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le Monde
Attaque à Paris : Youssef, le « deuxième suspect », mis hors de cause, raconte comment il a tenté d’arrêter l’assaillant
Article mis en ligne le 27 septembre 2020

Présenté comme le « deuxième suspect » de l’attaque perpétrée devant les ex-locaux de « Charlie hebdo », il raconte au « Monde » comment il a tenté d’arrêter l’assaillant avant d’être lui-même pris à tort pour un complice. (...)

Il a été libéré dans la nuit de vendredi à samedi, après avoir été totalement mis hors de cause. « Son récit est tout à fait crédible, il n’est pas du tout connu de nos services », confie une source policière haut placée. Aucune charge n’est retenue contre lui. Le Monde l’a rencontré longuement, samedi 26 septembre, en compagnie de son avocate, Me Lucie Simon.
Il raconte, presque comme une mauvaise farce, l’enchaînement des événements. Son récit est régulièrement interrompu par ses deux frères et son meilleur ami, qui semblent réaliser plus que lui la gravité de la situation dans laquelle il s’est retrouvé. Il est aux alentours de midi quand cet ouvrier quitte son frère qui travaille dans un immeuble non loin de la rue Nicolas-Appert.

« J’ai entendu les cris d’une femme »

« J’étais en train d’entrer dans ma voiture, quand j’ai entendu les cris d’une femme. Je regarde dans mon rétroviseur pour voir ce qui se passe, puis je sors de ma voiture et j’entends cette fois un homme qui crie : “Non, non, non !” A ce moment-là, je vois un mec suspect qui court en direction du métro Richard-Lenoir, je suis parti directement pour le suivre. »
(...)

Youssef pense qu’il s’agit d’une agression. « Dans ma tête, je vais essayer d’attraper la personne qui a fait ça », explique-t-il. « Ce n’est pas la première fois qu’il fait ce genre de choses », ajoute son grand frère, avec un mélange de fierté et d’inquiétude.
Youssef voit l’individu se débarrasser d’un « grand couteau ». I
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« Ensuite, je voulais aller voir les victimes, mais un policier m’a dit : “Tu dégages !” J’ai raconté que j’avais suivi le mec. Ils m’ont d’abord dit de laisser mon numéro de téléphone. Ensuite, un policier m’a dit de me mettre contre le mur, il m’a fait une fouille. Un de ses collègues lui a dit de me lâcher, que je n’avais rien fait. » Youssef quitte alors les lieux en voiture. Il veut aller chercher son portefeuille avec sa pièce d’identité pour pouvoir témoigner. (...)

Arrivé sur les lieux, il approche un policier. « Il a appelé son chef, ils avaient ma photo. Ils sont venus autour de moi, ils étaient une dizaine. Ils m’ont emmené dans le métro. Ils m’ont demandé de regarder en direction des caméras pour prendre mon portrait, ils m’ont aussi pris en photo avec leurs téléphones. Puis ils m’ont mis des menottes. J’en entends un qui dit en chuchotant : “On l’a chopé.” Je lui réponds : “Vous m’avez pas du tout chopé, c’est moi qui suis venu pour témoigner !” »
Deux policiers s’approchent de lui pour lui notifier sa garde à vue et lui demandent de signer un document. Youssef ne comprend pas ce qui lui arrive. « Ils me demandent si je veux prendre un avocat, mais moi je ne voulais pas, je n’ai rien fait, je n’ai pas besoin d’avocat ! » La brigade de recherche et d’intervention arrive sur les lieux. « Ils étaient plus violents, eux, ils refusaient de me parler. Moi, j’essayais d’expliquer : “Je veux bien vous suivre où vous voulez pour raconter l’histoire, mais il n’y a pas besoin des menottes.” » Les policiers lui placent un masque anti-Covid sur le bas du visage, un masque occultant pour cacher les yeux et lui rabattent sa capuche sur la tête. « Avant de sortir du métro, ils ont parlé entre eux, en demandant : “Est-ce qu’ils sont là ?” Ils parlaient des journalistes. Ils voulaient que ça se voit qu’ils avaient arrêté quelqu’un. »
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