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Beauté fatale Les nouveaux visages d’une aliénation féminine
Mona CHOLLET
Article mis en ligne le 20 février 2012
dernière modification le 17 février 2012

Écrire un livre pour critiquer le désir de beauté ? « Il n’y a pas de mal à vouloir être belle ! », m’a-t-on parfois objecté lorsque j’évoquais autour de moi le projet de cet essai. Non, en effet : ce désir, je souhaite même le défendre (voir chapitre 2). Le problème, c’est que dire cela à une femme aujourd’hui revient un peu à dire à un alcoolique au bord du coma éthylique qu’un petit verre de temps en temps n’a jamais fait de mal à personne.

Autant l’admettre : dans une société où compte avant tout l’écoulement des produits, où la logique consumériste s’étend à tous les domaines de la vie, où l’évanouissement des idéaux laisse le champ libre à toutes les névroses, où règnent à la fois les fantasmes de toute-puissance et une très vieille haine du corps, surtout lorsqu’il est féminin, nous n’avons quasiment aucune chance de vivre les soins de beauté dans le climat de sérénité idyllique que nous vend l’illusion publicitaire. Pourtant, même si l’on soupire de temps à autre contre des normes tyranniques, la réalité de ce que recouvrent les préoccupations esthétiques chez les femmes fait l’objet d’un déni stupéfiant. L’image de la femme équilibrée, épanouie, à la fois active et séductrice, se démenant pour ne rater aucune des opportunités que lui offre notre monde moderne et égalitaire, constitue une sorte de vérité officielle à laquelle personne ne semble vouloir renoncer. (...)

Pendant ce temps, sans qu’on y prenne garde, notre vision de la féminité se réduit de plus en plus à une poignée de clichés mièvres et conformistes. La dureté de l’époque aidant, la tentation est grande de se replier sur ses vocations traditionnelles : se faire belle et materner (chapitre 1). Le cinéma est gangrené par le phénomène des « égéries », ces actrices sous contrat avec un parfumeur, un maroquinier ou une marque de cosmétiques, et plus préoccupées de soigner leur image de portemanteau maigrichon tiré à quatre épingles que d’étendre la palette de leur jeu. Le succès des blogs mode ou beauté témoigne lui aussi d’un horizon mental saturé par les crèmes et les chiffons (chapitre 3).

Au-delà des belles images, l’omniprésence de modèles inatteignables enferme nombre de femmes dans la haine d’elles-mêmes, dans des spirales ruineuses et destructrices où elles laissent une quantité d’énergie exorbitante. (...)

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