
Via l’opération #MonMaire, vous nous avez signalé que la municipalité d’Athis-Mons, dans l’Essonne, avait supprimé en 2017 l’aide financière qu’elle apportait à l’association, "laissant 700 familles sur le carreau".
Une fois enjambés les énormes blocs de pierre, il faut encore faire attention aux morceaux de ferraille cachés sous les feuilles tombées au sol. Un coup à se tordre une cheville. Le bâtiment qui nous fait face, du moins ce qu’il en reste, a abrité jusqu’au printemps 2017 les Restos du cœur d’Athis-Mons, ville de plus de 30 000 habitants située au sud de l’aéroport d’Orly. Mais aujourd’hui, le toit de cette construction s’est envolé, les portes se sont volatilisées et les fenêtres ont disparu.
Il y a un peu plus de deux ans, la mairie d’Athis-Mons a en effet décidé de ne pas renouveler l’aide financière qu’elle apportait jusque-là à l’association fondée par Coluche. Une enveloppe annuelle d’environ 25 000 euros, selon plusieurs sources interrogées par franceinfo, qui permettait à la structure de payer ses factures d’électricité et d’eau, ainsi que son loyer à la Direction générale de l’aviation civile, propriétaire des lieux.
Symboliquement, c’est difficile à justifier comme décision. Sans ce coup de pouce municipal, l’association n’avait plus de quoi survivre. (...)
A l’époque, la maire de la ville justifiait son coup de rabot dans les colonnes du Républicain de l’Essonne. "La municipalité a toujours été aux côtés des Restos du cœur, affirmait Christine Rodier, élue sous les couleurs du parti Les Républicains. Mais nous ne pouvions plus subvenir au paiement des redevances du fait de la baisse des dotations de l’Etat et nous étions la seule commune à financer leurs charges." Dit autrement, ce n’est pas à Athis-Mons d’assumer seule ces dépenses... qui profitent aussi aux habitants des communes voisines. (...)
La soixantaine de bénévoles qui faisaient vivre les locaux de la rue Henri-Gourmelin ont encore "en travers de la gorge" la fermeture du site. (...)
Officiellement, les bénéficiaires d’Athis-Mons ont été reroutés vers les Restos du cœur d’Evry, soit à une quarantaine de minutes de transport environ. "Au début, certains bénéficiaires ont tenté de faire le trajet. Mais quand vous devez trimbaler des cabas remplis de boîtes de conserve, c’est trop loin, trop compliqué, s’agace Joël. Dans les faits, peu de monde y va, vous lâchez vite l’affaire."
La vérité, c’est qu’on a perdu trace de la plupart des familles. On ne sait pas ce qu’elles sont devenues, on ne sait pas comment elles s’en sortent aujourd’hui.Joël, bénévole aux Restos du cœurà franceinfo
A écouter Joël, "aucun plan B n’a véritablement été abordé pour que l’activité puisse continuer. On nous a dit un jour ’c’est fini’ et il a fallu s’y plier". A dire vrai, la municipalité a quand même créé une épicerie sociale tout près de la gare, fin 2018. "OK mais ce n’est pas la même chose, regrette le bénévole accoudé à l’ancienne boîte aux lettres des Restos, dont on se demande comment elle tient encore debout. Pour y être accepté, il faut habiter la ville et connaître une situation précaire, mais pas depuis longtemps." (...)
Contacté par franceinfo, le bureau national des Restos du cœur a fait savoir qu’il préférait ne pas répondre à nos questions, maintenant que la campagne hivernale de l’association est lancée. Impossible donc de savoir combien de structures locales sont obligées de compter leurs sous un peu partout en France. Il faut dire que la question des aides financières ou matérielles accordées aux associations à visée sociale est délicate. (...)
C’est justement pour garder "une indépendance totale" que le Secours populaire recommande depuis toujours à ses antennes de "ne pas se limiter à une seule source de financement." Au contraire, "il faut des ressources diversifiées, répète Mario Papi, son trésorier national. On peut citer les collectivités locales, l’Etat, les dons des citoyens aussi... Si l’une d’elles nous fait faux bond pour X raisons, on a de quoi se retourner. Et l’activité peut continuer, sans que ça fasse polémique." Au cœur de la cité de l’Air d’Athis-Mons, ce sont les engins de chantier qui risquent de faire du bruit prochainement : en lieu et place des locaux historiques des Restos du cœur, 1 400 logements vont sortir de terre dans les années à venir.