
Sept associations et syndicats européens ont rendu public le 28 octobre 2015 un rapport dans lequel ils dénoncent une nouvelle vague de libéralisation forcée des services publics, via les traités CETA et TAFTA en cours de discussion entre l’Europe, le Canada et les Etats-unis.
S’il est ratifié par le Parlement européen, le CETA serait le premier accord de l’Union européenne dont le chapitre « Services publics » adopterait une approche dite en « liste négative ».
Cette innovation vise à assurer une couverture maximale des services par les nouveaux accords de libre-échange. Ainsi, selon le projet de traité, tous les services publics qui n’auraient pas fait l’objet d’une exclusion préalable pourront être libéralisés.
C’est l’approche dite de « liste positive » qui structurait jusqu’à présent les accords commerciaux européens : les services publics qui n’étaient pas explicitement mentionnés dans cette liste étaient exclus d’office et par conséquent protégés de toute perspective de libéralisation.
A contrario, l’approche nouvelle, dite de « liste négative » permettrait à l’avenir d’ériger en règle la libéralisation des services publics. (...)
selon le rapport, les lobbyistes qui défendent les intérêts de l’industrie des services ne se sont pas contentés d’imposer une approche en « liste négative » dans le Ceta, et en « liste hybride » dans le Tafta.
Une fois leurs requêtes acceptées, ils auraient ensuite tenté d’empêcher les négociateurs… d’utiliser l’exclusion sur les services publics, permettant aux Etats membres d’en soumettre un certain nombre à des monopoles publics.
La réserve que les négociateurs de la Commission européenne auraient introduite, par exemple sur l’accès aux marchés de l’eau ne s’appliquerait pas aux services d’assainissement et de traitement des eaux usées, mais uniquement à ceux de l’eau potable…
De plus, une collectivité souhaitant réguler son service de l’eau à travers un cahier des charges exigeant, ou projetant de le re-municipaliser, ne serait pas totalement protégée juridiquement.
Un opérateur privé estimant que de telles décisions violent ses « attentes légitimes » pourrait en effet introduire un recours devant un tribunal d’arbitrage privé, en vertu de la protection des investissements prévue en parallèle par ces accords commerciaux.
Le rapport dénonce aussi les clauses de « statu quo » et de « cliquet » que les négociateurs envisageraient d’inclure sous la pression de l’industrie des services : « Ces dispositifs juridiques transformeraient toute expérience dé-régulatrice en obligation permanente et éviteraient de renégocier avec les différents parlements pour soumettre les nouveaux services publics à la concurrence ».
Autrement dit, elles figeraient définitivement les choix politiques, « au mépris de tout gouvernement élu. »
Ces orientations « menacent la tendance croissante à la re-municipalisation des services de gestion et de distribution de l’eau en France, en Allemagne, mais aussi en Italie, Espagne, Suède ou Hongrie », dénonce Amélie Canonne, animatrice française du collectif Stop-Tafta. (...)