Michel Sapin, ministre français des Finances, et Wolfgang Schäuble, son homologue allemand, ainsi que Pier Carlo Padoan, ministre italien de l’Économie, viennent d’adresser un peu de lecture au commissaire européen chargé des Affaires économiques, Pierre Moscovici. Adressée le 28 novembre, cette lettre insiste, en anglais, sur la fin des optimisations fiscales, aujourd’hui permises en Europe. Ambiance.
« Le manque d’harmonisation fiscale dans l’Union européenne est l’une des principales causes permettant la mise en place d’une fiscalité agressive », expliquent les cosignataires. Et de constater qu’en dépit des progrès constatés ces six derniers mois, le marché intérieur continue de souffrir d’une situation qui touche tous les États, et entraîne une concurrence déloyale.
L’unique réponse que Bruxelles peut apporter passe par « l’adoption d’un ensemble de règles communes contraignantes sur la fiscalité des entreprises, pour limiter la concurrence fiscale et combattre la planification fiscale agressive ». Les trois ministres se disent convaincus que cette fin ne pourra être atteinte que par l’adoption d’une directive anti-BEPS, portant sur l’imposition et le transfert des bénéfices.
Les échanges d’informations entre les États sur les décisions fiscales transfrontalières devraient donc être rendus obligatoires, et automatiques. De quoi amorcer un premier mouvement nécessaire. Sans s’arrêter toutefois en si bon chemin. « La directive devrait également inclure des obligations d’informations pour les opérations de restructurations transfrontalières et d’autres, intra-européennes, des entreprises », poursuivent les ministres.
Enfin, un effort de transparence supplémentaire est réclamé. (...)
L’actuel président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, ancien premier ministre du Grand Duché, a assuré qu’il ferait de l’évasion fiscale une priorité, en renforçant l’échange automatisé d’informations entre les pays membres. Mais d’un autre côté, le Luxembourg continue de nier qu’il pratique une politique fiscale avantageuse pour les sociétés.
C’est pourtant bien ce qui était ressorti du scandale LuxLeaks, par lequel plusieurs médias avaient dévoilé toute la mesure des optimisations fiscales proposées à de nombreuses sociétés, américaines, certes, mais également françaises, sur le territoire luxembourgeois.
Or, la tension monte quand l’actuel premier ministre du pays a garanti qu’il ne modifierait pas la fiscalité du Luxembourg, pour la faire augmenter. (...)