
(...) Il est devenu sinon quotidien du moins courant que des personnes se disant mineures soient enfermées au centre de rétention de Coquelles, près de Calais, ou envoyées par la préfecture du Pas-de-Calais dans d’autres centres de rétention en France. Certaines de ces personnes peuvent avoir l’air très jeunes, une quinzaine d’années, mais les procès-verbaux dressés par la police aux frontières les disent majeures.
Il s’agit d’un exemple parmi d’autres des violations des droits auxquelles nous assistons quotidiennement, à côté des violences policières qui continuent, et avec une insistance particulière sur les personnes mineures puisqu’elles proportionnellement plus nombreuses qu’auparavant parmi les exilé-e-s.
Par exemple, hier vendredi un campement qui abritait une vingtaine de personnes a été détruit, tentes et effets personnels, à Marck à côté de Calais. Pas l’ombre d’une décision légale d’expulsion, et la destruction des effets personnels est de toute façon illégale.
Après un travail de mise en forme des témoignages recueillis, trois associations, la Cabane juridique, le Réveil Voyageur et Utopia 56 viennent de publier un communiqué de presse alertant sur la situation, et accompagnant la saisine du Défenseur des Droits et de la Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté.
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« Communiqué de presse
Nous, associations, intervenant quotidiennement à Calais et dans sa région, souhaitons alerter largement sur la situation des exilé.e.s à Calais, et notamment celle des mineur.e.s non-accompagné.e.s.
Le Défenseur des Droits et la Contrôleur Général des Lieux de privation de liberté seront saisis dès aujourd’hui au sujet des pratiques et les manquements observés ou rapportés à Calais et dans sa région ; violences policières répétées, accès entravé au dispositif d’hébergement d’urgence existant, absence d’information sur les droits et d’hébergement adapté aux mineurs à Calais, abus de pouvoir au commissariat de Calais et de Coquelles et au Centre de Rétention Administrative de Coquelles, et multiplication des placements en CRA éloignés de Calais, dans des circonscriptions pratiquant de plus en plus fréquemment des déportations vers les pays d’origine.
En dépit de la présence de plusieurs centaines de personnes (entre 300 et 400) revenues depuis la destruction fin octobre de ce qui a été le plus grand bidonville de France, le gouvernement affirme sans honte son refus de mettre en place un dispositif d’accueil durable à Calais.
L’incendie qui a réduit le camp de Grande-Synthe en cendres lundi 10 avril au soir, nous fait craindre, un déplacement important d’exilé.e.s vers Calais, dont des mineur.e.s et des familles, alors même que l’État refuse d’assumer ses responsabilités et que les actions des associations ou simples citoyen.ne.s qui viennent aujourd’hui au soutien des exilé.e.s sont régulièrement entravées par les autorités.
Les conséquences de cette politique sont graves. Des personnes vulnérables de par leur parcours, leur statut juridique, leurs état de santé et psychologique, leur sexe, ou encore leur très jeune âge sont maintenues dans une situation de grande précarité.
Relégué.e.s aux sous-bois d’une zone industrielle, sans abri, ni tente pour dormir, traqué.e.s des lieux de distribution de repas jusques aux parkings, de nombreux.ses exilé.e.s relatent des violences policières quotidiennes. Gaz lacrymogène au visage à bout portant, coup de pieds, de poings, de matraque, sont monnaie courante, dans la rue ou à l’arrière d’un fourgon de police. Nous disposons aujourd’hui d’un nombre important de témoignages, notamment de mineurs non-accompagnés. (...)
En outre, nous nous alarmons de voir se multiplier depuis le début de l’année, les demandes de laisser-passer pour des pays en guerre ou reconnus comme dangereux, comme le Soudan, l’Afghanistan ou l’Irak. Les déportations, notamment vers le Soudan, pays dont le dirigeant est poursuivi pour crime contre l’humanité, se multiplient dans une grande indifférence.
Cette situation est inacceptable, nous ne devons pas nous habituer aux traitements inhumains dont sont victimes quotidiennement les personnes en exil sur notre territoire par le fait d’un gouvernement qui réprime et ne protège plus.
En raison de la gravité des faits rapportés, nous invitons instamment le Défenseur des Droits et spécialement la commission pour la défense des droits des enfants, ainsi que la Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté, à se rendre sur place afin de faire la lumière sur la situation.