
Les protestations se propagent à travers la Chine en raison des restrictions strictes imposées par la politique "zéro Covid" du gouvernement. Mais les utilisateurs de Twitter recherchant des informations sur les villes concernées par ces manifestations sont confrontés à un océan de tweets provocants montrant des jeunes femmes dans des poses suggestives et faisant la publicité de services de "rencontres".
Depuis le dimanche 27 novembre, quiconque recherchant sur Twitter des informations concernant les villes chinoises où des manifestations ont eu lieu - comme Pékin, Shanghaï, et Hangzhou - aura été confronté à une accumulation interminable de spams. Cet obstacle rendant presque impossible la recherche et le partage d’informations utiles, les images de ces manifestations se sont répandues plus lentement
Le 2 décembre, alors que les restrictions sanitaires avaient déjà été assouplies dans certaines villes dont Shanghaï et Guangzhou, l’équipe des Observateurs de FRANCE 24 a analysé ces tweets chinois, qui continuaient à inonder plusieurs hashtags et fils Twitter.
Ces tweets ont été publiés toutes les deux secondes à partir de centaines de comptes Twitter différents, la plupart créés au cours des deux derniers mois. Et ces comptes n’ont que très peu, voire aucun followers, un indice courant qui semble indiquer qu’il s’agit de faux comptes ou de comptes créés artificiellement. (...)
Ces tweets mentionnant différentes villes comportaient des formulations similaires, parfois même identiques, souvent des mots aléatoires ou des fragments de phrases dénués de sens en chinois et en anglais. Plusieurs photos identiques ont également été postées d’innombrables fois. (...)
Les mêmes photos sont publiées en boucle par différents comptes, encombrant ainsi le flux Twitter. (...)
Les experts soupçonnent que le gouvernement chinois pourrait être impliqué dans la publication de ces tweets, mais, pour l’instant, aucun élément ne permet d’affirmer cela. Une enquête plus approfondie et un effort de collaboration avec les plateformes seraient nécessaires pour identifier la source de ce réseau et déterminer s’il s’agit ou non d’une activité coordonnée. (...)
Dans une mise à jour de ses recherches, Strick a remarqué que "certains de ces comptes ont été suspendus". Il explique qu’il s’agit là d’un trait caractéristique des "spammeurs" : les comptes sont suspendus, puis créés à nouveau. Cette campagne de distraction constitue une violation de la politique de Twitter en matière de spam et de détournement de hashtag, et Twitter est connu pour supprimer de tels messages. (...)
L’équipe des Observateurs de FRANCE 24 a examiné de plus près les comptes qui tweetent ces spams. La majorité de ces comptes Twitter ont été créés au cours du mois dernier (novembre 2022), n’avaient aucun follower et suivaient soit une poignée de comptes choisis au hasard, soit personne. (...)
Les images à caractère sexuel apparaissent rarement sur les réseaux sociaux depuis que le gouvernement chinois a pris des mesures de restriction des contenus vulgaires et pornographiques au début des années 2000. Il est donc peu probable que les tweets faisant la promotion de services sexuels et utilisant des hashtags chinois soient envoyés par des utilisateurs individuels.
Le professeur Gary King, directeur de l’Institute for Quantitative Social Science de Harvard et expert en sciences sociales computationnelles, estime que ces tweets sont une forme de "distraction" destinée à détourner l’attention des manifestations. (...)
Le 30 novembre, un tweet posté par la journaliste singapourienne Melissa Chen rapportait que des internautes chinois se plaignaient du fait que leurs téléphones Huawei, fabriqués en Chine, supprimaient automatiquement les vidéos des manifestations enregistrées dans leurs galeries d’images. (...)