de l’agence souligne que "les forces de sécurité affiliées au gouvernement de transition ont commis de nombreuses violations graves des droits humains, telles que des arrestations arbitraires, des détentions secrètes, des meurtres, des actes de torture et des mauvais traitements à l’encontre d’individus, notamment des personnes associées à l’ancien gouvernement syrien et des personnes soupçonnées d’avoir des liens avec l’Etat islamique".
Des centaines de civils ont été tués, dont la plupart étaient des alaouites, la minorité religieuse à laquelle appartenait l’ancien président Bachar al-Assad.
Autres menaces
L’organisation de l’Etat islamique continue à représenter une menace dans certaines parties du pays, principalement dans le nord-est. Des attaques sporadiques du groupe djihadiste contre les forces fidèles du gouvernement de transition, mais aussi contre des civils dans le gouvernorat de Deir Ezzor (dans l’est de la Syrie), ont également été signalées. (...)
Il existe également des réseaux d’anciens hauts responsables militaires et des services de renseignement de l’ère Assad qui ont formé "de nouveaux groupes... visant à combattre le gouvernement de transition". Certaines de ces factions opèrent dans les régions côtières de la Syrie.
Enfin, des puissances étrangères sont accusées de mener des opération militaires en Syrie. Il s’agit notamment de l’armée israélienne, de la Turquie et des États-Unis. (...)
En outre, des gangs criminels, des hommes armés non affiliés et d’autres groupes armés auraient également commis des violations des droits humains et des actes de vengeance meurtriers. Aussi, ont été signalés des cas de traite de femmes et de filles, "notamment à des fins d’exploitation sexuelle".
Évaluation des risques et des besoins de protection des personnes
Le document d’orientation propose aux Etats d’évaluer les risques encourus par une personne sur la base des questions suivantes : "Les actes signalés constituent-ils une persécution ? Quel est le niveau de risque de persécution ? Y a-t-il un motif de persécution ?" (...)
Les forces de sécurité dirigées par le gouvernement de transition sont jugées "incapables de répondre efficacement aux meurtres par vengeance, aux enlèvements et aux pillages". (...)
En revanche, les conditions de sécurité, qui peuvent certes varier en fonction des individus, sont globalement satisfaisantes dans la ville de Damas. Il est également possible de se rendre à l’aéroport international de la capitale et à celui d’Alep, et de rejoindre ainsi sans problème dans les zones sûres, explique l’EUAA. La liberté de circuler à l’intérieur du pays s’est également améliorée depuis la chute du régime al-Assad et aucune obstruction en ce sens n’a été signalée.