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Médecins Sans Frontières
Calais : la peur grandit chez les migrants de la Jungle tandis que les pressions sur le camp s’intensifient
Article mis en ligne le 13 septembre 2016

Les perspectives ont rarement été aussi sombres pour de nombreux migrants de la Jungle de Calais. Un nouvel hiver approche et le gouvernement français a promis de fermer le camp définitivement. Un obstacle supplémentaire, un mur, devrait bientôt y être érigé. Cette semaine, des habitants de la ville portuaire de Calais ont manifesté et barré les routes afin de réclamer la destruction du camp.

(...) le nombre de migrants n’est pas près de diminuer, même si l’attitude à l’égard des réfugiés change très vite en Europe. « En Libye, les gens font la queue à Zouara et à Sabratha, dit-il, en référence aux deux villes côtières par lesquelles les migrants transitent vers l’Europe à bord d’embarcations de fortune pilotées par des passeurs. Tous les gens que j’ai rencontrés à Zouara voulaient se rendre en Europe. Tout le monde a une destination en tête, et Calais est l’une d’entre elles. »
« Les gens continueront de prendre des risques pour venir »

Ahmad, jeune Soudanais de 22 ans, vit dans la Jungle depuis une semaine. Il a traversé la Méditerranée à bord d’un canot pneumatique avec 140 autres migrants. Il dit avoir survécu grâce à un bateau de sauvetage de MSF. « En Libye, j’ai vu des Soudanais, des Nigérians, des Sénégalais, des Marocains, des Tchadiens, des Bangladais, des Afghans, des Ghanéens, des Gambiens, des Erythréens et des Ethiopiens. Beaucoup étaient des hommes, mais il y avait aussi de nombreuses femmes, pour la plupart enceintes, et des enfants. Peu importe que la traversée soit dangereuse, les gens continueront de prendre des risques pour venir », explique Ahmad qui porte un collier aux couleurs du drapeau rastafari. (...)

Ahmad affirme avoir dû travailler « en tant qu’esclave » en Libye, presque sans aucune rémunération. « La guerre en Libye est horrible. Personne n’est en sécurité. N’importe qui peut vous tuer, à tout moment, explique-t-il. Pour nous, la mer déchaînée et les conditions difficiles à l’arrivée n’ont pas d’importance. C’est notre situation d’origine, là d’où on vient, qui nous motive à embarquer à bord du bateau. »

Dans les jours qui ont suivi la manifestation pour la fermeture immédiate du camp à Calais, de nouveaux arrivants sont encore venus gonfler le nombre de tentes dans la Jungle. Depuis la manifestation, la police recourt chaque soir un peu plus aux gaz lacrymogènes, ce qui dégrade encore davantage la vie des réfugiés. (...)

Certains, comme Ismail, Afghan de quinze ans, n’ont nul autre endroit où aller. Il est arrivé cette semaine dans la Jungle, après avoir traversé l’Iran, la Turquie, la Serbie, la Hongrie, la Bulgarie, l’Autriche, l’Italie et la France. « J’ai été bloqué trois jours dans une forêt de Bulgarie. La police nous a tiré dessus. La police turque nous a également tiré dessus. J’ai été fait prisonnier et torturé en Iran. En Serbie, je me suis fait frapper par des habitants. Il m’a fallu trois mois pour venir de Jalalabad à Calais », raconte Ismail.

Il tient absolument à rejoindre son père à Londres. Bien que celui-ci soit citoyen britannique, il n’a pu bénéficier du regroupement familial pour son fils mineur, car comme beaucoup de personnes nées dans un pays en guerre, il ne possède pas de certificat de naissance. « Ma vie n’est que tristesse. Je ne me souviens d’aucun moment de bonheur dans cette vie », dit-il en plantant sa tente dans le sol dur de la Jungle