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Au Japon, un opposant aux déchets de Fukushima a été arrêté
Article mis en ligne le 8 janvier 2013

En décembre, Masaki Shimoji a été arrêté par la police d’Osaka. Cet universitaire s’oppose à la dispersion de déchets radioactifs de la région de Fukushima vers d’autres régions du Japon.

Le dimanche 9 décembre 2012 que la police du département d’Osaka a arrêté Masaki Shimoji, professeur associé de finance publique à l’université Hannan. (...)

Trois délits sont allégués à Masaki Shimoji : « violation de la loi sur les services de chemin de fer », « obstruction vigoureuse au bon déroulement des affaires » et « violation de propriété ». Les faits reprochés à Masaki Shimoji remontent au 17 octobre 2012, jour où il a participé à une manifestation d’opposition à la dissémination des débris radioactifs (et accessoirement chargés en amiante) du Tohoku, devant une des entrées de la gare d’Osaka, puis traversé la même gare pour rejoindre la mairie. (...)

Selon l’association des « Citoyens contre la dissémination des matériaux radioactifs », une telle arrestation est « illégale », et Masaki Shimoji « devrait être relâché immédiatement », considérant qu’il s’agit d’ « une grossière tentative d’intimidation exercée sur les citoyens opposés à la dissémination nationale des matériaux radioactifs ».

Cette association est en lutte contre le programme gouvernemental visant à « partager la charge entre tous », programme qui consiste à convaincre les gouvernements locaux d’accueillir au plus vite une part des débris afin de commencer les opérations d’incinération dès février 2013. Plusieurs villes, dont Osaka, ont déjà mené des tests d’incinération considérés comme « sans problème pour la sécurité » par les autorités bien que contestés par les résidents.

Selon le Mainichi du 18 septembre 2012, la ville de Kitakyushu dans le sud du pays, accueille depuis septembre 2012 des débris contaminés acheminés par bateau par l’entreprise Kajima dans le cadre d’un contrat de 2 milliards de yens (20 millions d’euros) depuis le Tohoku afin de les incinérer. (...)

Outre son investissement auprès des familles de réfugiés du nucléaire - on compte environ 6000 déplacés, forcés ou volontaires, originaires du département de Fukushima, et déclarés dans la mégalopole de Kobe, Kyoto, Osaka -, Masaki Shimoji a pris activement part à la campagne d’opposition aux différents projets des grandes agglomérations japonaises relatifs à la réception, l’incinération des débris contaminés en provenance du Nord du Japon, puis l’épandage des cendres issues de ces débris incinérés.

Depuis le centre détention où il a été placé, Masaki Shimoji a fait parvenir un appel daté du 12 décembre dans lequel on peut lire : « Comme je l’ai inlassablement répété, la dissémination des débris dans tout le Japon ne sera d’aucun bénéfice pour quiconque. Les budgets dédiés à la reconstruction des zones dévastées seront canalisés vers l’incinération, freinant les avancées en matière de reconstruction. La radioactivité sera propagée, contraignant ceux qui vivent dans les zones affectées à endurer les conditions de la contamination, et les responsabilités de TEPCO seront ainsi diluées.

Nous paierons cela de notre vie, de celle de nos enfants et de celle des enfants à naître. Une telle politique irresponsable ne devrait pas être autorisée. Nous devons arrêter cela. Ceux d’entre vous qui ont étudié la question et combattu ensemble, n’abandonnez pas et continuez la lutte. Quant à ceux qui ignorent les enjeux de l’incinération des débris, qu’ils en prennent connaissance et nous donnent un coup de main. C’est une lutte pour sauver notre avenir. » (...)

Les débris contaminés se retrouvent effectivement au centre d’une conception inédite de la solidarité. On connaissait la solidarité active, mais on ignorait tout, jusqu’à présent, de la solidarité radioactive (...)

L’accès démocratique à la protection consiste donc désormais à accéder démocratiquement à la contamination dans le cadre d’un partage des nuisances, et à garantir par là même l’acceptabilité des conséquences néfastes du désastre nucléaire en soumettant chacun à l’adaptation à un milieu morbide.

Dans sa lettre du 12 décembre, Masaki Shimoji demande spécifiquement « aux enseignants de l’université, aux médecins et aux scientifiques, et à tous ceux considérés comme des spécialistes, d’écouter les citoyens et d’apprendre d’eux qui semblent sans instruction et émotifs et dont la parole demeure non-entendue et ignorée. » (…) « Restez du côté de ceux qui s’opposent et agissent de manière à faire connaître la vérité » (…)

« Soyez toujours du côté de ceux qui ont le moins de pouvoir et aidez les. Même s’ils commettent des erreurs, usez de votre autorité quand il s’agit de faire face à ceux qui sont au pouvoir. Votre champ de spécialité n’a aucune importance ; ayez le courage de parler haut et fort. » (...)


« L’heure est venue de faire face à l’autorité de la nation, et cela me rend nerveux. Je ne peux pas les combattre seul. »
(...)

(On a appris le 29 décembre que Masaki Shimoji avait été libéré par les autorités la veille. Un autre manifestant reste toutefois incarcéré au motif d’ « obstruction au bon déroulement des affaires »).