
À Diyarbakir, en grande partie détruit par l’armée, les habitants espèrent que les élections mettront fin à l’enfer enclenché par Erdogan en 2015. Mais beaucoup redoutent un coup de force. (...)
« Le processus de paix a été une période incroyable pour nous tous, se souvient Sahin, un habitant de Diyarbakir_. Il n’y avait pas de morts dans nos rues, pas de guérilla et pas d’armée… Malheureusement, les massacres font partie de l’histoire de la Turquie. »_ Et, au Kurdistan turc, chacun le sait, la fin des combats ne signifie pas la fin de la guerre.
À l’automne 2016, la quasi-totalité des maires du Parti démocratique des régions (DBP), émanation locale du HDP, sont remplacés par des administrateurs nommés par le gouvernement. Comme des milliers d’autres sympathisants, neuf députés du HDP, dont ses coprésidents Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag, sont emprisonnés. Privés de leur maire, les habitants de Sur ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour récupérer leurs maisons et réinvestir le quartier. Mais le gouvernement a d’autres projets. (...)
« Avant même la fin des combats, les autorités parlaient déjà de grands projets de réaménagement urbain, explique Zeki, architecte et membre de l’Union des ingénieurs et des architectes de Turquie à Diyarbakir. Il y avait une centaine de monuments historiques protégés par l’État sur ce territoire. Mais les autorités ont retiré les certificats attestant de ce patrimoine et détruit ce qu’il en restait. Des milliers de maisons, dont les habitants étaient propriétaires, ont été vendues de force et rasées pour en construire de nouvelles. Désormais, il ne reste presque plus rien de ce quartier très symbolique pour le peuple kurde. » Comparant ces méthodes aux stratégies employées par Israël en Palestine, l’architecte y voit la volonté « de changer la démographie et la tentative d’instaurer une nouvelle politique d’assimilation culturelle ». (...)