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Un rapport épingle les centres de rétention italiens en Albanie
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Article mis en ligne le 8 août 2025

Selon un rapport de l’ONG Action Aid et de l’université italienne de Bari, l’externalisation des procédures d’asile par les autorités italiennes dans des centres de rétention en Albanie sont coûteux et inefficaces.

Les centres de rétention pour migrants en attente de leur expulsion (CPR) situés en Albanie sont les "plus coûteux" de tous les centres CPR gérés par l’Italie, révèle un nouveau rapport publié par l’ONG Action Aid, en collaboration avec l’université italienne de Bari (UniBari).

Ces centres - équivalents aux centres de rétention administrative (CRA) français - sont aussi "les plus inhumains et les plus inefficaces de l’histoire de la politique migratoire italienne", d’après les auteurs du rapport qui ont travaillé sur des données provenant de 14 centres de rétention en Italie et en Albanie. (...)

Le rapport a examiné les coûts des centres albanais jusqu’en mars 2025, avant qu’ils ne commencent à fonctionner comme centres d’expulsion pour les personnes ayant déjà reçu un avis de quitter l’Italie.

Près de 74 millions d’euros ont été versés pour les contrats de construction du centre de Gjader, doté de 400 places en mars 2025, ainsi que du centre de traitement des procédures qui se trouve dans le port de Shengjin. Chaque place d’hébergement a ainsi coûté plus de 153 000 euros en travaux. (...)

Le rapport indique également que la préfecture de Rome a versé 570 000 euros à la société Medihospes, qui gère les CPR en Albanie, pour cinq jours d’activité opérationnelle effective entre octobre et décembre 2024 pour détenir 20 personnes.

Une somme dépensée en pure perte car toutes ont été libérées et renvoyées en Italie dans les heures ou les jours qui ont suivi leur arrivée.
La rétention à Gjader est "irrationnelle et illogique"

En raison de retards dans les travaux de rénovation et des "dommages continus", le centre de Gjader fonctionne à moins de 50 % de sa capacité. Fabrizio Coresi, expert en migration chez Action Aid, estime que "la tentative d’utiliser le CPR de Gjader pour essayer de détenir les migrants en situation irrégulière présents en Italie semble être une décision irrationnelle et illogique". "La détention des personnes ne fait qu’augmenter les coûts économiques et humains du rapatriement", ajoute le chercheur.

Le gouvernement italien affirme pourtant que le CPR en Albanie rend le système de retour "plus efficace".

Une affirmation contredite par le rapport selon lequel 2024 a marqué un "creux historique" pour l’Italie concernant le nombre de personnes effectivement expulsées. (...)

Changement historique et menace pour les droits humains

De son côté, Giuseppe Campesi, de l’université de Bari, explique que "le recours à la détention comme instrument de la politique d’asile marque un changement historique qui soulève de sérieuses questions quant à savoir si l’utilisation d’un tel instrument menace ou non les droits humains".

Les auteurs du rapport décrivent un système de rétention des migrants "ingérable et structurellement violent" qui "fait fi des droits fondamentaux". Ils rappellent également des chiffres inquiétants. En 2024 et au cours des trois premiers mois de 2025, trois migrants sont décédés dans des centres de rétention. Depuis leur mise en place en 1998, plus de 30 personnes y sont mortes.

Giuseppe Campesi rappelle également que des juges ont par le passé suspendu des décisions de rétention ou ont renvoyé les nouvelles politiques appliquées par le gouvernement Meloni devant des tribunaux au niveau européen.

À la suite des procédures judiciaires, le nombre de personnes détenues puis libérées sur décision des juges est passé de 9 % en 2021 à 29 % en 2024, note le chercheur.

Au cours des deux dernières années, 186 personnes se sont retrouvées en rétention avant d’être libérées parce qu’elles avaient le droit de rester en Italie. (...)

L’opposition exige des excuses au gouvernement

L’an dernier, le système de rétention des migrants a coûté près de 96 millions d’euros à l’État italien, soit plus que le total dépensé au cours des six années précédentes, selon les auteurs du rapport. Environ 58 % des coûts ont été consacrés à l’équipement et à l’entretien des centres.

Le coût annuel moyen estimé d’un de ces centres est d’environ 2,5 millions d’euros, frais d’entretien compris. Le coût moyen d’un lit dans un CPR est estimé à près de 33 000 euros par an. Les auteurs du rapport qualifient d’"hors de contrôle" le système de détention actuel et en particulier ses coûts.

Après la publication du rapport cette semaine, Elly Schlein, la cheffe du parti démocrate, dans l’opposition, a estimé que "Georgia Meloni [devait] présenter ses excuses aux Italiens". "Les chiffres concernant les coûts de son opération illégale en Albanie sont une insulte aux millions de personnes qui luttent pour survivre", a dénoncé la responsable politique.