
Après l’attaque terroriste qui a fait 18 victimes à Ouagadougou, l’opération Barkhane menée par la France dans la région affiche une nouvelle fois ses limites.
Ce sont deux nouvelles attaques qui illustrent le chaos dans lequel est plongé le Sahel. Dimanche 13 août, 18 civils ont été tués par des hommes armés à la terrasse d’un café de Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. Un scénario qui rappelle les raids menés par le groupe terroriste al-Qaida dans la région ces derniers mois, à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire, à Ouagadougou déjà ou à Bamako. Et quelques heures après l’effroi qui a de nouveau saisi « Ouaga » en cette soirée d’août, ce sont des militaires de la force de maintien de la paix des Nations unies au Mali (Minusma) qui étaient visés sur leur base de Tombouctou par des assaillants le 14 août.
Aux portes du désert, habitants et militaires sont autant victimes des djihadistes, qui mènent depuis leur défaite dans le nord du Mali face aux troupes françaises lors de l’opération Serval (2013-2014) une guérilla contre les gouvernements locaux et les troupes françaises et étrangères en mission sur place. Accueillis comme des « libérateurs » au Mali à leur arrivée, les soldats de Paris sont aujourd’hui accusés par les populations locales de contribuer à la déstabilisation du Sahel.
Il y a plus de militaires français sur le sol ouest-africain en 2017 qu’au lendemain de la vague d’indépendance en 1960. Le constat sonne bizarrement, alors que les dirigeants français affirment depuis une dizaine d’années à grands cris que « la Françafrique c’est fini ». (...)
À la fin du mandat de François Hollande, en mai, environ 4.000 soldats français étaient déployés dans la zone du Sahel. Un chiffre qui n’avait plus été atteint depuis la guerre d’Algérie. Le nouveau locataire de l’Élysée, Emmanuel Macron, y a effectué son premier déplacement à l’étranger en se rendant à la base de Gao au Mali pour rencontrer les troupes stationnées sur place. Cette forte présence ne passe pas inaperçue dans une région où le ressentiment contre l’ancienne colonie demeure très fort. (...)
Pour les populations locales, l’ex-puissance coloniale dissimule ses véritables motivations sur les raisons de sa présence renforcée sur le continent. Dans une note d’analyse datant de juillet 2016, le Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité (Grip), un centre de recherche indépendant fondé à Bruxelles en 1979, livre les résultats d’une enquête réalisée au Niger pour connaître l’opinion de ses habitants sur la présence de soldats étrangers sur son sol. Le résultat est accablant pour la France, mais aussi pour ses alliés. (...)
Une demande de transparence
Mais la réalité n’est pas si unicolore. Sur le terrain, de nombreux Maliens, Nigériens ou Burkinabé ne sont pas forcément favorables à un départ soudain de la France, mais davantage pour plus de transparence sur ses interventions. Début août, des centaines de personnes ont manifesté devant l’ambassade de France à Bamako. Ils répondaient à l’appel de trois mouvements de jeunes de la société civile pour dénoncer ce qu’ils appellent « la partialité de la France » dans le conflit qui opposent le Mali et des groupes armés. (...)
Au Sahel, Paris est souvent accusé de vouloir sécuriser d’abord les précieuses matières premières présentes dans la région, comme les mines d’uranium exploitées par le groupe français Areva au Niger, plutôt que les populations. (...)
la pire publicité pour l’opération Barkhane et les militaires français à sa tête est son manque de résultats probants. La nouvelle tuerie dramatique à Ouagadougou –un pays qui avait été épargné par les attaques djihadistes jusqu’en 2016– conforte la population dans son opinion : les Français créent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. (...)