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IRIN - nouvelles et analyses humanitaires
Au-delà de Mossoul : les bombes à retardement des déplacés et de la religion en Irak
Article mis en ligne le 4 décembre 2016
dernière modification le 1er décembre 2016

Ce texte est le premier d’une série d’articles sur la menace que représentent pour la paix et la stabilité à long terme le problème du déplacement des populations et les divisions religieuses en Irak.

Tous les occupants des camps installés dans le désert irakien ont une histoire. Et tous veulent rentrer chez eux.
Saadiya, 70 ans, a la voix rocailleuse et les ongles teints au henné. Elle sourit, même quand elle raconte que sa maison a été détruite.

Fazih vit à quelques pas d’elle, dans un abri en préfabriqué. Il a le visage buriné par le soleil, ne se rappelle plus de son âge, mais se souvient d’avoir fui le prétendu Etat islamique et d’avoir mangé de la nourriture pour animaux pendant plusieurs mois pour survivre. Il raconte que les hommes de son village ont agité leur tricot de corps blanc à l’arrivée de l’armée irakienne avançait.

Et puis il y a le jeune garçon qui ne parle pas et regarde droit devant lui. Il a des petites taches noires (qui ressemblent à du shrapnel) sur les joues et des cicatrices en relief sur le corps – des blessures de guerre. Des proches racontent qu’il a perdu sa mère lors d’un combat et que son père est porté disparu.

Tous trois viennent de la région de Falloujah, mais Ameriyat Falloujah héberge environ 50 000 personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP) de tout l’Irak – des hommes, des femmes et des enfants traumatisés, qui ont échappé aux combattants de l’EI ou à la guerre qui leur ait faite. (...)

Après avoir échappé à l’EI, bon nombre de déplacés ont traversé le désert à pied pour rejoindre Ameriyat Falloujah en juin, mais ils n’ont trouvé qu’une communauté humanitaire dépassée et mal préparée.

La situation s’est améliorée. A leur arrivée, beaucoup vivaient entassés dans des tentes – il fallait tout faire pour les protéger du sable et du soleil de l’été. Ces coquilles blanches sont aujourd’hui vides : les résidents du camp sont hébergés dans des préfabriqués ou des tentes plus petites. Ils ont de l’eau, des toilettes et des douches. Un petit marché, sorti de nulle part, propose des légumes et des cartes de téléphone mobile.

Cependant, il n’y a pas grand-chose d’autre et, à travers tout le pays, qu’ils vivent dans l’incertitude dans des camps établis dans le désert ou qu’ils soient hébergés dans des villes, les PDIP ont rarement la possibilité de se déplacer de province en province sans autorisation, et les emplois sont rares. Bon nombre de PDIP disent qu’elles se sentent oubliés.

Pour les populations forcées de quitter les régions d’où l’EI est en passe d’être expulsé, comme certaines parties de la province d’Anbar, le retour à la maison est compliqué et présente des risques politiques, liés aux conflits passés et aux divisions religieuses. La reconstruction a à peine commencé. (...)

Cela fait presque un an que l’EI a été chassé de la ville. M. al-Fahdawi a indiqué que 70 pour cent des habitants de Ramadi étaient revenus dans cette ville en grande partie en ruines. Selon une évaluation menée récemment, la ville compte aujourd’hui un peu moins de 180 000 habitants contre 500 000 avant la guerre.

Ce qui se passe à Anbar a de l’importance – c’est la seule province gouvernée par les sunnites, minoritaires à l’échelle du pays, et bon nombre de personnes pensent que l’EI s’est emparé rapidement de la ville, parce que le groupe bénéficierait d’un certain soutien au sein de la population locale. Ramadi a déjà été aux prises avec l’extrémisme : pendant l’insurrection anti-américaine après l’invasion de 2003, Ramadi était un bastion d’Al-Qaïda, même si les tribus de la province ont largement contribué à chasser l’organisation de la ville. (...)