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Côté quartiers
Ces jeunes Espagnols, nouveaux forçats des grands crus bordelais
Article mis en ligne le 26 mai 2014

Du Médoc au Sauternais, le marché de la vigne emploie en masse des saisonniers, dont une moitié constituée de jeunes migrants en provenance majoritairement d’Espagne. Vivant dans des fourgons et soumis aux contrats précaires, ils espèrent survivre ainsi et aider leur famille.

Depuis trois ans, ils débarquent en Gironde de plus en plus nombreux, avec leur camionnette pour seul toit, et un objectif : travailler dans la vigne, de mars à novembre.

Avant la catastrophe économique de 2008, qui a plongé 26 % des actifs espagnols dans un chômage longue durée, les jeunes vendangeaient sur les terres ibériques. Mais, très vite, le taux horaire a dégringolé. « Pour le même boulot en Espagne, je touche 5 euros de l’heure alors qu’en France c’est 9,50 euros. C’est vite vu », raconte Carolina, 27 ans, originaire de Melilla. Installée sur une aire des gens du voyage de Saint-Pierre-d’Aurillac, à quelques kilomètres de Langon, cette jeune femme symbolise à elle seule une génération de jeunes précaires confrontés à une des crises les plus violentes jamais vécue par les Espagnols.

"Les banques ont fait plonger le pays" (...)

Parfois, les conditions de travail ne suivent pas...

Des champs de vigne défilent de part et d’autre des routes de campagne. Entre les petits crus bourgeois et les premiers grands crus, Château Climens ou Château d’Yquem, la demande de récolte manuelle est énorme. Levée à 6 heures du matin, Carolina commence l’épamprage de la vigne à 7h30 jusqu’à 15h30 sur des terres composées de graves, d’argile et d’affleurement calcaire. Sept heures de travail accroupie, le dos plié pour débarrasser le cep des rameaux et favoriser la maturation des branches fruitières. Il arrive que les conditions de travail ne suivent pas. Pas de gants, pas d’eau, pas de lunettes, pas de protection pour la pluie et le vent. (...)

Certains jeunes font les poubelles à Langon

A Saint-Pierre-d’Aurillac, où sont installés ces précaires de la vigne, le maire (PCF) Stéphane Denoyelle, nous reçoit dans son bureau, au côté de Paulette Laprie, adjointe à la solidarité. Les deux élus expriment une forte inquiétude. « L’arrivée de ces nouveaux migrants espagnols, polonais et italiens qui travaillent dans la vigne, c’est la conséquence d’un dumping social à échelle européenne. Les châteaux sont les grands gagnants. Ils ne se préoccupent ni des conditions de travail ni des conditions de vie. Nous avons appris récemment que certains jeunes allaient faire les poubelles à Langon. Nous sommes solidaires, nous les connaissons, nous ne voulons pas les expulser mais cette aire n’est pas faite pour le long terme. Nous avons conscience que cette précarité est organisée par le patronat. Du coup, la ville se retrouve presque complice de ce système. Pour nous, élus, c’est difficile de se positionner », reconnaît l’édile indigné.

"Ici c’est une région où tout le monde sait mais personne n’ose dire" (...)