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Accablées de paperasse, méprisées par leur ministre, négligées par les mairies : le quotidien des directrices d’écoles
Article mis en ligne le 13 janvier 2022

Tous les syndicats de l’éducation nationale appellent à faire grève ce 13 janvier. Les directeurs et directrices d’école y participent massivement, poussés à bout par une charge de travail grandissante et des injonctions contradictoires.

Le téléphone sonne souvent dans le vide à l’école maternelle Halphen de Ville-d’Avray dans les Hauts-de-Seine. Il n’y a plus de gardienne depuis 2018, plus d’aide administrative depuis 2017. Alors « quand ça sonne et que toutes les enseignantes et les ATSEM [1] sont en classe, il n’y a parfois personne pour répondre », commente Marie Viennot, la directrice.

Dans le Vaucluse, à Cavaillon, le téléphone de l’école maternelle Jean Moulin sonne lui aussi dans le vide trois jours par semaine. Les lundis, mardis et vendredis, la directrice Lauranne Giovanelli est dans sa classe avec ses élèves et refuse de prendre le téléphone sous peine de devoir s’interrompre en permanence. C’est seulement le jeudi qu’elle décroche car elle est dans son bureau pour effectuer son « jour de décharge » hebdomadaire. Directrice depuis huit ans, elle dispose d’un jour par semaine pour effectuer le travail lié à sa fonction de directrice.

« C’est vraiment problématique que les parents ne puissent pas joindre l’école », déplore-t-elle. Ici aussi, il n’y a plus d’aide administrative qui réponde au téléphone et aux mails, ouvre la porte, fasse les photocopies, etc. C’est le cas dans de nombreuses écoles depuis que le gouvernement a pris la décision de réduire le nombre de contrats aidés en 2017. La charge de travail d’une direction d’école s’en est trouvée considérablement alourdie. (...)

Ils sont aujourd’hui 45 500 enseignants à exercer la fonction de directeur d’école. Dotés d’un minimum de deux ans d’ancienneté, ils sont nommés par leur hiérarchie. En plus de leur salaire, ils touchent une indemnité qui augmente proportionnellement au nombre de classes de l’école. Ainsi, selon les calculs du Sgen-CFDT, un professeur des écoles directeur d’une école de deux à trois classes, touchera une indemnité de 299,6 euros par mois. Dans une école d’au moins dix classes, son indemnité sera de 444,39 euros par mois. Suivant la taille de l’établissement, le directeur continue ou non d’enseigner. Il est chargé de la coordination de l’équipe enseignante sans pour autant être le supérieur hiérarchique de ses collègues. (...)

« Je passe ma journée à ouvrir la porte, trier la paperasse, répondre à des mails et au téléphone, remplir des enquêtes » (...)

Depuis la consultation du ministère en 2019, la crise sanitaire est venue accroître encore la charge de travail. Les directeurs d’école sont chargés de la mise en place des mesures de sécurité édictées par le ministère de l’Éducation nationale. (...)

Ce qui pèse aussi sur la fonction, ce sont toutes ces informations qui doivent être mises en place du jour pour le lendemain. Alors qu’on est déjà dans une espèce d’urgence, on est submergés d’informations contradictoires, avec une hiérarchie qui découvre la veille pour le lendemain les annonces du ministre sur BFM ou dans la Foire aux questions du site du ministère. » Les directeurs doivent désormais rédiger des « plans de continuité pédagogique » expliquant comment l’école s’organisera pour maintenir le lien entre l’élève qui devrait s’absenter et son enseignant. « On considère que parce que c’est écrit, ça va être effectif et que l’école met les moyens pour que ça le soit. Alors qu’on sait que ça ne va servir à rien », déplore Sabine Duran. (...)

Les directrices font l’interface avec la mairie, les parents, les collègues, la hiérarchie… (...)

Au final, ceux qui ont choisi de se tourner vers cette fonction de directeur pour impulser des projets et animer une équipe ne peuvent plus y consacrer autant de temps qu’ils le souhaiteraient. La multiplication des protocoles sanitaires et des récentes inconséquences ministérielles ne constituent que « la goutte d’eau qui fait déborder le vase ».