
Promiscuité, violences, prolifération de rats, absence de soins : le constat adressé par la Contrôleure des prisons au gouvernement est sans précédent.
C’est une lecture édifiante qu’offre mercredi 14 décembre le Journal officiel. La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté fait usage de la procédure d’urgence pour alerter publiquement le gouvernement sur la situation de la maison d’arrêt des hommes de Fresnes.
Entre la surpopulation carcérale, la prolifération des punaises et des rats, le délabrement des locaux, le « climat de violence constant qui règne » et un « usage de la force [à l’égard des détenus] ni maîtrisé ni contrôlé », on pourrait penser qu’il s’agit d’un rapport sur les geôles d’un pays peu recommandable. Cela se passe dans le Val-de-Marne, à 7 km des portes de Paris, dans la seconde plus grande prison de France.
A l’issue d’une visite effectuée dans cet établissement par douze contrôleurs du 3 au 14 octobre, « un nombre important de dysfonctionnements graves » ont été constatés. Adeline Hazan, la Contrôleure générale, estime ainsi que « les conditions de vie des personnes détenues constituent un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ». (...)
C’est aussi que le personnel est en nombre insuffisant. « Les contrôleurs ont été en permanence témoins du travail effréné des surveillants soumis à une pression constante qui les empêche de faire face à leur programme. » En quatre ans, le nombre de surveillants est resté stable à Fresnes, mais 70 % seraient stagiaires sortis d’école. Dans le même temps, le nombre de détenus augmentait de 20 % et l’effectif d’encadrement baissait. 30 % des postes d’officiers seraient aujourd’hui vacants. Résultat, certains détenus sont privés de soins, de visite ou de travail faute de personnel suffisant pour gérer les mouvements internes.
Autre conséquence du sous-encadrement et du manque d’expérience des surveillants, la « discipline rigide » de Fresnes, « autrefois objective et ferme, est devenue illisible et brutale ». (...)
Dans cette triste litanie, Mme Hazan remarque que « l’anomalie la plus grave, tant pour les personnes détenues que pour le personnel », vient de l’état d’hygiène « déplorable » de la prison. Les rats prolifèrent, jusque dans le lit d’un surveillant de permanence… « L’odeur persistante de leur pelage, de leurs excréments et de leurs cadavres, s’ajoute à celle des amas d’ordures qui jonchent les pieds des bâtiments », relate-t-elle.
Le 6 octobre, l’Observatoire international des prisons obtenait du tribunal administratif de Melun une décision ordonnant à l’Etat d’intensifier la lutte contre les rats à Fresnes. La Contrôleure affirme que la situation est telle que la France risque une sanction de la Cour européenne des droits de l’homme. (...)