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Affaires Assange – “Les masques sont tombés”
Article mis en ligne le 17 juin 2019

Une semaine après la décision de la justice suédoise de ne pas extrader Julian Assange, son avocat, Juan Branco, nous explique où en est l’affaire : une “page qui se tourne”, mais le combat n’est pas terminé.

Un tribunal suédois a décidé de ne pas tenir compte des réquisitions du parquet concernant la demande d’arrestation de Julian Assange, actuellement en détention à Londres. Selon son avocat, Juan Branco, “la page Suède est tournée”. “Ça a permis de faire tomber le masque des réelles motivations des États-Unis pour extrader Assange, dit-il. On a dû se battre pendant des années pour expliquer que ce n’était pas qu’une question d’affaires suédoises et de résidence surveillée qui étaient les seuls motifs de ces poursuites. En fait, c’était les États-Unis et les révélations Wikileaks. Il a fallu d’abord détruire sa réputation pour le poursuivre après.” Le lanceur d’alerte faisait l’objet d’une demande d’extradition de la Suède pour l’interroger dans une affaire de viol et d’agression sexuelle. Les juges ont considéré que les enquêteurs suédois pouvaient l’interroger à Londres dans le cadre du mécanisme de coopération européenne lors d’enquêtes pénales. Il n’y aura donc pas de mandat d’arrêt européen contre le lanceur d’alerte, mais l’enquête pourra continuer. Les États-Unis, quant à eux, espèrent toujours l’extrader.
Que reproche-t-on à Julian Assange ? (...)

Pas tiré d’affaire

Cette décision du tribunal suédois est une mauvaise nouvelle pour l’accusation, qui espérait que Julian Assange soit extradé avant la prescription des faits, en août 2020. L’accusation peut faire appel en se basant sur une partie de la décision du tribunal, qui juge fondés “les soupçons visant Julian Assange”. Néanmoins, cette décision est, pour l’avocat pénaliste David Koubbi, “une preuve de l’indépendance de la justice suédoise”. Selon Me William Julié, spécialiste entre autres de l’extradition, “si les Suédois ont préféré ne pas faire de mandat d’arrêt européen c’est pour éviter de se mettre en porte à faux avec les États-Unis. Ils savent où est Assange et peuvent continuer l’enquête. Cela arrange les États-Unis, ça aurait compliqué leur tâche de pouvoir obtenir Assange”.

Son avocat, Juan Branco, estime qu’“on a trop spéculé sur les relations États-Unis–Suède”. “C’est seulement pour les révélations Wikileaks que les États-Unis veulent l’extrader, maintient-il, et on se battra jusqu’au bout pour empêcher cela.”

Si Julian Assange n’est pas, à l’heure actuelle, extradé en Suède, rien ne garantit qu’il ne le sera pas un jour. Si l’enquête avance, le tribunal pourra potentiellement revenir sur sa décision s’il est de nouveau saisi. Londres devra faire un arbitrage entre les États-Unis et la Suède, qui veulent tous deux récupérer l’Australien. Pour Jean-Philippe Foegle, juriste à la Maison des lanceurs d’alerte, “il est fort probable que les autorités anglaises le laissent finir ses cinquante semaines de détention avant de décider de l’extrader aux États-Unis. De plus, s’il est extradé puis jugé en Suède, rien n’empêche qu’il soit ré-extradé juste après. Cela relance le débat sur les garanties d’un procès équitable aux États-Unis”.

Juan Branco estime que les conditions de détention de son client à Londres ne sont pas normales : “Il a droit à deux parloirs par mois. Il a un accès très limité à ce qui se passe. Il est difficile pour lui de savoir où en est le monde extérieur. Il est incarcéré dans des conditions de détention dignes des terroristes. Il est enfermé vingt-trois heures sur vingt-quatre. Le niveau de stress est énorme, mais il tient admirablement. Le représentant sur les questions de torture de l’Onu a déclaré qu’il faisait état d’une détention digne de torture. Ce n’est pas rien.” (...)

Mise à jour à 14h : le tribunal anglais a déclaré qu’il statuerait sur l’extradition de Julian Assange vers les États-Unis en février 2020.