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« Cadeau fiscal » : un langage d’ « ultra-gauche » selon Éric Brunet
Article mis en ligne le 17 septembre 2018

Dans un précédent article, Monique Pinçon-Charlot relatait son expérience en tant qu’invitée sur le plateau de « Questions directes » (France 2), consacré ce jour-là à « l’égoïsme des riches ». Sans appel, sa critique du dispositif de l’émission montre combien le service public sabote le débat d’idées et rend particulièrement laborieux le développement d’analyses qui remettent en cause l’idéologie et les intérêts des dominants. Laborieux, tant les contraintes de l’émission – notamment le nombre et le statut des invités – pèsent sur l’expression de la sociologue forte pourtant de décennies d’enquêtes, et tant les rappels à l’ordre de l’éditocratie à l’encontre de la plus petite déviation politique sont véhéments. Au cours de cette émission, Éric Brunet en donnait un très bon exemple, qui nous rappelle à quel point le langage est un enjeu de lutte politique dans la sphère médiatique.

(...) point les tenants de l’idéologie libérale, déguisés en éditorialistes, ne cèdent pas une once de terrain sur la question du langage, et ne tolèrent qu’aucun discours n’empiète un tant soit peu sur le pré-carré lexical – et donc politique – qu’ils déroulent en permanence dans les grands médias. Éric Brunet aurait plutôt dû se réjouir du cadeau qui lui fut gracieusement offert par le service public et qui lui permit de tranquillement distiller sa haine… de l’impôt à une heure de grande écoute, aux frais du contribuable.

Mais parler de « cadeau fiscal » induit une vision du monde qui n’est évidemment pas celle promue par Éric Brunet.

(...)L’enjeu de la bataille médiatique réside précisément dans la naturalisation de la doxa libérale dans la bouche des éditocrates, et, plus largement, des dominants. Que dire des désormais canoniques « plans sociaux » ou « plans de sauvegarde de l’emploi » ? Du fameux « dialogue social », de la « masse salariale », du « coût du travail » et autres « charges sociales » ? Autant d’expressions largement connotées qui se sont imposées comme les seules possibles – tout à la fois normales et neutres – à force d’avoir été rabâchées dans les médias dominants et qui, par leur omniprésence, ont contaminé les discours et les représentations du monde social [1].

Sur toutes les questions, les dominants ont en effet forgé un lexique à l’image de leur vision du monde et de leur politique ayant largement colonisé les grands médias – que l’on pense à l’immigration, à la culture, à la politique internationale, aux conditions de travail, aux relations entre les femmes et les hommes, etc. (...)