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Nouvel Obs/Un collectif/Tribune
Caroline Fourest, finaliste du prix Femina : le vertige du backlash anti-MeToo
#prixFemina #CarolineFourest #MeToo #feminisme #femmes
Article mis en ligne le 5 novembre 2024

Considérant que le jury du prix Femina a retenu cette année parmi les finalistes l’essai de Caroline Fourest intitulé « le Vertige #MeToo »,

Considérant les nombreux manquements à l’exactitude et à la vérité dans les écrits de Caroline Fourest révélés depuis des années, mais aussi dans ce dernier ouvrage,

Considérant en outre que c’est à tort que Caroline Fourest, p. 36, évoque « la violence des papiers de Mona Chollet contre [elle] dans “le Monde diplomatique” », « pour avoir dénoncé le double discours de Tariq Ramadan », alors que celle-ci, qui ne lui a jamais consacré une ligne dans ce journal, a critiqué dès 2003 la participation de Tariq Ramadan au Forum social européen,

Considérant que c’est à tort que Caroline Fourest écrit, p. 111, qu’Iris Brey, en parlant de « culture du viol à la française », fait « comme si la France n’abritait que des complices et l’Amérique que des féministes », alors qu’au contraire ce concept, forgé aux Etats-Unis, n’a vraiment été appliqué à la France que depuis l’essai de Valérie Rey-Robert en 2019,

Considérant que c’est à tort que Caroline Fourest, p. 131, conteste la déclaration d’Anouk Grinberg « tous ceux qui ont travaillé avec Depardieu dans le cinéma savent qu’il agresse les femmes », en estimant que « la réalité est toujours plus compliquée », alors qu’il n’est pas possible de réduire à « de simples abus de langage » des mains aux fesses, sur les seins ou le sexe, parfois dans la culotte, au vu et au su de toutes et tous,

Considérant que c’est à tort qu’il est écrit, p. 214-217, que Muriel Salmona serait « psychanalyste », qu’elle aurait été la « thérapeute » de Nadège Beausson-Diagne, que sa pratique relèverait de la « thérapie suggestive », et que Caroline Fourest, au prix d’une confusion entre la psychanalyse du refoulement et la psychiatrie du traumatisme, l’accuse de recourir à un concept d’ailleurs inexistant, la « mémoire traumatique refoulée »,

(...)

Considérant que Caroline Fourest, n’ayant jamais contacté aucune des signataires de ce texte pour vérifier ses informations avant de les mettre en cause, n’a pas mené une enquête journalistique,

Considérant que ces manquements à l’exactitude et à la vérité, qu’il n’a pas été possible de recenser de manière exhaustive, trahissent un parti pris idéologique contraire à la neutralité affichée,

Considérant que, pour « entendre le point de vue des accusés », Caroline Fourest s’est contentée de relayer celui des « garçons terrifiés par MeToo » et de consoler des « taureaux blessés », et que son essai relève en conséquence de la plaidoirie en défense,

Considérant que, dans le même temps, Caroline Fourest discrédite trop souvent le point de vue des victimes,

(...)

Considérant que Caroline Fourest, pour qui il existe aussi une « emprise bénéfique », ainsi qu’une « coresponsabilité du bourreau et de la victime », ignore tout des travaux féministes contre les violences sexuelles et sexistes, et qu’elle parle constamment de « gestes déplacés » ou même de « manque de tact » pour des faits qui pourraient relever de l’agression ou du viol, au mépris du principe qu’elle martèle, « toutes les violences sexuelles ne se valent pas »,

Considérant que Caroline Fourest, qui condamne le tribunal médiatique, loin de s’en remettre à la justice, s’autorise à trancher d’une affaire avant le jugement ou décide qu’un cas aurait été « mal jugé », et, sans avoir accès au dossier, incrimine ou disculpe à son gré,

Considérant que la revendication de nuance est démentie lorsque Caroline Fourest intitule un chapitre « La guillotine » ou répète le mot « bûcher », « médiatique » ou « des célébrités », et va jusqu’à dresser une comparaison avec « le nazisme et l’Inquisition »,

Les signataires concluent que participer en 2024 à la promotion de l’essai de Caroline Fourest, après avoir récompensé en 2023 « Triste Tigre », de Neige Sinno, apparaîtrait immanquablement, dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, comme un retour en arrière, ou backlash, et invitent donc le jury du prix Femina à ne pas confondre féminin et féministe.

Signataires :

Laurence Berek, éducatrice spécialisée
Caroline Bonmarchand, productrice
Iris Brey, autrice et réalisatrice
Mona Chollet, autrice
Caroline De Haas, militante féministe
Hélène Devynck, journaliste, écrivaine,
Judith Godrèche, actrice, scénariste et réalisatrice
Anouk Grinberg, comédienne
Louison Lume
Aïssa Maïga, actrice et réalisatrice
Florence Porcel, autrice
Sandrine Rousseau, députée écologiste
Muriel Salmona, psychiatre